Les SAFER fonctionnent aujourd'hui avec leurs propres moyens, et non plus avec ceux de l'État, comme à leur fondation dans les années 60. Quant à l'arme du droit de préemption, elle reste, de fait, peu utilisée. D'abord, la prégnance des problèmes varie fortement selon les zones – littoral maritime, arrière-pays, secteur viticole –, l'importance de la pression foncière et agricole induisant une concurrence sur les usages. Historiquement, on a permis aux SAFER d'intervenir sur le foncier, mais également sur des parts de sociétés foncières – non par préemption, mais par aliénation volontaire. Alors que la question du détournement du droit de préemption des SAFER est devenu un sport national, il est urgent d'agir sur le démembrement de propriété : dans ma région, où intervient la SAFER Poitou-Charentes et Vendée – notamment dans le vignoble du Cognac –, deux hectares sur trois échappent à son action.
La SAFER se trouve donc à la croisée des chemins. En effet, le développement de ces pratiques va de pair avec celui du phénomène sociétaire, l'immobilier étant de moins en moins souvent détenu à titre personnel. En matière de propriété, les personnes physiques – le père ou le grand-père – sont de plus en plus remplacées par des sociétés financières qui ne s'embarrassent pas de savoir s'il faut ou non dissocier le patrimoine immobilier de la société d'exploitation, mais considèrent l'ensemble de l'opération. On avance ainsi petit à petit, au travers du phénomène sociétaire, vers une financiarisation du foncier, l'immobilier devenant un enjeu de pouvoir essentiel. Nous devons regarder la situation de façon réaliste : le démembrement de propriété, tout comme la préemption en matière de sociétés d'exploitation détenant du foncier, constituent deux outils d'action possibles.
D'autres amendements s'arrêtent sur des détails, mais n'en sont pas moins importants. Ainsi, en matière de consommation d'espace, on évoque la déprise lorsque des bâtiments situés sur des exploitations agricoles ne sont ni utilisés ni habités, se transformant en ruines. Alors qu'ils pourraient encore servir, retrouvant leur vocation agricole, la rédaction actuelle du texte interdit toute intervention ; il faut redonner aux SAFER les moyens d'agir. Ainsi, dans mon département – qui comptait beaucoup de métairies –, nombre de bâtiments ont été abandonnés, seules les terres intéressant les agriculteurs. S'attaquer à ce problème permettrait également de régler la question de l'habitat, nos communes rurales ayant besoin d'installer des habitants dans ces villages.
Tous nos amendements sont animés de cet esprit.