La coopération structurée permanente est une possibilité prévue dans le traité de Lisbonne, à laquelle le noyau dur du groupe de Weimar – l'Allemagne, la France et la Pologne – a fait explicitement référence en 2011, lorsqu'ils ont voulu relancer l'Europe de la défense. Or l'évocation de cette possibilité a provoqué une réaction immédiate du Royaume-Uni, qui a craint l'isolement, tout en suscitant l'embarras des autres partenaires, qui ne souhaitent pas voir les États membres de l'Union européenne se diviser en différentes catégories. L'effet de cette double réaction a été de relancer les opérations de PESD, notamment au Mali. Le consensus régnant – vous savez que l'unanimité est nécessaire en la matière –, l'idée d'une coopération structurée permanente devient sans objet.
La question de l'état-major européen divise profondément les États membres. Pour nos partenaires britanniques – travaillistes et conservateurs confondus –, c'est la ligne rouge à ne pas franchir. C'est pourquoi les États membres préfèrent attendre et essayer d'autres formules. À l'heure actuelle, un quartier général limité, mis en place au sein de la SEAE, est essentiellement chargé de coordonner les différentes opérations menées dans la Corne de l'Afrique, qui ont une double dimension, civile et militaire. Si cette coordination donne pleine satisfaction, nos amis britanniques, avec leur pragmatisme habituel, pourraient accepter que d'autres missions soient confiées au quartier général. Il convient d'avancer à petits pas, pour déboucher sur une formule acceptable par tous. Du reste, la question de l'état-major militaire européen ne sera pas abordée par la mission qui pourrait être confiée par le Conseil européen au SEAE à la fin de l'année.
S'agissant du financement de l'industrie de l'armement, à ma connaissance, le traité limite l'intervention du mécanisme appelé Athena aux seules actions préparatoires aux opérations militaires et civiles. Une extension de ce domaine n'est pas, à l'heure actuelle, dans les intentions des États membres de l'Union européenne.
La coopération entre l'OTAN et l'Union européenne donne pleinement satisfaction. La Haute représentante, Lady Ashton, et le secrétaire général de l'OTAN, M. Rasmussen, font mensuellement le point sur les opérations communes – Kosovo, Corne de l'Afrique et Afghanistan –, opérations pour lesquelles nous nous sommes répartis le travail. L'Europe se consacre plutôt à la formation des troupes d'élites en Somalie ou de la police en Afghanistan, l'opération Eulex, visant, quant à elle, à travers des actions de justice et de police, à promouvoir l'état de droit au Kosovo. L'OTAN et l'Union européenne font aussi régulièrement le point sur les projets européens en direction du Mali, et plus généralement du Sahel, et de la Syrie. Si l'OTAN n'envisage pas d'intervenir directement dans ce pays, l'organisation est en revanche soucieuse, à toutes fins utiles, de mener une réflexion d'ordre stratégique. Nous devons cependant surmonter, à chaque fois, les difficultés qui président aux relations entre Chypre et la Turquie. Je tiens enfin à mentionner que, cette année, l'OTAN a souhaité associer l'Union européenne à ses manoeuvres militaires. Nous souhaitons renouveler l'exercice les prochaines années.
Nous avons tous lu avec un grand intérêt le rapport de M. Hubert Védrine, y compris ses critiques de l'Europe de la défense. L'immense intérêt de ce rapport est de placer les rôles de l'OTAN et de l'Union européenne dans leur cadre respectif. Le rôle de l'OTAN, dans laquelle les États membres ont intégré leurs forces militaires, est d'assurer la défense collective de l'Europe, et il n'est pas question pour l'Union européenne de se substituer à l'OTAN sur ce point. Le rôle de l'Union européenne consiste, sur les théâtres d'opérations précis que j'ai évoqués, à privilégier une approche intégrée recourant aux différents instruments dont elle dispose. Il y a donc complémentarité entre l'OTAN et l'Union européenne. Personne, d'ailleurs, ne songerait à faire appel à l'OTAN pour intervenir au Sahel et au Mali, car ce serait adresser un message politique difficilement acceptable par certains États. En revanche, l'Union européenne apparaît, dans ces zones, comme un interlocuteur particulièrement crédible. La coopération entre l'Union européenne et plusieurs organisations régionales – Union africaine, Ligue arabe, ASEAN – connaît, à l'heure actuelle, un vrai développement, l'Europe devenant le partenaire naturel de ces organisations. Il convient de développer cette coopération dans ce terrain encore en friche.