Intervention de Patrick Bloche

Séance en hémicycle du 23 janvier 2014 à 15h00
Exposition aux ondes électromagnétiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes amenés, en tant qu’élus, à devoir résoudre une équation complexe : permettre à nos concitoyens de bénéficier pleinement de la révolution technologique en cours, tout en assurant la sécurité sanitaire face à des risques qu’il faut prévenir. Essayer d’y répondre est, je le crois, le sens premier de cette proposition de loi, et je tiens à remercier celles et ceux qui en sont à l’initiative.

Maire du 11e arrondissement de Paris, le plus dense de la capitale, je suis régulièrement amené à organiser des réunions de concertation avec des habitants inquiets de l’impact éventuel des ondes émanant d’antennes relais. Ainsi, la localisation possible d’une nouvelle antenne relais à proximité d’une école ou d’une crèche – mais pas seulement – mobilise aussitôt nombre de parents et de riverains, au nom de la prévention des risques.

J’ai été amené en cinq ans – bientôt six – à donner à ce titre, je l’avoue, des avis bien plus souvent défavorables que favorables à des demandes d’implantation d’antennes, conduisant de fait l’opérateur concerné à s’engager – c’est tout l’intérêt de mes avis défavorables – dans une procédure de concertation et même à rechercher d’autres sites d’implantation. Il s’établit ainsi un dialogue vertueux, tripartite et constructif entre élus, riverains et opérateurs.

La téléphonie mobile et, désormais, l’internet mobile permettent l’accès de nos concitoyens à nombre de services devenus indispensables. Nous considérons avec raison comme prioritaire l’accès de tous au réseau, que ce soit via les nouvelles générations de téléphones ou les box internet.

Dans d’autres débats, nous avons su montrer combien l’accès à internet, et en particulier au très haut débit, était devenu central, et nous avons affirmé, notamment lors du débat sur les lois HADOPI, notre attachement à ce qu’il ne puisse être entravé, car l’enjeu de son développement est économique autant que sociétal.

Dès lors, il ne s’agit pas ici de bouleverser l’économie d’un système dont nous connaissons toutes les incidences. Mais nous devons montrer comment il est possible de concilier qualité de service et seuil maximal d’exposition le plus bas possible, de faire de la modération en matière d’exposition du public aux ondes l’un des objectifs de la politique des télécommunications.

Face à cette demande d’information, de concertation et, surtout, de transparence exprimée par nos concitoyens, la démarche entreprise par la Ville de Paris il y a dix ans déjà, via la signature d’une première charte avec les opérateurs, me semble être une bonne illustration pour éclairer le débat qui nous occupe aujourd’hui.

Après deux ans de négociations avec les opérateurs de téléphonie mobile, une nouvelle charte a été signée il y a un an. Ce document, plus exigeant encore que le précédent et que la réglementation nationale, redéfinit les seuils d’exposition aux ondes électromagnétiques pour la 2G comme pour la 3G, tout en permettant le déploiement de la téléphonie mobile de quatrième génération et son très haut débit, grâce à la fixation à titre provisoire d’un deuxième seuil maximal.

Au-delà – et c’est surtout sur ce point que je souhaite insister –, la charte renforce l’information délivrée aux Parisiens, notamment par la mise en ligne systématique, le plus en amont possible, des dossiers déposés par les opérateurs, mais aussi par la réalisation de centaines de mesures annuelles, en particulier dans les équipements les plus sensibles comme les crèches ou les écoles, ou simplement à la demande de toute personne directement concernée par un projet d’implantation, et tout cela avant que ne soit déposée la demande d’autorisation d’urbanisme pour l’implantation d’une future antenne.

L’information doit être en effet au coeur du dispositif – c’est essentiel. En donnant au maire la possibilité d’obtenir les informations qu’il juge opportunes, en permettant la saisine d’une instance de concertation départementale pour assurer, en cas de blocage de la procédure de concertation, une mission de médiation, la proposition de loi répond – et je m’en réjouis – à cette préoccupation majeure.

En matière de prévention, je n’oublie naturellement pas l’importance des campagnes pour la bonne utilisation des téléphones portables, notamment par les jeunes enfants et les adolescents, mais aussi sur les dispositifs d’information du consommateur, concernant les appareils eux-mêmes.

De la même manière, soulignons l’importance de la mise en place du comité national de dialogue relatif au niveau d’exposition du public aux champs électromagnétiques au sein de l’agence nationale des fréquences. Car informer, c’est aussi permettre à chacun d’adapter ses comportements individuels. De fait, il devient nécessaire de bénéficier désormais d’un nouveau cadre législatif et réglementaire national en matière de prévention des risques et nous sommes de plus en plus sollicités pour le mettre en place sans tarder.

En la matière, les évolutions technologiques sont si rapides qu’elles nous amènent à ne pas pouvoir être immobiles. Le débat doit être permanent. Un premier acte volontaire est posé aujourd’hui par l’organisation d’un débat national. C’est à ce niveau que nous devons désormais réfléchir, comme beaucoup nous y appellent, à l’importance stratégique des réseaux de téléphonie mobile et à la responsabilité de leur gestion, ainsi que, si possible – soyons ambitieux ! –, à l’avenir de leur mutualisation.

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