Intervention de Jean-Marc Pastor

Réunion du 18 décembre 2013 à 16h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Jean-Marc Pastor, sénateur, rapporteur :

Même si elle figure actuellement en troisième partie du rapport, la question de la place de la filière hydrogène dans la transition énergétique est bien au coeur de notre sujet. Cependant, nous pouvons tout à fait modifier la présentation pour mieux souligner l'importance de cet aspect et également faire en sorte que nos recommandations soient plus aisées à identifier.

Il est vrai que l'Allemagne possède une culture de la responsabilité locale que nous n'avons pas complètement. Mais, depuis cinq ou six ans, que voit-on en France ? Onze régions se sont organisées pour développer la filière, en particulier au travers de pactes. Nous étions, la semaine dernière, en Lorraine et nous avons vu comment de nombreux partenaires – collectivités territoriales, industriels ou acteurs issus du monde de la recherche et de l'enseignement supérieur – travaillent ensemble.

Depuis un an, nous avons pris l'initiative d'une rencontre annuelle de deux jours des acteurs des différentes régions, ce qui leur permet de partager leurs expériences et de s'encourager mutuellement. Cette démarche n'en est qu'à ses débuts mais elle est bel et bien engagée.

N'oublions pas, non plus, que, sans être comparables à nos grandes entreprises exportatrices, nombre de nos PME sont déjà très performantes et présentes sur les marchés étrangers. C'est sur elles que les régions s'appuient pour élaborer des schémas pertinents de développement de cette énergie.

À ce titre, je vous invite à participer, le 20 janvier 2014, à l'inauguration, par le ministre du Redressement productif, d'une filière hydrogène locale en Midi-Pyrénées basée sur la méthanisation de déchets ménagers et agricoles. Au départ, il y a deux ans, c'est un carrossier d'autobus qui a décidé que, désormais, il motoriserait lui-même ses véhicules. Dans un premier temps, il a envisagé un moteur électrique, mais il s'est heurté aux difficultés de rechargement des batteries. À force de recherches et d'innovation, il a mis au point un système – désormais breveté – de récupération de l'énergie issue de la pression hydraulique des tracteurs, fluidifiée par de l'azote. À chaque freinage ou à chaque redémarrage, ce dispositif produit de l'énergie, qui permet de recharger les batteries mais il manquait, toutefois, 30 % d'énergie pour donner à ces autobus une autonomie permanente. Or, elle a pu être obtenue grâce à une pile à combustible associée à une réserve d'hydrogène produit à partir d'une filière locale de méthanisation des déchets. Air Liquide n'est intervenu que pour les bornes de livraison et le stockage de l'hydrogène ; tout le reste de la technologie est entièrement local. Ces autobus ont été exposés, il y a un mois, au Salon de l'innovation, Porte de Versailles.

Cinq ou six régions sont actuellement porteuses de projets innovants dans cette filière. Il faut les encourager mais nous savons aussi que ce ne sont pas les déchets du Tarn ou de Midi-Pyrénées qui régleront la question de l'énergie en France, nous avons aussi besoin de grands opérateurs de dimension nationale. Le soutien aux initiatives locales s'impose en parallèle car il est le gage d'une véritable acceptation de la filière. Et si le Gouvernement n'en prend pas l'initiative, les territoires assumeront cette responsabilité.

Dans tous les cas, il importe cependant de réduire les obstacles et barrières administratives qui entravent l'innovation. Prenons l'exemple de Michelin : l'entreprise a développé, à Clermont-Ferrand, un moteur placé dans chacune des roues de l'automobile et destiné à assurer une meilleure adhérence à la route. Il s'agit d'un moteur électrique alimenté par une pile à combustible et une réserve d'hydrogène. Au bout de cinq années de démarches vaines auprès de l'administration française pour développer ce procédé, Michelin a délocalisé son équipe à Fribourg où toutes les autorisations ont été obtenues en trois mois. Désormais, les brevets sont suisses ainsi que les plaques d'immatriculation des véhicules équipés de cette innovation. L'un d'entre eux sera présenté le 20 janvier 2014. Au moment où l'on parle de relancer l'économie et en particulier l'économie verte, il faut que le ministre le voie ! Quant à nous, parlementaires, lorsque la réglementation bride l'innovation et pénalise les entreprises, il nous revient de le crier haut et fort. À ce sujet, je rappelle qu'en Allemagne la réglementation sur l'hydrogène est la même que pour les autres gaz énergétiques.

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