Intervention de Barbara Pompili

Réunion du 4 décembre 2013 à 16h45
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Pompili :

La réorientation de notre politique agricole est une nécessité qui fait l'unanimité. Aujourd'hui, l'incitation à la production ou à la surproduction à des fins d'exportation est d'autant moins admissible que les effets de ce modèle agricole sont connus. Ils concernent l'environnement, la santé des agriculteurs et des consommateurs, mais aussi l'international, car les spécialisations régionales se font au détriment des productions vivrières locales. L'accaparement des terres pour l'exportation est inacceptable.

La notion de souveraineté alimentaire doit être imposée. En France comme ailleurs, les agriculteurs doivent pouvoir vivre dignement de leur travail et proposer aux consommateurs des produits de qualité qui n'ont pas fait le tour du monde avant d'arriver dans leur assiette.

Comment réorienter notre politique agricole ? En la matière, j'ai bien peur que les divergences d'analyses soient importantes.

Quand je vois qu'un projet « d'usine à vaches » prospère en Picardie, mon inquiétude est grande. Une ferme sera créée uniquement pour récupérer les déchets organiques de mille vaches qui ne verront jamais ni le jour ni un bout d'herbe, dans le seul but de faire fonctionner un méthaniseur industriel. Nous voilà bien loin de l'agriculture paysanne, respectueuse de l'environnement et des animaux. L'impact sur les éleveurs locaux, qui connaissent déjà des conditions de vie et de travail difficiles risque d'être particulièrement néfaste, et je suis également inquiète des risques sanitaires tant pour les bêtes que pour les personnes qui vivront à proximité de cette ferme surdimensionnée et hors-sol.

Ce projet de loi devra être l'occasion d'encadrer tout cela pour interdire ces débordements et promouvoir une agriculture durable. Cependant, pour que cette réforme soit bien réelle, il faudra de l'ambition et du courage, notamment pour affronter les nombreux lobbies aujourd'hui satisfaits financièrement de cette organisation et de cette répartition des rôles. La question de la gouvernance est donc essentielle. Les écologistes prônent l'ouverture des structures au pluralisme syndical, aux consommateurs et aux associations environnementales. Vous vous en doutez, nous serons une force de proposition pour donner à cette réforme toute l'envergure qu'elle mérite.

La recherche constante de la double performance économique et environnementale peut par exemple faire craindre le pire. Le volet environnemental ne saurait être un simple slogan ; il faut au contraire concourir au développement d'une économie agricole relocalisée, respectueuse des agriculteurs, des consommateurs, de l'environnement et des bêtes.

La recherche et la formation continue ou initiale jouent un rôle central dans la mise en place de ce nouveau modèle agricole. La recherche permettra d'aller plus loin dans ces nouvelles voies, en s'intéressant aux modes alternatifs. Elle sera d'autant plus efficace qu'elle deviendra plus participative et qu'elle s'ouvrira au monde agricole et aux citoyens. La formation permettra d'armer les générations à venir confrontées à ce changement, ainsi que celles et ceux qui souhaitent se reconvertir. Il s'agit de les préparer à une agriculture durable.

Le groupe écologiste a, en conséquence, déposé plusieurs amendements qui visent à promouvoir l'agro-écologie ainsi que l'agriculture biologique aussi bien en termes de formation que de recherche. Dans le même état d'esprit, nous souhaitons que cette loi soit l'occasion de promouvoir l'éducation à l'environnement et au développement durable, et qu'elle s'intéresse aux questions du bien-être animal.

Pour que les pratiques changent, il faut aussi s'intéresser aux formateurs et leur donner les outils pour porter ce changement devant leurs élèves. La formation des enseignants est un point essentiel qui a été soulevé lors des débats sur la refondation de l'école avec la création des écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE). Une solution de même nature doit être trouvée en matière de formation agricole. Pourquoi ne pas, par exemple, prévoir la création d'une école supérieure de l'enseignement agricole chargée de former les futurs enseignants sur les questions agricoles ? Elle comprendrait évidemment des formations en agro-écologie.

Monsieur le rapporteur pour avis, disposez-vous d'informations concernant la formation des conseillers en développement des chambres d'agriculture ? Ces derniers sont des interlocuteurs privilégiés des agriculteurs ; il est indispensable de les former à l'agro-écologie et aux nouvelles pratiques.

Afin que les pratiques changent, il faut aussi encourager les expérimentations pédagogiques. Nous avons déposé un amendement en ce sens, qui vise également à soutenir l'immersion des élèves dans des exploitations mettant en oeuvre les méthodes nouvelles d'agriculture biologique et d'agro-écologie.

Dans un autre registre, nous avons également présenté des amendements rappelant ceux que nous avions défendus lors du débat sur le projet de loi de refondation de l'école. L'un tend par exemple à ce que les apprentissages ne se limitent pas à une série de connaissances à acquérir mais qu'ils concernent aussi des compétences à maîtriser. Un autre concerne les parcours d'éducation artistique et culturelle et d'éducation à l'environnement.

Monsieur le rapporteur pour avis, pouvez-vous nous donner quelques précisions concernant l'Institut agronomique et vétérinaire de France ? Sa création suscite en effet de nombreuses interrogations, et de vives critiques ont été émises par différentes instances comme le Conseil économique, social et environnemental (CESE), ainsi que par des instituts de recherche de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA). Pourquoi créer ce nouvel organisme ? Quelle différence entre le consortium actuellement en place, l'Agreenium, et l'IAVF ? Quels problèmes se posent ? Quelles craintes devons-nous avoir ?

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