Intervention de Jacques Krabal

Séance en hémicycle du 23 janvier 2014 à 9h30
Encadrement de l'utilisation des produits phytosanitaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Krabal :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure, monsieur le président de la commission du développement durable, monsieur le vice-président de l’OPECST, mes chers collègues, dans le prolongement de nos débats sur la loi d’avenir de l’agriculture, nous allons examiner ce matin une proposition de loi qui nous vient du Sénat à l’initiative de nos collègues écologistes visant à interdire l’usage de produits phytosanitaires pour les particuliers et les collectivités et établissements publics.

Les études le démontrent, les pesticides ont un impact sur la santé et présentent des risques importants. Personne n’aurait idée de parler de peurs irrationnelles sur ce sujet, et les pouvoirs publics ont d’ailleurs pris de nombreuses mesures depuis plusieurs années, au niveau européen comme au niveau national, pour en limiter l’utilisation progressivement.

Cette proposition de loi vise à accélérer cette limitation. Je la soutiens car elle permettra, au-delà d’une moindre utilisation, une prise de conscience et le développement de solutions de substitution par les professionnels.

Le plan d’actions Écophyto 2018, présenté en 2008, poursuit plusieurs objectifs : acquérir de nouvelles données sur les pratiques d’utilisation des pesticides ; accompagner et aider les agriculteurs pour l’adoption de pratiques moins consommatrices de pesticides, innover en matière de systèmes de cultures et d’itinéraires techniques économes en pesticides grâce à un effort de recherche soutenu ; ou encore, former à la réduction de l’utilisation des pesticides et à leur emploi dans les conditions de sécurité requises. Il est pourtant très peu probable que nous respecterons tous ces engagements, c’est pourquoi il est temps aujourd’hui de passer à la vitesse supérieure en faisant un pas important dans la perspective de limitation des pesticides.

Aujourd’hui, l’utilisation des pesticides en zone non agricole ne représente qu’entre 5 % et 9 % du total des volumes vendus en France, mais l’impact de cet usage non agricole est proportionnellement beaucoup plus important qu’en usage agricole, en raison du type des surfaces traitées : surfaces imperméables, avec risques de ruissellement et problèmes de surdosage, sans oublier les fuites liées à des matériels non adaptés ou mal entretenus et la méconnaissance du bon usage de ces produits. Interdire l’usage des pesticides en milieu non agricole permettra donc d’agir directement sur les principales sources de pollution de l’eau en France métropolitaine.

Permettez-moi de revenir sur les problématiques de santé, qui sont essentielles. Le lien entre les pesticides et le déclenchement de cancers, de maladies de Parkinson ou autres, a été mis en évidence de manière indubitable. Ces éléments sont repris dans le rapport du Sénat à l’origine de cette proposition de loi. Dans le cadre du plan Écophyto, le Gouvernement s’est engagé dans la voie de la réduction de l’usage des pesticides. Il restreint donc leur utilisation aux seules fins de production de denrées alimentaires et de protection sanitaire. L’usage non agricole des pesticides se fonde souvent sur des considérations esthétiques ou d’agrément, tels que les géraniums dont a parlé Mme la rapporteure.

Compte tenu des problèmes de pollution de l’eau et des problèmes de santé associés, je considère que l’interdiction de l’usage non agricole de ces produits découle du bon sens, d’autant qu’elle n’induit aucun risque économique ou sanitaire.

Cette proposition de loi est simple, claire. De nombreux collègues l’ont dit, mais il est tellement agréable de le répéter ! La politique des petits pas, comme le disait le président Chanteguet, permet d’avancer et de respecter nos espaces naturels.

L’entrée en vigueur des articles 1er et 2 a été repoussée par nos collègues sénateurs, ce qui est une bonne chose pour laisser le temps de trouver des substituts et permettre aux acteurs économiques de s’adapter plus en douceur.

Les démarches « zéro phyto » ne sont pas nouvelles. A l’instar du département du Gers cher à notre ministre, de nombreuses démarches incitatives existent, notamment en région Picardie. Elles obtiennent des résultats probants avec le soutien des agences de l’eau.

La ville de Château-Thierry n’est pas en reste : elle est engagée depuis 2010 dans la démarche « zéro phyto ». Ces expériences montrent que le soutien technique dans le choix des méthodes d’entretien et du matériel et les aides financières sont essentiels.

Il est nécessaire d’inciter à l’achat mutualisé entre les communes ou à l’échelle des intercommunalités, ainsi que de conditionner les aides pour des aménagements publics à un entretien sans pesticides.

La formation est un autre point important, cela a été rappelé. Pour prendre à nouveau un exemple que je connais bien, dans le sud de l’Aisne, nous avons ouvert des ateliers de jardinage naturel, qui constituent une éducation à l’environnement, mais aussi à la culture de nos territoires ruraux pour les nouveaux arrivants, et permettent ensuite une réappropriation des jardins familiaux.

Cette proposition de loi va permettre la généralisation de ces bonnes pratiques et c’est donc avec enthousiasme que nous la soutenons. Dans la fable Le Cerf se voyant dans l’eau, Jean de la Fontaine écrivait : « Nous faisons cas du beau, nous méprisons l’utile ». Dans le cas qui nous intéresse, l’utile, c’est notre environnement, c’est notre santé, c’est notre vie. Mes chers collègues, en votant cette proposition de loi, nous prenons en considération ces aspects.

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