On peut certes rêver d'alternatives à l'arme nucléaire mais la question de la crédibilité de la dissuasion aux yeux de l'adversaire demeure essentielle. Il existe deux types d'alternatives à l'arme nucléaire. En premier lieu, une alternative technique avec une défense antimissile efficace surtout contre la menace balistique. La défense contre des missiles de croisière à longue portée reste quant à elle délicate. On peut aussi penser à l'alternative que constitueraient des missiles conventionnels classiques de nouvelle génération, comme les futurs missiles américains à propulsion hypersonique. Ce premier type d'alternative est très coûteux pour une efficacité douteuse ; surtout elle ne fait pas peur, à la différence des images terrifiantes d'Hiroshima et de Nagasaki que chacun conserve en mémoire. La première vertu de la dissuasion nucléaire est en effet de faire peur.
La deuxième alternative réside dans un système de sécurité collective. La dissuasion nucléaire est pour moi une garantie en cas d'échec de la paix libérale au sens kantien. Le nombre de conflits traditionnels est certes en diminution sur la longue durée et peut-être que la sécurité collective deviendra le paradigme dominant dans cinquante ans, la dissuasion s'effaçant alors, mais nous en sommes loin et il n'y a aujourd'hui, à mon sens, pas d'alternative crédible à la dissuasion nucléaire.
S'agissant de la deuxième question, je pense qu'il n'existe pas de situation où la dissuasion nucléaire pourrait être utilisée face aux menaces terroristes sauf peut-être dans le cas d'un terrorisme nucléaire directement commandité par un État détenteur. Il s'agit là d'un scénario extrême mais qui avait déjà été évoqué dans un discours de Jacques Chirac en 2006. Les Britanniques partageaient d'ailleurs ce point de vue.