Intervention de Michel Cadot

Réunion du 16 mai 2013 à 10h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Michel Cadot, préfet de la région Bretagne, préfet de la zone de défense et de sécurité Ouest :

En Bretagne, avant la nomination d'un commissaire au redressement productif, nous avions obtenu en 2009 la désignation d'un commissaire à la réindustrialisation, qui a fonctionné jusqu'en 2011. S'il y a eu une vacance de six mois environ entre les deux, on ne partait pas de zéro et il ne semble pas y avoir eu de changement total dans l'approche d'anticipation, de veille et de contact avec les entreprises. La formule du commissaire au redressement productif me paraît nécessaire : elle permet d'identifier une personne et un lieu de concertation pour des entreprises bien déterminées – nous avons d'ailleurs prévu demain avec notre commissaire au redressement productif, M. de Ribou, ici présent, une communication dans la presse sur le sujet. Il dispose à cet effet d'une petite équipe rattachée au préfet de région, mais qui fonctionne très bien avec les collectivités territoriales et les niveaux départementaux et infra-départementaux, y compris les sous-préfets. L'efficacité du dispositif dépend du pilotage qui en est fait, du partenariat local et aussi des qualités propres du commissaire.

En Bretagne, je suis certain qu'il contribue à faire remonter un certain nombre de dossiers beaucoup plus facilement. À côté des outils d'alerte habituels, il constitue un moyen plus souple et efficace, permettant de donner confiance au chef d'entreprise quand il dévoile des difficultés.

Quant au cas de Doux, il est particulier, compte tenu de l'importance du sinistre et de la lenteur avec laquelle il a été signalé. D'abord, le commissaire est arrivé en cours de route et, surtout, le groupe traînait depuis une dizaine d'années des difficultés constantes, qu'il réussissait à reporter.

J'appuie personnellement, dans les principales régions ou pour deux régions de plus petite taille, la mise en place systématique, pour la fonction d'anticipation, de veille et de contact avec les entreprises, d'un chargé de mission – quelle que soit son appellation – qui ne s'inscrive pas dans un cadre institutionnel. Il a, de ce fait, une liberté de propos et d'appréciation et des liens plus approfondis avec le monde bancaire et les collectivités territoriales. Il complète très bien le rôle, nécessaire aussi, de la DIRECCTE, dont la mission administrative et de contrôle est plus régalienne, ce qui, à certains moments, pose problème.

Sa relation avec les préfets et les sous-préfets est bonne : il ne se situe pas dans un positionnement hiérarchique, même s'il fait l'objet d'un rattachement lui permettant d'ouvrir des portes et de faciliter ses relations avec le président du conseil régional ou avec tel élu important.

S'agissant de l'efficacité des moyens de redynamisation des territoires, je rappelle que nous avons en Ille-et-Vilaine un fonds mutualisé depuis juin 2009, qui a vocation à réduire les frais de gestion dans le cas où est prévue une convention de revitalisation – soit une dizaine de cas au maximum par an, et beaucoup moins depuis un an. En outre, ce système évite une concurrence un peu néfaste entre des opérateurs pouvant chercher des emplois de manière non coordonnée. Enfin, on constate un plus grand professionnalisme de l'organisme qui gère et fait le travail de démarchage : en Ille-et-Vilaine, il s'agit d'Idéa 35. Sur le secteur de Saint-Brieuc, il y a aussi un fonds mutualisé, mais pour le reste, les départements s'appuient sur des démarches classiques de conventionnement par entreprise, chacune choisissant son opérateur.

L'efficacité des dispositifs est bonne en termes de recréation d'emploi. Les aides sont pour l'essentiel consacrées à des subventions à l'emploi, de l'ordre de 2 500 euros, ou 5 000 euros si la personne vient de l'entreprise qui a signé la convention de redynamisation. Mais il y a peu de cas de véritables innovations dans les démarches de redynamisation.

Si l'effet n'est pas mauvais au regard des bilans chiffrés, l'impact incitatif de cette aide supplémentaire sur certains bassins d'emploi moins défavorisés – comme c'était le cas jusqu'à présent en Bretagne – est incertain. En tout cas, les emplois recréés bénéficiant aux salariés licenciés ou en reconversion de l'entreprise ayant signé la convention sont peu nombreux – dans le meilleur des cas, ils représentent 5 à 10 % du total et, dans d'autres, sont quasiment inexistants.

Les fonds mutualisés m'ont semblé plus efficaces ; ils permettent d'avoir un véritable partenariat et un échange avec les acteurs locaux, qu'il s'agisse du conseil général, des communautés de communes ou de l'association des maires. Mais dans certains territoires, ou certains cas, l'accompagnement en termes de redynamisation est sans doute moins utile. En ce moment, la Bretagne est par exemple très touchée par des dossiers agro-alimentaires ou automobiles, mais l'est moins dans le domaine des télécommunications ou d'autres secteurs où la situation évolue correctement. Ce dispositif est donc utile : il est apprécié par les préfets car il leur donne des moyens, mais il n'est sans doute pas un levier décisif ; il fait partie d'une panoplie d'outils permettant de redynamiser les territoires.

Je pense qu'il n'y a pas de sélectivité. On n'est sans doute pas en mesure d'inventer de nouvelles formes d'accompagnement, d'abord parce que le dispositif en Bretagne, notamment en Ille-et-Vilaine, est assez riche en termes de financements, de prêts ou de garanties, avec une forte implication des collectivités. Le plus facile dès lors est de recourir à la prime à l'emploi. En outre, le tissu de PME est assez vivant et crée régulièrement des emplois ; il profite des occasions qui lui sont offertes, ce qui peut accélérer la prise de décision à certains moments.

Pourrait-on, avec un ciblage et un professionnalisme encore plus poussés, être plus efficace ?

On a essayé il y a un an, sur la proposition du prédécesseur de M. de Ribou – ce qui a ralenti le fonctionnement de ce fonds en Ille-et-Vilaine – la mise en place de prêts à taux zéro pour les PME. Finalement, cette mesure n'a pas été retenue : le besoin n'a pas été absolument avéré et il existe des problèmes de qualification en fonds public ce qui est aujourd'hui – et c'est sa force – un fonds privé.

Cette difficulté à inventer quelque chose de mieux est sans doute liée à un problème d'efficacité de la gouvernance. Je constate aussi qu'aucun des présidents n'est personnellement présent dans les comités d'engagement, cette tâche revenant plutôt au vice-président chargé des affaires économiques. Il y a probablement une sorte de consensus local pour ne pas remettre systématiquement en cause les pratiques.

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