Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, chers collègues, si l’examen de la proposition de loi « relative à la sobriété, à la transparence et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques » se limitait à ce seul titre, elle recueillerait ici une très belle unanimité.
Dans le cadre du débat parlementaire faisant suite à la déclaration du 5 février 2009 du Gouvernement sur l’attribution de fréquences de réseaux mobiles, j’avais incité la secrétaire d’État chargée de l’écologie à réunir un « Grenelle des antennes », pour évaluer ce risque sanitaire. Cette proposition avait été retenue par le gouvernement ; en avril 2009, Roselyne Bachelot, ministre de la santé, initiait une démarche d’étude, de concertation et de proposition, connue sous le nom médiatique de « Grenelle des ondes ». Il faut se féliciter du travail accompli par le COMOP et le COPIC, sous l’autorité notamment du président François Brottes.
Comme le rappelle le Conseil économique, social et environnemental dans son récent rapport sur le principe de précaution, « depuis son intégration dans la Constitution en 2005, le principe de précaution a fait l’objet de nombreux débats et controverses quant à son utilisation et son utilité. Un constat s’impose : le principe de précaution est souvent évoqué à tout propos et hors de propos. Sa définition limite son application aux risques incertains dans les domaines de l’environnement et par extension de la santé. Ce principe ne peut garantir le risque zéro, toute activité étant potentiellement dangereuse pour l’Homme. Il ne s’agit pas d’un principe d’abstention exigeant la preuve de l’innocuité comme préalable à toute autorisation. Il se distingue des principes de prévention et de prudence qui portent uniquement sur les risques avérés ».
Comme nous l’a rappelé ce matin Jean-Yves Le Déaut, vice-président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, « l’ensemble des rapports d’expertise collective internationaux, fondés sur des milliers d’études, conclut qu’il n’y a pas de risque avéré des radiofréquences en dessous des limites réglementaires. Le seul effet connu est l’échauffement par absorption, et des marges de sécurité très importantes sur les seuils ont été prises, ce qui nous conduit à dire qu’il n’est pas nécessaire de changer les limites réglementaires ».
Le vice-président de l’OPECST a aussi précisé que « les antennes-relais émettent des radiofréquences 10 000 à 100 000 fois moins élevées que celles engendrées par le téléphone portable lui-même pendant une conversation. Les mesures principales à prendre concernent donc les téléphones portables ».
M. Le Déaut concluait en soulignant que, même s’il eût jugé préférable l’expression « maîtrise et connaissance », l’OPECST soutenait la proposition de modération à l’exposition, à une double condition toutefois : que les amendements proposés par Mme Erhel soient retenus et que l’on définisse ce que signifie le principe de modération, pour l’heure inexistant dans notre droit. Il n’y a pas lieu d’interdire le wi-fi, dont le niveau d’émission avoisine celui du téléphone sans fil dans les habitations.
Si j’ai largement cité cette intervention, c’est que je partage totalement la position prise par l’OPECST, outil dont le Parlement – toutes tendances confondues – s’est doté afin d’évaluer les choix scientifiques et technologiques.
Je partage aussi la mise en garde du vice-président de l’Office, qui nous rappelle qu’« accréditer des risques purement hypothétiques ne peut qu’affaiblir les campagnes contre les risques avérés, discréditer la démarche scientifique, encourager la défiance, provoquer plus de confusion, de rumeurs et d’inquiétude ».
Mon inquiétude porte sur trois points.
Dans l’état actuel des connaissances scientifiques nationales et internationales, et dans les conditions actuelles de puissance d’émission, très inférieures aux normes de l’OMS, si l’on veut continuer de bien desservir la population, l’affaiblissement de la puissance d’émission ne peut être compensé que par la multiplication du nombre d’émetteurs ou par l’augmentation de la puissance de réception des terminaux de téléphonie mobile. Or c’est sur ce dernier point qu’il y a lieu d’être vigilant, comme l’a été le Parlement français en imposant depuis de nombreuses années la vente d’un « kit mains libres » avec tout terminal de téléphonie mobile.
Par ailleurs, nous avons besoin des technologies radio pour mettre en oeuvre les objectifs fixés, à juste titre, par le Gouvernement dans sa « feuille de route numérique » de février dernier. Rendre plus difficile et donc plus coûteux – sans justification sanitaire scientifiquement établie – l’accès à la 4G, au wi-fi et aux autres technologies radio pénalisera les zones les moins denses de notre territoire pour l’accès au très haut débit. Il ne faut pas alourdir encore les charges de nos entreprises, qui doivent investir pour construire la France numérique de demain malgré un contexte économique très défavorable.
Le Parlement, comme le Gouvernement, doit assurer la cohérence entre les objectifs de la « feuille de route » et les conditions de sa mise en oeuvre, puisque la situation sanitaire sur les ondes radio est clarifiée.
Attention à ne pas envoyer – c’est le cas de le dire