Intervention de Charles de Courson

Séance en hémicycle du 18 décembre 2013 à 15h00
Garantir l'avenir et la justice du système de retraites — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

Vous ne cessez d’invoquer les errements de la précédente réforme des retraites, tout en omettant de préciser que celle-ci aura réduit le déficit de tous les régimes confondus de moitié, passant de 40 milliards à 20 milliards d’euros.

Autant l’admettre, vous ne parviendrez pas à réaliser un tiers des économies que nous avons permises en 2010. Je note d’ailleurs que vous aviez promis de revenir sur les deux précédentes réformes mais que, comme d’habitude, vous n’avez pas tenu votre promesse.

Les centristes à l’époque avaient rappelé, ce qui n’avait pas fait plaisir à tout le monde, que les mesures prises allaient dans la bonne direction, mais qu’elles ne régleraient que la moitié du problème ; et hélas, nous avons eu raison !

Vous continuez dans le même temps à accélérer les inégalités intergénérationnelles, alors que nous appelons de nos voeux l’instauration d’un régime à points, dans les régimes de base aussi bien que dans les régimes complémentaires, comme l’ont fait depuis des décennies les partenaires sociaux.

Pire encore : pour financer votre réforme, vous avez fait le choix de ne pas repousser l’âge légal de départ à la retraite, tout en allongeant la durée de cotisation nécessaire pour une retraite à taux plein. Ce jeu de dupes ne doit tromper personne : les salariés, bien sûr, devront travailler plus longtemps s’ils veulent une retraite à taux plein.

Au demeurant, cette loi révèle indéniablement l’absence de courage dont vous avez fait preuve. Les députés du groupe UDI avaient pourtant proposé des mesures destinées à rétablir l’équilibre financier des retraites : parmi elles, la poursuite de la hausse de l’âge de départ à la retraite, pour aboutir à terme à 65 ans – je rappelle que c’était la règle avant 1982 – ainsi que la poursuite de l’allongement de la durée de cotisation d’ici 2020. Nous proposions donc d’utiliser les deux outils.

Vous n’avez pas souhaité saisir notre main tendue ; l’équilibre de notre système en subira les conséquences.

En second lieu, votre réforme accentue indéniablement les injustices : nous souhaitions pourtant engager un large débat sur les conditions de la création d’un régime unique à points, accompagné par une extinction progressive de l’ensemble des régimes spéciaux, qui auraient ainsi disparu en un tiers de siècle.

Non contents de ne pas résorber les déficits les plus graves du système, vous les aggravez par des dépenses nouvelles : à l’horizon 2040, 5 milliards pour le compte pénibilité, en principe entièrement financé par des cotisations payées par les entreprises, 1 milliard pour la revalorisation des petites pensions agricoles – tout le monde est pour, nous avons tous fait des efforts au cours des quinze dernières années – et presque 2 milliards pour d’autres mesures, d’ailleurs souhaitées par tout le monde, sur les carrières heurtées, celles des femmes, celles des jeunes…

Ces mesures, sur lesquelles tout le monde est d’accord dans leur principe, auraient pu trouver leur justification si notre système était financièrement équilibré ; elles grèvent plus lourdement que jamais sa viabilité à moyen terme. Vous avez persisté dans l’erreur en finançant ces mesures par de mauvaises recettes qui alourdissent le coup du travail et dégraderont l’emploi. Vous vous apprêtez donc à faire adopter une hausse de 0,3 point des cotisations pesant sur les salariés comme sur les employeurs, à décaler de six mois la date de la revalorisation des pensions sur l’inflation et à taxer les associés non exploitants agricoles des EARL.

Vous faites ainsi d’une pierre deux coups, en donnant un coup supplémentaire non seulement au pouvoir d’achat, mais également à la compétitivité des entreprises. Nous appelions pourtant à une stabilisation des cotisations sur les entreprises, déjà lourdement grevées. Quant aux salariés et aux retraités, il semblerait que vous n’ayez pas encore retenu la leçon de ce que Pierre Moscovici appelle le « ras-le-bol fiscal ».

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