Intervention de Vincent Chriqui

Réunion du 18 octobre 2012 à 9h30
Mission d'information sur les coûts de production en france

Vincent Chriqui, directeur général du Centre d'analyse stratégique :

Si la protection sociale n'était plus financée comme elle l'est actuellement, elle devrait l'être par d'autres moyens, c'est vrai. Ainsi, des dispositifs individualisés remplaceraient des mutualisés, ce qui ne serait pas forcément mieux. Mais d'un autre côté, tout système repose sur des arbitrages dont beaucoup sont implicites. Une situation où la protection sociale s'accroît, mais où la progression des salaires nets est faible, voire nulle, résulte d'un arbitrage qui pourrait être différent si les Français avaient le choix. Il n'est pas certain que l'on se console de voir les salaires stagner en se disant que ses droits à la retraite progressent.

Le niveau des dépenses de R&D rapportées au PIB en France est au-dessus de la moyenne européenne, mais reste bien inférieur à celui en vigueur dans les pays nordiques, les plus performants en la matière. La part des dépenses de R&D engagées dans le public est supérieure à celle constatée dans d'autres pays. Les défis que la France doit relever sont donc le développement de la R&D dans le secteur privé et l'amélioration du partage de la R&D entre les sphères publique et privée. Le CAS a publié une étude sur les politiques de soutien à l'innovation dans différents pays. Il en ressort que la France a adopté une stratégie mixte en définissant les secteurs à aider, jugés cruciaux pour la croissance future – ce sont les dépenses d'avenir –, tout en appuyant la R&D et l'innovation dans les entreprises par des dispositifs généraux – le crédit impôt recherche (CIR) est de cette nature. Le précédent Gouvernement a mené ces deux politiques : des moyens ont été dégagés, malgré la crise financière, pour les dépenses d'avenir et le CIR a été maintenu à un niveau très élevé, ce qui permet à la France d'être un pays accueillant pour les investissements dans la R&D. Ces dispositifs peuvent toujours être améliorés et il serait opportun de les mutualiser, au moins en partie, à l'échelle européenne.

L'économie française occupe des positions ciblées et excelle dans certains domaines de haute technologie – l'aéronautique, l'aérospatial, l'agroalimentaire, la pharmacie –, alors que l'Allemagne est présente sur de nombreux secteurs de moyenne technologie grâce notamment à des entreprises de taille moyenne. La France accuse un retard, non en matière de « made in France », car des biens de très grande qualité sont produits, mais s'agissant de la capacité à se différencier et à développer des politiques de marque, ce qui suppose des marges pour le financement d'activités de design ou de R&D.

Notre pays est porté par de grands champions nationaux alors que l'Allemagne et d'autres pays ont réussi à tisser un réseau d'entreprises de taille intermédiaire et exportatrices. Avec les pôles de compétitivité et les dépenses d'avenir, nous essayons d'irriguer un tissu, car il faut éviter une concentration des aides sur les grandes entreprises. L'expérience allemande nous enseigne que la formation est primordiale. Le système français repose sur les grandes écoles au détriment de la formation professionnelle. Or, le cursus dans ces écoles conduit aux grandes entreprises multinationales. En Allemagne, le choix d'une voie professionnelle garantit l'obtention d'un emploi et cette formation comprend une part importante effectuée en alternance, souvent dans une PME qui bénéficiera ensuite d'une main-d'oeuvre qualifiée. Des enseignements doivent être tirés de cette méthode.

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