Intervention de Pierre Lellouche

Réunion du 16 janvier 2014 à 10h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Lellouche :

Monsieur le ministre, vous avez manifestement déployé des efforts considérables pour que vos calculs tombent juste ! Vous avez voulu tout faire passer par le goulot de la bouteille afin de parvenir aux 450 millions prévus à l'article 4 de la loi de programmation, au risque de minorer des coûts qui ne devraient pas l'être.

Pour justifier votre calcul, vous tablez sur le retrait progressif des troupes en Afghanistan, sur la réduction des effectifs au Mali – qui me semble d'ailleurs un peu rapide –, et sur l'allégement du dispositif Atalante. À ce dernier propos, même si cela vous permet d'économiser une dizaine de millions, il me paraît regrettable que la France, seule à porter véritablement le projet d'une défense européenne, se désengage en partie de l'unique opération efficace mise en oeuvre par l'Union. Quoi qu'il en soit, tout cela risque fort de se révéler insuffisant.

Et s'il est plutôt sage, sur le fond, de définir le Golfe arabo-persique et la bande saharo-sahélienne comme deux zones d'intérêt prioritaire et d'ouvrir des antennes à Faya-Largeau, à Tessalit et ailleurs, vous ne pouvez pas considérer que ce redéploiement sera source d'économies. Vous prendrez rapidement conscience sur le terrain qu'il s'agit d'options coûteuses qui usent les matériels, notre présence là risquant fort d'être mise à contribution.

Les 450 millions d'euros prévus ne pourraient suffire que dans un monde stable. Or, si, comme l'a constaté le président de la Commission, le coût des OPEX a été multiplié par douze entre 2005 et aujourd'hui, c'est précisément parce que notre monde est agité de turbulences incessantes et le socle minimal de dépenses retenu ne se justifie donc pas dans ce contexte dont rien n'indique qu'il va changer.

C'est légitimement que Jean Launay s'interroge sur le financement des OPEX au-delà du montant prévu par l'article 4 de la LPM. À mon sens, le ministère de la Défense ne doit pas être mis à contribution : cela reviendrait à couper dans les crédits consacrés à des matériels toujours plus sollicités. Le raisonnement politico-technocratique que vous nous tenez ne résiste pas à l'examen : vous devez faire face à des dépenses qui vous sont imposées et vous devez investir toujours plus alors que le socle proposé est manifestement sous-estimé et que les redéploiements annoncés se révéleront en fait coûteux, si bien qu'il en résultera gels et surgels de crédits affectant les équipements en cours. Paradoxalement, alors que jamais on n'aura fait autant appel à l'armée française, jamais elle n'aura subi de telles coupes budgétaires.

Monsieur le ministre, vous ne m'avez pas convaincu ce matin. Nous nous exposons à de très nombreux surcoûts qui poseront de sérieux problèmes à nos armées. Une ligne budgétaire plus étoffée aurait évité que des annulations de crédits ne viennent, demain, appauvrir des forces dont les moyens touchent déjà à la limite extrême. Nous soutenons bien sûr votre action, mais votre épure budgétaire n'est pas à la hauteur des ambitions que vous fixez à nos armées !

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