Il est intéressant de partir d'une proposition concrète.
Vingt-cinq ans ont été nécessaires pour que le Parlement européen soit élu au suffrage universel – auparavant, des élus nationaux étaient délégués à Bruxelles. Ce fut là une grande étape franchie. L'important est que la forme de coopération entre parlements nationaux et Parlement européen aboutisse à des réalisations concrètes, par exemple en matière de taxe sur les transactions financières, d'espace Schengen ou de gestion du problème des réfugiés. Pour ce faire, être en « contact électronique » ne suffit pas, nous avons besoin de conférences. Mais je me demande si nous avons vraiment besoin de structures spécifiques communes avec le Parlement européen, car cela a toujours deux conséquences : cela entraîne une certaine confusion dans l'opinion publique ; l'administration et la bureaucratie l'emportent toujours car ce sont elles et non pas nous, parlementaires, qui disposent de la vue d'ensemble.
Il n'en demeure pas moins qu'un renforcement démocratique s'impose. J'invite instamment tous mes collègues, quel que soit leur mouvement politique, partout où ils le peuvent, à se mêler des campagnes électorales nationales. J'ai eu la chance de participer à une campagne électorale à Montmartre ; ce fut une expérience très vivante, irremplaçable, à laquelle aucun grand discours ne saurait se substituer. « Au commencement est l'acte », disait Goethe. Il y a tant de possibilité d'agir. Nous effectuons des voyages d'étude aux États-Unis qui ne servent à rien ; mieux vaut se focaliser sur l'Europe.
Sur l'initiative des sociaux-démocrates et des libéraux, le Bundestag a adopté, à l'unanimité, la disposition suivante : le futur commissaire européen, une fois désigné par le Gouvernement, avant d'être mis sur la sellette à Bruxelles, est auditionné par notre commission parlementaire pour exposer sa philosophie. Günther Oettinger, qui n'appartient pas à mon mouvement politique, a été remarquable durant son audition de trois heures. Nous ne décidons donc pas qui sera commissaire mais nous pouvons nous faire une idée de la personnalité désignée, ce qui n'est pas sans impact sur nos relations avec lui. Si tous les parlements nationaux agissaient de même, cela aurait un double effet : notre accès aux commissaires serait meilleur et les citoyens les considéreraient non pas comme des bureaucrates enterrés à Bruxelles mais comme des hommes politiques avec lesquels s'effectuent des échanges.
Je m'adresse maintenant au Parti populaire européen (PPE) et à la Pologne. En 2014, ce sera l'épreuve du feu de la démocratie européenne. Un progrès dans l'élection européenne se produira-t-il enfin ? Chacun, dans son parti, se prononcera-t-il pour que l'élection européenne et la démocratie parlementaire prennent de l'importance ? En Pologne, en Allemagne, en France, le chef de file de la majorité prend le pouvoir. En Europe aussi, nous avons besoin d'une tête de liste commune. Les sociaux-démocrates l'ont décidé et j'espère que nous pourrons le mettre en oeuvre – ce sera peut-être Martin Schulz. Si nous y parvenons, quel que soit le vainqueur, nous aurons un débat européen sans précédent, avec des familles politiques et une majorité au sein de laquelle sera désigné le Président de la Commission européenne. Ce sera la fin des simagrées des chefs d'État et de Gouvernement, qui essaient de tout verrouiller avant l'élection. Ce sera le résultat d'un scrutin où les citoyens. Ce sera une transformation culturelle. Le scrutin européen en deviendra différent et plus personne ne dira que les députés européens n'ont pas leur mot à dire.
Les changements que vous proposez créeront des petites jalousies : les députés nationaux affirmeront que les députés européens ont trop de pouvoir, les députés européens rétorqueront que les députés nationaux empiètent sur leur travail avec la Commission européenne. Une division du travail doit être définie, les compétences et attributions nationales et européennes ne sont pas figées mais en mouvement. Au bout du compte, puisqu'il s'agit de démocratie parlementaire, nous devons faire preuve de courage. Je serais heureux que ce soit le cas, au sein d'une conférence future interparlementaire.