Intervention de Marie-Christine Saragosse

Réunion du 3 décembre 2013 à 17h30
Commission des affaires étrangères

Marie-Christine Saragosse, présidente de France Médias Monde :

Mme Elisabeth Guigou et M. Jacques Myard m'ont interrogée sur les relations entre France Medias Monde et TV5 Monde. Nous faisons des études d'audience et des émissions en commun, ainsi que des interviews conjointes – ainsi, à chaque fois que le Président de la République a accordé des entretiens, nous avons associé TV5 Monde –, et nous avons aussi des accords d'assistance technique, comme il y en a eu lors du sommet de la francophonie à Kinshasa en 2012. Nos relations sont donc très bonnes. Nous menons une réflexion sur la distribution, qui est selon moi l'enjeu le plus important. Il faut parvenir à une sorte de code de bonne conduite. Si, en un lieu, toute notre action ne servait qu'à remplacer TV5 Monde par France 24, nous aurions tout raté, car cela signifierait que la France aurait financé deux médias pour qu'ils se concurrencent entre eux. Le principe est que France 24 vient renforcer le dispositif et non se substituer à TV5 Monde. C'est d'autant plus nécessaire que France 24 est une chaîne d'information continue, aucunement une chaîne généraliste comme l'est TV5 Monde. Pourquoi les Français seraient-ils les seuls à n'avoir droit qu'à une seule chaîne dans leur langue dans un hôtel à l'étranger ou sur un réseau câblé ? Notre objectif est de renforcer l'offre française, qu'elle s'exprime en français, en anglais ou en arabe, avec une complémentarité linguistique éventuelle en certains lieux. Nous souhaitons aussi privilégier les promotions croisées. Plusieurs des langues de sous-titrage de TV5 sont aussi les langues des rédactions de RFI ; les deux chaînes pourraient s'unir en Amérique du Sud ou ailleurs, comme elles l'ont fait en Roumanie.

France 24 est diffusée dans 250 millions de foyers, et nous en sommes à 71 millions de reprises partielles. Les zones de présence de France 24 et TV5 sont assez complémentaires : TV5, qui fêtera ses trente ans dans quelques jours, est plus présente en Amérique latine, aux États-Unis, en Asie, en somme dans les zones de conquête de France 24.

Lorsqu'on sous-titre, comme le fait TV5 Monde en treize langues, le bas de l'écran est utilisé par le sous-titrage. Comment superposer un bandeau déroulant reprenant les informations de RFI ? L'idée peut être creusée mais, étant donné ses difficultés d'application prévisibles, il faudrait à tout le moins que les téléspectateurs puissent choisir cette option, non qu'elle leur soit imposée.

Si TV5 Monde sous-titre, madame Guittet, c'est que cette chaîne diffuse des films, des fictions et des documentaires. Le sous-titrage en direct coûte une fortune, car l'exercice est si difficile que nul sous-titreur ne peut tenir plus de 2 minutes 30 d'affilée. Autant dire que pour sous-titrer tous les programmes de France 24 diffusés en direct, il faudrait une armée d'intervenants, et un budget inconcevable. On pourrait imaginer un bandeau déroulant en français pendant que sont diffusées des informations en anglais, mais cela n'a rien d'évident.

RFI jongle avec les langues sur un même signal, monsieur Amirshahi, mais à supposer que nous procédions de la même manière en télévision, nous serions les premiers, sans que je puisse déterminer si ce serait une bonne ou une mauvaise chose. Une expérimentation – quelques décrochages en arabe par exemple – pourrait avoir lieu sur la TNT en Île-de-France, mais je crains que les risques d'éviction ne soient plus forts que les bénéfices éventuels. France 24 émet en trois langues, et ceux qui la regardent ne les comprennent pas obligatoirement toutes. Faut-il mêler les langues ? Je n'en suis pas certaine et en général les téléspectateurs peuvent choisir leur version.

Nous ne sommes pas diffusés en Chine, mais TV5 Monde l'est : ce fut la contrepartie imposée par le CSA, à une époque où France 24 n'existait pas encore, à l'autorisation donnée à CCTV-4 de diffuser en France. En Chine, TV5 Monde figure sur la plateforme étrangère, dont l'accès est limité aux hôtels 4 et 5 étoiles et aux résidences étrangères, soit l'équivalent d'un million de foyers officiellement. RFI a du mal à pénétrer en Chine, tant sur les ondes courtes que sur l'Internet.

Vous avez exprimé l'idée, monsieur Myard, que parler une autre langue serait s'abstraire de la République. Mais nous ne pouvons nier que la France soit un pays où l'on parle l'arabe – et l'agrégation d'arabe n'y a-t-elle pas été créée il y a plus de cent ans ? Le français et l'arabe sont souvent parlés ensemble ; à Marseille, la fréquence Monte Carlo Doualiya, RFI est mixte – on y parle les deux langues, comme le font couramment les populations françaises d'origine arabophone. Je constate que des chaînes arabophones venues d'ailleurs sont diffusées sur tout le territoire, et que Monte Carlo Doualiya a une audience cumulée d'un peu moins de 8 millions d'auditeurs par semaine. Pourquoi empêcher cette chaîne de service public, adorée par les auditeurs qui la reçoivent grâce aux 27 émetteurs qui la diffusent dans 16 pays, d'être captée en France.

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