Une telle simulation nécessiterait de saisir la direction générale du Trésor.
Nous avons fait au cours des dernières années un certain nombre de propositions en vue de maîtriser les dépenses de la branche famille, dont certaines ont été récemment prises en compte par les pouvoirs publics à l'occasion de la rénovation de la politique familiale annoncée par le Premier ministre.
La première de ces propositions concerne les aides à la garde des enfants. La Cour, constatant que la prestation d'accueil des jeunes enfants (PAJE) reposait sur des paramètres mal calés, ce qui a produit des dérives de coût et des effets d'aubaine, a fait des observations aux pouvoirs publics. Ceux-ci les ont pris en compte en diminuant, à compter d'avril 2014, l'aide aux ménages dont les revenus sont supérieurs à un certain plafond.
Le complément de libre choix d'activité (CLCA) provoquait un effet d'aubaine pour les familles aux revenus situés dans la tranche supérieure des revenus. La Cour a donc proposé de le recentrer sur les publics les moins aisés. Le Gouvernement vient de donner suite à cette suggestion en supprimant la majoration dont bénéficiaient les ménages les plus aisés.
Enfin, la Cour s'est intéressée l'an dernier au complément de libre choix du mode de garde en vue d'en limiter les effets d'aubaine. Nous n'avons pas étudié l'opportunité de le plafonner mais avons conclu à la nécessité de le réexaminer.
La Cour s'est également intéressée à l'articulation entre les prestations en espèces et les dépenses fiscales. Elle a eu l'occasion, à différentes reprises, de démontrer que le cumul des prestations familiales et des aides fiscales revenait à accorder des aides substantielles aux ménages à revenus élevés ainsi qu'aux ménages à revenus bas, au détriment des catégories intermédiaires.
En revanche, la Cour n'a pas analysé l'articulation entre les outils fiscaux et les outils sociaux de la politique familiale. Elle s'apprête à réaliser une enquête sur ce point et a déjà commencé à travailler sur différents points.
Le premier d'entre eux est la demi-part supplémentaire pour les parents isolés. Cet avantage fiscal bénéficie essentiellement, malgré le plafonnement mis en place, à des contribuables qui disposent de revenus élevés.
Le second point qui a appelé son attention est la demi-part supplémentaire accordée aux contribuables vivant seuls et qui ont eu des enfants. Bien que cette mesure ait déjà fait l'objet de certains ajustements, une part importante de la dépense bénéficie aux contribuables les plus aisés, puisque 22 % de la dépense est versée à 10 % de contribuables dont le revenu fiscal de référence est supérieur ou égal à 53 000 euros.
La question du quotient conjugal pour les veufs ayant eu des enfants a été examinée en 2009, mais la Cour s'interroge sur le bien-fondé de cet avantage dans la mesure où il se surajoute à la demi-part accordée aux parents isolés.
La Cour des comptes s'est également interrogée sur le supplément familial versé aux fonctionnaires. Cet avantage, que l'État employeur consent aux agents publics, représente pour les trois fonctions publiques 1,3 milliard d'euros, mais les prestations croissent avec l'indice de rémunération et le plafonnement n'intervient qu'à un niveau de salaire élevé puisqu'il est fixé au niveau de l'« échelle lettre ».
La Cour a examiné à plusieurs reprises les avantages familiaux de retraite – cette question se retrouve à l'ordre du jour à la suite du rapport de Mme Yannick Moreau. Considérant que la majoration de 10 % pour les parents de trois enfants et plus augmente avec le montant des pensions et qu'au surplus cet avantage n'est pas fiscalisé, la Cour a suggéré de le fiscaliser ou de le forfaitiser.
Enfin, constatant que les crédits d'action sociale représentent une somme importante pour la branche famille, la Cour, dans un référé de mai 2013, a appelé l'attention du Gouvernement sur la manière dont sont mobilisés les 1,5 milliard d'euros annuels de crédits d'action sociale en faveur de la jeunesse. Dès 2006, la Cour avait préconisé de cibler cet effort sur les publics et les territoires les plus fragiles avant de constater, dans une enquête réalisée en 2012, que les inégalités territoriales s'étaient considérablement accrues. Les crédits affectés au département de la Lozère sont passés de 68 euros en 2006 à 79 euros en 2011, tandis que ceux affectés au département de la Haute-Garonne passaient de 352 à 496 euros. La Cour avait suggéré de redéployer ces crédits vers les populations et les territoires les plus fragiles. Il ne faut pas oublier que, dans un certain nombre de cas, la branche famille n'est qu'un financeur d'appoint et ne pèse pas en faveur d'une politique véritablement ciblée. Dans la mesure où ce n'est pour elle qu'une mission secondaire, la CNAF n'a pas le même poids vis-à-vis de ses partenaires en matière de politique en direction de la jeunesse que lorsqu'il s'agit d'améliorer les dispositifs d'aide à la garde des jeunes enfants.