Intervention de Jérôme Cahuzac

Séance en hémicycle du 16 juillet 2012 à 21h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2012 — Motion de renvoi en commission

Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget :

…et en accusant le Gouvernement de vouloir faire ce qu'il n'a pas l'intention de faire que vous ferez oublier ce que vous n'aviez pas l'intention de faire mais que, malheureusement pour les Français, vous avez fait. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Enfin, il paraît que nous aurions la religion de la dépense publique. Là encore, au-delà des réputations, peut-être flatteuses pour certains, que vous tentez de faire, regardons les faits. Après tout, si nous pouvons être en désaccord sur les politiques à mener, soyons au moins d'accord sur ce qui s'est passé les années précédentes. Les documents émanant soit du ministère de l'économie et des finances soit de la Cour des comptes nous permettent d'éviter tout débat inutile.

La dépense publique représentait 52,9 % du PIB en 2002. C'était déjà beaucoup et c'était probablement déjà un record européen. En 2012, quand les Français ont estimé nécessaire d'opérer une correction démocratique, le taux était de 56,2 %. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Vous n'avez pas baissé la dépense publique par rapport au PIB, vous l'avez massivement augmentée, et pour quel résultat ? Au prix de cette augmentation des impôts quand vous aviez promis de les baisser, au prix de l'augmentation de la dépense publique quand vous aviez promis de la baisser, au prix de ces différents reniements – je me permets de reprendre ce terme puisque vous l'avez utilisé du haut de cette tribune –, la situation du pays s'est-elle améliorée ? Non. En tout cas pas au regard de la situation de nos finances publiques puisque le déficit structurel du pays, c'est-à-dire celui que notre pays aurait connu s'il n'y avait pas eu la crise, a augmenté. Ce déficit peut être calculé avec des hypothèses et des méthodes différentes ; il est d'ailleurs calculé différemment par la direction du Trésor et par la Cour des comptes, mais les deux aboutissent à la même conclusion. Pour la Cour des comptes, le déficit structurel de notre pays était de 3,5 % du PIB en 2007, il est de 3,9 % en 2011. Vous avez donc structurellement endetté le pays de 0,4 point de PIB. Si les niveaux sont différents pour la direction du Trésor, l'augmentation est exactement la même. Vous pouvez contester, monsieur Censi, probablement avec des études dont j'aimerais connaître la nature, l'estimation de la Cour des comptes et celle de la direction du Trésor, mais les deux concordent pour dire que, ces cinq dernières années, notre pays ne s'est pas désendetté, qu'il s'est endetté, et de surcroît structurellement, de 0,4 point de PIB.

C'est beaucoup, pour des gens qui prétendent donner des leçons de finances publiques à un gouvernement qui n'a que deux mois d'existence et que l'on ne peut guère taxer de tous les péchés du monde, notamment des péchés de ceux qui l'ont précédé ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

Enfin, vous expliquez que nous nous retirons toute marge de manoeuvre. Heureusement que non ! Nous gardons des marges de manoeuvre, notamment par la maîtrise de la dépense publique, car je voudrais vous rappeler, monsieur Censi, qu'outre le gel des dépenses que nous avons maintenu au niveau que vous aviez prévu, nous opérons un « sur-gel » de 1,5 milliard d'euros. Cette économie est nécessaire pour répondre à des dépenses qui n'étaient pas prévues : elles ne l'étaient pas par le candidat François Hollande, nécessairement, ni par les candidats de la majorité présidentielle aux élections législatives, ni par vous, ni même par la plupart des membres du précédent gouvernement puisque le ministre du budget du dernier gouvernement Fillon n'avait pas jugé bon d'informer ne serait-ce que son collègue des finances qu'il existait un contentieux que la France allait perdre et qui nous coûterait cette année 1,5 milliard d'euros non budgétés.

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