Intervention de Jean-Charles Taugourdeau

Séance en hémicycle du 23 janvier 2014 à 9h30
Encadrement de l'utilisation des produits phytosanitaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Charles Taugourdeau :

Je demande à mes collègues du parti socialiste de lire la réponse que le ministre de l’agriculture m’a adressée à la suite de ma question écrite : elle figure dans le Journal officiel du 29 octobre 2013, à la page 11278. Elle montre bien que point n’est besoin d’une telle proposition de loi : le plan Écophyto 2018est en marche pour réduire l’utilisation des produits phytosanitaires. Dans ma commune, nous avons déjà atteint le « zéro phyto ». Mais il ne faut pas bousculer les choses car il existe des risques. Il y a des risques pour l’emploi, tout d’abord : 1 600 emplois directs sont concernés. Il y a des risques pour le budget des ménages, que ce texte va alourdir : rappelons que 10 % des pommes de terre consommées en France proviennent de jardins d’amateurs.

Et il y a des risques juridiques, chers amis socialistes. Le principe de libre circulation des marchandises est l’un des grands principes du marché intérieur : les marchandises légalement produites et commercialisées dans un État membre doivent pouvoir être introduites dans un autre État membre, aux termes de l’article 34 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. L’article 36 fixe les motifs pour lesquels un État membre peut décider d’une mesure nationale entravant les échanges transfrontaliers, dont la protection de la santé des personnes. La jurisprudence admet également la protection de l’environnement. L’État membre doit démontrer que l’interdiction est nécessaire et proportionnée, ce qui implique de démontrer que la circulation des produits présente un risque sérieux pour l’environnement ou la santé publique et que les mesures envisagées sont proportionnées à la protection recherchée. Selon la jurisprudence, monsieur le président de la commission, une interdiction totale n’est pas toujours appropriée pour faire face à un risque. Il incombe à l’État d’apporter la preuve que l’objectif poursuivi ne peut être atteint par d’autres moyens ayant un effet moins restrictif sur le commerce entre États membres. En l’espèce, il existe un risque de recours en manquement : la France contreviendrait à l’article 34 sans pouvoir justifier sa mesure par l’article 36.

Ne parlons pas des conséquences économiques de la sanction européenne. La France serait obligée d’admettre à nouveau des produits phytosanitaires émanant d’autres pays européens sur son territoire national alors que les entreprises françaises auraient stoppé leur production et leur recherche et développement. Cela n’irait pas tout à fait dans le sens des voeux exprimés par le Président de la République mardi dernier.

En conclusion, je dirai que ce n’est pas de l’écologie que vous faites mais de l’éco-lobotomie.

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