Intervention de Cécile Duflot

Réunion du 17 décembre 2013 à 21h30
Commission des affaires économiques

Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement :

L'amendement CE624, qui propose une nouvelle rédaction de l'article 8, est le fruit d'un processus original de co-construction avec les parlementaires, enrichi par de nombreux échanges avec l'ensemble des parties prenantes.

L'article 8, tel qu'il a été discuté en commission et en séance, posait les principes de la garantie universelle des loyers (GUL). Le dispositif poursuit trois objectifs : sécuriser les bailleurs en les indemnisant en cas d'impayé, prévenir les expulsions et les situations sociales dramatiques en identifiant très tôt ces impayés, faciliter l'accès au logement, notamment pour les jeunes. Son fonctionnement est simple, puisqu'il s'agit d'une caution apportée par l'État.

La GUL marquera donc la réconciliation des locataires et des propriétaires, la fin d'une société de défiance où l'on demande de plus en plus de garanties et où seuls les plus aisés trouvent leur place. Les propriétaires renoncent à exiger une caution, c'est-à-dire à discriminer les locataires en fonction de la richesse de leur famille. Nous connaissons tous des exemples de personnes de quarante ans contraintes de chercher la caution de leurs parents, voire de leurs grands-parents, pour pouvoir se loger !

En cas d'impayé, l'indemnisation du propriétaire s'effectue en même temps qu'un accompagnement du locataire.

La GUL incitera les bailleurs à être solidaires, puisqu'elle couvrira intégralement ceux qui pratiquent des loyers raisonnables. Le remboursement ne sera octroyé qu'à concurrence du loyer médian. Toutefois, les logements loués aux publics les plus précaires, notamment aux jeunes, bénéficieront d'un loyer médian majoré et la franchise ne leur sera pas appliquée.

C'est le Trésor public qui sera chargé de recouvrer les impayés des locataires de mauvaise foi. Nous évitons ainsi le risque de déresponsabilisation évoqué par certains.

Enfin, le propriétaire pourra s'assurer que le candidat à la location n'a pas laissé une dette à l'Agence de la garantie universelle des loyers sans raison et sans effort pour la rembourser. Pour avoir été traitée alternativement de bolchevique et de chasseur de pauvres, je tiens à préciser que le dispositif est très équilibré ! Pour éviter une « prime à la fraude », nous refusons la protection de la GUL aux locataires de mauvaise foi qui auraient décidé de ne pas rembourser les sommes déjà dépensées par l'Agence. Les locataires ayant signé un plan d'apurement de cette dette ne sont évidemment pas concernés. J'y insiste, il s'agit uniquement d'identifier les personnes ayant refusé toute procédure d'apurement ou toute prise en charge par le fonds de solidarité pour le logement (FSL) ou par un autre dispositif.

Nous ne serons pas moins fermes avec les propriétaires. Ceux qui louent des logements indécents ne pourront pas bénéficier des subsides de l'État, non plus que ceux qui ne signalent pas rapidement les impayés, rendant ainsi impossible tout effort pour régler la situation.

D'aucuns craignent que le partage des risques entre la puissance publique et le secteur privé ne soit inadapté. Comme je le répète depuis le début des débats, le dispositif est mixte. L'État assure la garantie socle et la mutualisation du risque entre tous les locataires. Le dispositif est ensuite distribué, au choix du propriétaire, par différents intervenants agréés et conventionnés, selon un cahier des charges strict. Ces intervenants auront néanmoins la possibilité de proposer des prestations en sus de la garantie socle : assurance contre la vacance, assurance couvrant la différence entre le loyer médian et le loyer majoré, etc. L'État ne conservera qu'une petite structure régalienne de pilotage et de contrôle des organismes agissant pour la puissance publique.

Le coût de la garantie socle dépend de plusieurs paramètres : la franchise, le délai de carence et la durée d'indemnisation. Afin qu'ils puissent évoluer dans le temps, il est prévu dans l'amendement que tous trois seront fixés par décret. Nous avons fondé nos études sur des hypothèses très hautes : une garantie pour une durée maximale de dix-huit mois alors que la durée moyenne des impayés est de huit mois, une franchise de un mois et un taux d'impayés de 3 %, très supérieur au taux constaté aujourd'hui.

Après une lente montée en charge – en effet, il ne s'appliquera qu'au moment de la signature des nouveaux baux –, le dispositif devrait ainsi atteindre un coût de 400 millions d'euros en 2019. Ce montant sera récupéré sur les 40 milliards d'euros injectés par l'État dans l'économie du logement, notamment grâce à la réduction du poids des dépenses fiscales en faveur de l'investissement locatif via, par exemple, les anciens dispositifs « Robien » et « Scellier ». Le financement se fera aussi par le transfert à la GUL de la contribution d'Action logement à la GRL (garantie des risques locatifs). Il est d'ailleurs prévu que les représentants des salariés et des employeurs siègent au conseil d'administration de l'Agence.

Je crois pouvoir affirmer que nous avons élaboré ensemble un dispositif solide, équilibré et qui répond aux problèmes posés.

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