Le continuum urgenceréhabilitationdéveloppement n'est en tout cas que très brièvement abordé dans le rapport annexé. Le budget du centre de crise du ministère des affaires étrangères pour l'action humanitaire n'est au départ que de 8 millions d'euros. Au moment où la direction générale ECHO (European Commission Humanitarian Office) de la Commission européenne envisage de réduire de 50% les ressources qu'elle alloue à l'action humanitaire, il risque donc bel et bien d'y avoir un problème de financement européen et français de ces actions.
La cohérence des différentes politiques publiques françaises et européennes au regard de la politique de développement est érigée en deuxième principe. Elle n'est pas toujours garantie aujourd'hui. Ainsi dans les pays les plus pauvres, notre politique de développement cherche-t-elle à soutenir l'agriculture familiale, qui crée de l'emploi dans les campagnes tout en permettant de nourrir la population des villes. C'est essentiel alors que 840 millions de personnes souffrent encore de la faim dans le monde. Mais cet objectif est contradictoire avec la politique, aussi bien française qu'européenne, en matière d'agrocarburants qui conduit à accaparer des terres agricoles pour les cultures d'oléo-protéagineux, ce qui réduit d'autant les surfaces disponibles pour l'agriculture familiale. Comment surmonter cette contradiction ? Se contente-t-on d'affirmer l'exigence d'une plus grande cohérence entre la politique de développement et les autres politiques ou lance-t-on un plan d'action énergique pour la garantir ?
L'article 5 dispose que « la politique de développement et de solidarité internationale prend en compte l'exigence de responsabilité sociale et environnementale. » Des multinationales, mais aussi des PME, contribuent de manière très positive au développement de tout un tissu de petites et moyennes entreprises locales en Afrique et ailleurs. Hélas, leur comportement n'est pas toujours exemplaire, comme on l'a encore vu récemment au Bangladesh. Aujourd'hui, les multinationales n'endossent aucune responsabilité pour les agissements de leurs filiales dans les pays du Sud. Des normes internationales existent pourtant en matière de responsabilité sociale et environnementale, à l'élaboration desquelles la France a d'ailleurs travaillé. Il ne s'agit pas d'entraver l'action des entreprises, seulement de faire en sorte qu'elles se comportent de manière responsable dans leurs activités internationales. Notre pays soutient certaines entreprises à l'international, au travers notamment des aides accordées par l'Agence française de développement (AFD). Ce soutien ne pourrait-il pas être conditionné à une responsabilité sociale et environnementale exemplaire de la part de ces entreprises ? Le projet de loi pourrait aller plus loin sur ce point.
Par ailleurs, il retient une approche globale des migrations, qui nous semble trop proche des accords de gestion concertée des flux migratoires, en ce qu'elle continue de faire un lien étroit entre gestion des flux migratoires et aide au développement. Ce point devrait être revu.
Tous les rapports ont dénoncé la complexité du pilotage de l'aide au développement française. Or, le projet de loi n'évoque aucune piste pour le simplifier. Il existe certes le CICID, mais lorsqu'il a été réuni en 2013, il ne l'avait pas été depuis 2009. Des engagements plus forts pourraient être pris pour clarifier ce pilotage.
En conclusion, toutes les ONG sont mobilisées, prêtes à dialoguer avec vous et à proposer des amendements sur les différents points que je viens d'évoquer, ainsi que sur la nécessité de mieux associer la société civile et les populations locales aux projets de développement soutenus par la France. Nous restons à votre disposition.