Je suis ici le seul représentant de mon groupe mais il ne faut pas en conclure que nous boudons la réunion : cela n'est dû qu'à sa programmation tardive, et c'est d'ailleurs aussi pour cette raison que nos amendements n'ont été déposés qu'en mon nom personnel.
Je salue la méthode retenue par le ministre depuis plusieurs mois pour élaborer ce texte, notamment les larges consultations auxquelles il a procédé dans le cadre des Assises. Il était important de remettre d'équerre la programmation de cette politique pour les prochaines années : le monde a évolué, la coopération d'aujourd'hui ne saurait être celle d'hier. Il convient de prendre en compte l'émergence de pays ayant accru leurs moyens économiques, mais aussi les enjeux du changement climatique, de la gouvernance, de la lutte contre la corruption, de l'égalité entre les hommes et les femmes, de la promotion des femmes comme actrices du développement, de la protection des biens publics mondiaux, de la reconnaissance de l'échelon local comme acteur essentiel de toute politique de développement – au-delà du rôle de l'État.
Je partage donc l'esprit du texte : il me paraît tout à fait bénéfique de réorganiser les priorités transversales de notre pays tout en affirmant nos priorités sectorielles. La clarification de notre « offre » de coopération constitue d'ailleurs un impératif pour la bonne négociation de notre coopération bilatérale. Ce texte présente en outre l'intérêt d'associer les acteurs que sont les ONG, les acteurs économiques et syndicaux et les collectivités territoriales à notre démarche de solidarité internationale, de coopération et d'aide au développement, mettant ainsi l'ensemble de la « famille France » en situation de coopération – et non seulement son Gouvernement ou son administration.
Cet aspect me paraît essentiel dans la mesure où nos moyens budgétaires se réduisent. Il importe toutefois d'affirmer dès à présent notre volonté de maintenir les engagements de la France à un certain niveau budgétaire et de les compléter par des financements innovants. Pour exercer un véritable effet de levier, ceux-ci devront être affectés à des dépenses spécifiques au lieu de se fondre parmi les crédits de droit commun. Je suis également satisfait que l'évaluation et la transparence dans l'utilisation des crédits figurent parmi nos objectifs. Enfin, la reconnaissance d'un véritable statut de la coopération décentralisée, qui a beaucoup évolué depuis 1992, empêchera les collectivités de s'abriter derrière des timidités législatives ou réglementaires pour ne pas aller de l'avant.
Au-delà de cet accord de principe général, je souhaiterais souligner mes principales préoccupations. Depuis les objectifs du millénaire pour le développement, toutes les politiques multilatérales et bilatérales mettent l'accent sur le fait qu'aucune politique de lutte contre la pauvreté et en faveur de l'accès universel aux services de base, tels que l'eau et l'assainissement, qu'aucune politique d'aménagement du territoire ou de respect des minorités ne pourra être le fait du seul État. Le renforcement du processus de décentralisation et l'émergence de collectivités territoriales efficaces constituent en effet la clef du développement, car c'est à cet échelon que l'acceptabilité de l'impôt est la plus forte. Tous les textes adoptés par l'Organisation des Nations unies (ONU) sur le changement climatique renvoient d'ailleurs en dernier ressort au maire et aux autorités locales. Or, si le projet de loi reconnaît la coopération décentralisée, il ne considère pas la gouvernance locale ni le renforcement des acteurs locaux comme des préoccupations transversales. C'est pourquoi j'insisterai sur cette dimension par le biais des amendements que je défendrai.