Intervention de Marie-Suzanne le Quéau

Réunion du 9 juillet 2013 à 17h15
Commission d'enquête relative aux éventuels dysfonctionnements dans l'action du gouvernement et des services de l'État, entre le 4 décembre 2012 et le 2 avril 2013, dans la gestion d'une affaire qui a conduit à la démission d'un membre du gouvernement

Marie-Suzanne le Quéau, directrice des affaires criminelles et des grâces :

Le 6 décembre 2012, le directeur de cabinet en fonction à l'époque a transmis à ma direction la plainte déposée par M. Cahuzac sur le fondement que vous indiquez. Nous nous sommes rendu compte, à sa lecture, qu'elle était rédigée en termes confus. En effet, dès lors que M. Cahuzac et ses avocats déposaient plainte du chef de diffamation publique envers un particulier, l'article 32 de la loi du 29 juillet 1881 leur permettait de s'adresser au procureur de la République territorialement compétent. Mais ils ont eu recours à une autre règle procédurale, celle de l'article 48 1o bis de cette même loi, laquelle prévoit, pour les faits d'injure et de diffamation envers un membre du Gouvernement, que la plainte est adressée par le biais du ministre de la justice.

L'absence de clarté de la plainte nous a conduits à effectuer des recherches au sein de la Direction. Or, nous n'avons pas trouvé de jurisprudence excluant formellement le recours à l'article 48 en matière de diffamation publique commise envers un membre du Gouvernement pour des faits ne relevant pas de ses fonctions ministérielles.

Par ailleurs, si un ministre n'a pas de compétence liée en la matière, l'expérience montre que depuis plusieurs années, tous les ministres ont transmis au procureur général, pour le procureur de la République territorialement compétent, les plaintes qu'ils ont reçues sur le fondement du 1o bis de l'article 48. En effet, sans une transmission de la plainte, le ministre lui-même ne peut pas mettre en mouvement l'action publique, car il ne peut pas se constituer partie civile ni agir par voie de citation directe.

De surcroît, dans la mesure où la garde des sceaux a indiqué qu'elle n'interviendrait plus dans les affaires individuelles – et c'est le cas dans lequel nous nous trouvions –, la transmission s'imposait.

Cela étant, le procureur de la République, qui prend en charge l'action publique, n'a pas de compétence liée en la matière. Il peut choisir de classer le dossier comme d'ouvrir une enquête. En l'espèce, c'est ce dernier choix qui a été effectué, mais le procureur de Paris a requalifié les faits en diffamation publique envers un particulier et saisi la BRDP, sur la base d'un soit transmis détaillé, pour mener les investigations. D'ailleurs, lorsque les journalistes de Mediapart ont été entendus par les services enquêteurs, ils ne l'ont pas été sur le fondement de l'article 31, mais sur celui de l'article 32, c'est-à-dire sur le chef de diffamation publique envers un particulier.

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