Il s'agit donc de « l'acte II » de la proposition de loi du groupe écologiste relative à l'exposition aux ondes électromagnétiques.
Après qu'une première proposition de loi eut été adoptée par la commission des affaires économiques – en ayant bénéficié d'un avis favorable de la commission du développement durable –, elle avait été renvoyée en commission lors de son examen en séance publique, le 31 janvier 2013. L'assurance avait cependant été donnée qu'un rapport serait commandé sur le principe de sobriété et qu'un nouveau texte serait examiné ultérieurement.
Ce rapport, rédigé par MM. Girard, Tourtelier et Le Bouler, a été remis au Premier ministre en décembre dernier. Nous pouvons donc examiner maintenant la nouvelle proposition de loi, inscrite à l'ordre du jour de la séance plénière dans le cadre de la « niche » écologiste du 23 janvier prochain. Cela étant, notre groupe ne disposant que d'une niche par an, s'il lui faut inscrire à l'ordre du jour des textes renvoyés en commission, cela risque d'être une source de complications…
Le travail réalisé au cours de l'année écoulée fut cependant fructueux. La nouvelle proposition de loi reprend les dispositions du texte précédent, tout en tenant compte des remarques faites l'an dernier, des rapports remis durant l'année écoulée et du travail important réalisé par le « groupe de contact parlementaire » mis en place par le président Brottes.
Nous nous appuyons sur les mêmes considérants que l'an dernier : à savoir que les risques pour la santé liés aux ondes électromagnétiques sont suffisamment sérieux pour que le législateur agisse – le rapport sur le principe de sobriété arrive d'ailleurs à la même conclusion.
Rappelons que, en 2011, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a classé les ondes radiofréquences comme potentiellement cancérigènes et que l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) recommande, dans son rapport d'octobre dernier – mais elle l'avait déjà fait dans celui de 2009 –, de limiter les expositions, notamment chez les personnes les plus fragiles et les enfants : si elle estime que les risques ne sont pas « avérés », cela ne signifie aucunement qu'il ne peut pas y en avoir.
Rappelons également que, au début de 2013, l'Agence européenne de l'environnement a identifié quatre risques pour lesquels le principe de précaution devrait s'appliquer rapidement et avec force ; l'exposition aux ondes électromagnétiques du téléphone portable en fait partie.
Une action du législateur est donc nécessaire. Il s'agit non pas de freiner l'essor des activités de communication, mais de les réguler et d'éviter une potentielle catastrophe sanitaire dans les années à venir. Ne rien faire serait irresponsable.
La nouvelle version de la proposition de loi s'appuie sur les travaux du comité de pilotage issu du comité opérationnel issu du Grenelle des ondes (COPIC), dont le rapport de synthèse a été publié l'été dernier – on y insiste notamment sur la nécessité de mieux réguler l'implantation des antennes relais de téléphonie mobile – et sur celui, déjà cité, relatif au développement des usages mobiles et au principe de sobriété.
J'ai en outre conduit de nombreuses auditions, conjointement avec la rapporteure pour avis de la commission du développement durable, Mme Suzanne Tallard – que je remercie pour le travail fructueux que nous avons effectué ensemble. Cela nous permettra d'enrichir le texte, en commission puis en séance publique.
J'en viens maintenant aux principales dispositions de la proposition de loi.
L'article 1er, coeur du texte, confie à l'Agence nationale des fréquences (ANFR) une mission de modération de l'exposition de la population aux champs électromagnétiques, instaure une procédure de concertation et d'information lors de l'installation des antennes relais de téléphonie mobile – qui renforcera le rôle du maire et garantira la transparence des implantations – et prévoit une procédure de conciliation, d'abord à l'échelon local, puis au niveau de l'ANFR, en cas de désaccord. Il impose en outre une mesure des champs électromagnétiques avant et après l'installation et prévoit une procédure contraignante pour le traitement des points atypiques.
Ces mesures étant issues des travaux du COPIC, la proposition de loi en renvoie l'application à un décret en Conseil d'État et se contente de fixer le cadre de celui-ci. Toutefois, la rapporteure pour avis de la commission du développement durable a fait adopter hier soir un amendement qui, sans rien changer au fond, vise à faire rentrer l'ensemble des dispositions dans le domaine de la loi. Je suis d'accord avec cette modification, que Suzanne Tallard vous présentera en détail.
L'article 2 prévoit la confection d'un cadastre électromagnétique, avec le soutien de l'ANFR. Le site cartoradio.fr de l'ANFR est en effet un outil très intéressant qu'il convient de compléter et d'enrichir, afin d'améliorer l'information sur l'implantation des antennes de téléphonie mobile.
L'article 4 vise à améliorer l'indication du débit d'absorption spécifique (DAS), à mentionner les précautions d'usage du téléphone portable – les risques pour la santé de son usage à l'oreille n'étant plus niés –, et à étendre la possibilité d'activer et de désactiver simplement la fonction wifi sur les appareils radioélectriques et les boîtiers multiservices, ainsi que les femtocell. En outre, il importe de faire clairement état des éventuelles émissions d'ondes : si les téléphones portables et les antennes relais focalisent l'attention de nos concitoyens, d'autres équipements en émettent sans que cela soit clairement signalé – je pense notamment aux ampoules à basse consommation, aux plaques à induction, aux fours à micro-ondes et aux téléphones sans fil DECT.
L'article 5 renforce, dans la continuité de la loi « Grenelle 2 », les règles relatives à la publicité, notamment en direction des plus jeunes. Il interdit en particulier toute publicité montrant un téléphone portable collé à l'oreille, afin d'inciter nos concitoyens à utiliser les kits « mains libres ».
L'article 6 demande au Gouvernement de lancer une campagne d'information et de sensibilisation sur l'utilisation des technologies sans fil, en particulier du téléphone portable. Beaucoup de nos concitoyens ignorent encore les risques que certains comportements font peser sur la santé – notamment le fait de dormir avec le téléphone allumé sous l'oreiller ou d'utiliser le téléphone dans un train ou une voiture.
L'article 7 traite spécifiquement des lieux d'accueil des enfants – l'ANSES ayant souligné la nécessité de protéger les enfants des risques liés aux ondes. Nous proposons d'interdire l'utilisation du wifi dans les crèches et les écoles maternelles. Certains objecteront que le wifi traverse les murs et que les enfants resteront exposés aux ondes provenant du bureau du directeur ; toutefois, notre objectif étant la modération et la limitation des expositions, il nous paraît inutile de multiplier les sources d'émissions.
L'article 8 traite de l'électro-hypersensibilité. Il demande au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement afin de trouver des solutions opérationnelles pour les personnes qui en souffrent. La création de zones à rayonnements électromagnétiques limités – dites « zones blanches » –, si elle ne pose pas de problème particulier, suppose en effet une volonté politique. D'autre part, les personnes qui veulent limiter au maximum leur exposition aux ondes doivent pouvoir le faire.
En conclusion, je vous propose d'adopter la présente proposition de loi. Je remercie toutes les personnes qui ont travaillé avec moi pour vous présenter ce texte ambitieux, qui vise à imposer la sobriété en matière d'exposition aux ondes, tout en limitant les contraintes qu'un tel objectif pourrait faire peser sur les acteurs économiques. Il s'agit non pas d'entraver l'innovation technologique, si importante pour le développement économique de notre pays, mais de faire rimer technologie de pointe avec modération et protection.