Monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur Philippe Doucet, mesdames et messieurs les députés, vous êtes appelés à discuter en première lecture d’une proposition de loi importante puisqu’elle est directement issue des travaux des états généraux de la démocratie territoriale qui s’étaient déroulés au mois de septembre 2012 au Sénat et qui entendaient améliorer les conditions d’exercice des mandats locaux, manière pudique d’aborder le statut de l’élu.
Depuis sa première lecture, le 29 janvier 2013, il s’est passé presque une année pendant laquelle des textes importants ont été adoptés pour nos élus et notre vie démocratique : les modalités d’élection des conseillers des départements et des intercommunalités, la fin du cumul des mandats ou, encore, la loi pour la transparence de la vie publique.
Demain, nos élus seront plus divers, ils représenteront mieux la société et seront élus plus équitablement sur le territoire. La présente proposition de loi est l’une des conditions nécessaires de la vitalité démocratique de notre pays et du renforcement de l’engagement de ses citoyens.
Je défends ce texte au nom du Gouvernement avec le respect dû par l’État à ceux qui, chaque jour, consacrent leur énergie au service de l’intérêt général. Qu’il s’agisse des services à la personne ou d’équipements, de crèches, d’écoles, de routes, d’eau, d’énergie, de sport, de culture, du moindre feu rouge aux plus petits travaux urbains, il n’est pas une parcelle de notre territoire qui ne doive à l’action patiente et passionnée de nos élus locaux.
Cette mission exige de la proximité, à un moment où le contact et le lien social font toute la différence dans une société impersonnelle et dématérialisée, dans une société en crise où les distances entre les gens sont de plus en plus profondes.
Cette mission demande de la ténacité pour supporter les contraintes : argent public rare, normes, demande sociale croissante. Cette mission exige aussi, et même surtout, du temps et de l’énergie. Être élu, c’est consacrer une partie de son temps et de sa volonté au service des autres. C’est un engagement total, parfois dévorant, une responsabilité lourde et que l’on paie souvent au prix fort, à la fois dans sa vie professionnelle mais aussi personnelle, familiale et affective.
Enfin, être élu exige des qualités précieuses de patience et de courage comme des talents d’écoute.
Ce choix de représenter les autres et de mettre en oeuvre des politiques pour eux, beaucoup de citoyens le font en conscience, par devoir mais aussi parfois par défi. Cependant, en la matière, nous savons qu’il n’est pas aussi facile pour tout le monde de concourir dans la bataille démocratique.
Pour des raisons financières d’abord. Les élus sont majoritairement fonctionnaires, retraités ou bien ils exercent une profession libérale qui leur permet de conserver une activité à côté de leur mandat. Dans nombre de petites communes, ils sont bénévoles, au service des habitants jour et nuit, quels que soient les aléas de la vie de la collectivité. Je rappelle, et c’est important, que 72 % des élus municipaux ne perçoivent aujourd’hui aucune indemnité.
Les difficultés sont toutefois loin d’être uniquement financières. Elles tiennent aussi au climat actuel, qui verse trop souvent dans la critique de l’action publique. Directement en contact avec nos concitoyens, les élus, parce qu’ils incarnent l’autorité publique, sont aussi les premières cibles de leur défiance. C’est la raison pour laquelle le Président de la République a fait le choix clair de la refondation profonde de notre vie publique.
Parité, limitation du cumul des mandats, modernisation de l’action publique territoriale, statut de l’élu : ces réformes visent à faire en sorte que le fait d’être élu ne soit plus ni un sacerdoce, ni un métier et que cette mission soit plus facile d’accès pour les jeunes et les salariés ou, encore, pour les femmes.
Nous devons aux Français l’exemplarité, nous devons aux Français de défendre ici, dans cet hémicycle, l’engagement de ces élus dont les vies sont parfois difficiles, comme je l’ai dit tout à l’heure. Nous devons donc la leur faciliter pour qu’ils soient « bien dans leur mandat ».
C’est le sens du message que le Premier ministre a adressé lors du Congrès des maires. Permettez-moi de le citer : « Partout où l’échelon communal retrouve les moyens d’agir, c’est la République qui progresse. Et peu importe la taille de la commune ! La proximité, ce n’est pas une formule en l’air, ça existe ! C’est le contact personnel. Et cela doit continuer à exister ».
J’ajouterai que cela s’applique à tous les niveaux : aux élus intercommunaux, dont les responsabilités ne cessent de grandir et qui mènent souvent les projets structurants sur les territoires, aux élus départementaux, qui sont un véritable rempart face à la crise, et aux élus régionaux, qui sont responsables de l’anticipation.
Le texte que nous examinons aujourd’hui est le fruit d’un travail intense de la mission d’information sur le statut de l’élu présidée par Philippe Doucet, dont je tiens à saluer la qualité – je salue également la ténacité du rapporteur. Ces travaux s’inscrivent clairement dans la feuille de route proposée par le Président de la République et confortent le constat établi depuis plusieurs années par de nombreux rapports parlementaires. Dans celui qu’ils ont fait paraître il y a tout juste deux ans, Jean-Claude Peyronnet et Philippe Dallier, en dignes héritiers de Marcel Debarge, jetaient les bases de ce travail collectif.