Intervention de André Chassaigne

Séance en hémicycle du 14 janvier 2014 à 15h00
Agriculture alimentation et forêt — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, avant d’exposer les motifs du vote des députés du Front de gauche sur le contenu même de ce projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, je souhaite d’abord lancer ici un appel à la représentation nationale.

À chaque réforme de la politique agricole commune correspond un changement de la législation agricole de notre pays. Il en est de même cette fois. On ne peut donc adopter ce nouveau texte sans revenir sur le contexte européen dans lequel il s’inscrit.

Comme je l’ai déjà dit la semaine dernière, l’Europe, comme la France, a perdu 25 % de ses exploitations et de ses actifs agricoles en seulement dix ans. Dans le même temps, pour les 500 millions d’Européens, la question alimentaire est redevenue une préoccupation centrale, en lien direct avec les conséquences de la crise financière, la perte d’emplois et de revenus, et l’explosion de la précarité.

Si nous partageons ce constat sur beaucoup de ces bancs, c’est bien parce que la France a toujours défendu la noble idée d’une politique agricole et alimentaire européenne forte, dotée d’un budget conforme à son ambition, qui est de répondre aux besoins essentiels de nos peuples. Mais, depuis trop longtemps, le dogmatisme de la Commission européenne et des chefs d’État et de gouvernement les plus libéraux contribue à affaiblir cette politique essentielle. Je l’ai dit aussi : nous ne pouvons plus renouveler la PAC en 2014 avec les mêmes réflexes libéraux qu’en 1992. Il en va de la sécurité alimentaire des Européens. Je pense notamment à des pays comme la Grèce, qui sont déjà les victimes expiatoires d’une austérité aussi néfaste qu’inutile au développement économique et à la vie quotidienne de millions de familles.

Pour les députés du Front de gauche, les arbitrages rendus au niveau européen pour la période 2014-2020 ne sont pas à la hauteur des enjeux d’avenir. Poursuivre sur la voie de l’ouverture des marchés et de l’abandon des outils de régulation tourne le dos aux principes fondamentaux de la PAC : il s’agit d’une politique rétrograde, qui ne tient plus compte de la réalité économique et sociale de l’agriculture européenne.

Aussi le projet de loi que nous allons adopter ne doit-il en aucun cas servir de fin de cycle dans notre engagement en faveur d’une réorientation profonde de la politique alimentaire européenne. Au contraire, il faut continuer, dans les mois et les années à venir, à démontrer toute l’importance d’une politique agricole et alimentaire commune, en phase avec les besoins de notre temps.

Oui, nous avons besoin d’un nouveau modèle agricole, plus durable, qui permette de fournir l’essentiel des besoins alimentaires des Européens, en quantité et en qualité, et qui garantisse un juste partage de la valeur ajoutée au service du maintien et du renouvellement des générations d’actifs agricoles, au service des revenus des travailleurs de la terre, du développement rural, du respect de l’environnement et de la pérennité des écosystèmes.

Ce projet de loi aurait sans doute pu, dans ses principes généraux, revenir sur ce constat pour encourager un véritable changement de cap au niveau européen. Mais, si l’on peut regretter également que ce texte omette d’aborder certaines problématiques centrales, comme celles des prix et des revenus agricoles, son contenu présente néanmoins des avancées attendues depuis très longtemps. Indéniablement, la semaine passée à débattre sur son contenu aura marqué un profond changement de vision de l’orientation agricole de notre pays. Après dix années où la droite au pouvoir n’a fait qu’accompagner la course à la concentration et à la spécialisation,…

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