Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure, monsieur le président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, mes chers collègues, nous pouvons dire aujourd’hui que la volonté de réduire l’utilisation des produits phytosanitaires sur notre territoire est partagée par tous. Ce consensus s’explique par les graves enjeux en termes de santé et de respect de l’environnement que pose l’utilisation des pesticides, cela a déjà été rappelé.
Nous sommes réunis ce matin pour discuter de la question de l’utilisation non agricole des produits phytosanitaires. Ces usages ne doivent pas être négligés puisqu’ils représentent aujourd’hui entre 5 % et 10 % des usages des pesticides et que 45 % des Français possèdent un jardin ou un potager. Et comme l’a rappelé la rapporteure, 60 % des collectivités ne sont pas encore engagées dans cette voie.
Le texte que nous étudions a un double objectif : interdire aux personnes publiques l’utilisation des produits phytosanitaires pour entretenir leurs espaces verts, forêts et promenades ; et interdire leur commercialisation et leur utilisation pour un usage non professionnel.
Concernant les enjeux sanitaires, ce texte permet tout d’abord de protéger les agents des collectivités qui utilisent des produits chimiques dans leur travail quotidien. En juin 2013, une expertise collective de l’INSERM avait souligné la corrélation entre l’utilisation régulière de pesticides et le développement de certaines pathologies comme la maladie de Parkinson ou le cancer de la prostate.
Mais ce texte permettra aussi de protéger l’ensemble des citoyens et usagers des espaces concernés : espaces verts, forêts et promenades.
Il vise aussi les utilisateurs non professionnels de produits phytosanitaires qui sont souvent mal informés sur les dangers et sur les dispositions de sécurité à prendre pour les utiliser. Les dangers dermatologiques et respiratoires, même pour des usages non quotidiens, ne sont pas négligeables. Les collectivités, en s’appuyant sur cette loi, pourront organiser des ateliers pédagogiques auprès des citoyens et communiquer encore davantage.
Les enjeux environnementaux d’une réduction de l’usage non agricole des produits phytosanitaires ne doivent pas être négligés. Je pense notamment à la contamination des eaux par les désherbants utilisés sur des surfaces imperméables comme les trottoirs ou les pentes des garages. De plus, nous pouvons repérer aisément les fossés ou bordures de parcelles où une utilisation massive de pesticides a été faite puisqu’ils sont brûlés. Or les maires ne peuvent interdire aux citoyens d’utiliser des produits, même dangereux pour leur santé et pour l’environnement, tant que ces derniers sont disponibles à la vente.
C’est donc à la fois comme députée, élue local et citoyenne que je souhaite saluer ce texte. En effet, il s’inscrit dans un mouvement engagé depuis déjà plusieurs années par de nombreuses collectivités qui ont mis en place des plans zéro phyto. Parmi elles, on trouve à la fois de grandes villes comme Paris ou Nantes, de bien plus petites communes comme celle des Sorinières, dont le maire Christian Couturier est un spécialiste au sein de l’agglomération nantaise des questions relatives à la ressource en eau, et d’autres plus petites encore, comme la Chapelle-Heulin dont je suis la maire, et qui compte un petit peu plus de 3 000 habitants. Je peux donc témoigner qu’il est possible, même pour une petite commune, de limiter considérablement l’utilisation de pesticides pour entretenir ses espaces verts.
Ces réflexions sur notre impact environnemental nous amènent à envisager également l’utilisation de variétés végétales différentes, ne nécessitant pas ou peu d’interventions, que nous choisissons pour couvrir les sols.
Ce texte apporte aux élus des collectivités engagées dans le « zéro phyto » un soutien législatif, qui a été salué lors des auditions menées par la rapporteure.
La mise en place de plans « zéro phyto » sur l’ensemble du territoire à l’horizon de janvier 2020 semble donc être un objectif réaliste, avec une attention particulière à porter en matière de formation des agents des collectivités. Un nouveau mandat de six ans va s’ouvrir en mars prochain. Les nouveaux élus auront donc un mandat pour prendre la mesure de cette loi : cela est réaliste. Les élus locaux devront aussi veiller à informer les citoyens des démarches entreprises. Un changement des mentalités ne pourra se faire qu’avec une bonne pédagogie.
Je souhaite revenir sur les avancées obtenues au Sénat sur cette proposition de loi. Les sénateurs ont élargi le champ des alternatives aux produits phytosanitaires. Ils ont aussi prévu une dérogation pour la lutte contre la propagation des organismes nuisibles en cas de danger sanitaire. Le champ d’application de cette proposition de loi a été restreint, notamment pour des raisons de sécurité publique. Enfin, les dates d’entrée en vigueur ont été repoussées, afin de laisser le temps aux personnes publiques comme aux industriels de se préparer à cette transition.
Cette proposition de loi s’inscrit dans le cadre des engagements du Gouvernement, comme l’a rappelé notre cher ministre tout à l’heure. Nous aborderons également cette question lorsque nous débattrons du projet de loi sur la biodiversité, à venir cette année.
Je souhaite donc saluer cette proposition de loi déposée par nos collègues écologistes, dans la mesure où elle envoie un signal fort aux industriels, aux collectivités ainsi qu’aux citoyens. Equilibré, pragmatique et réaliste, ce texte doit constituer une étape dans notre action pour lutter contre l’utilisation des pesticides. Je vous invite donc à un vote conforme de ce texte.