Non, détrompez-vous : je pourrais vous citer plusieurs exemples qui montrent que c'est un langage que le Département d'État est prêt à entendre ! Notamment, certaines entités américaines ont fait appel à des sous-traitants français, précisément pour conserver une cohérence dans l'équipement des troupes.
Ensuite, il nous faut intervenir en amont de la formulation des politiques et des appels d'offres de l'Union européenne. Je suis donc allé voir le SEAE et la Commission pour leur présenter les projets retenus par le sommet de l'Élysée et pour les engager à se les approprier – ce qu'ils sont prêts à faire dans un certain nombre de domaines. Cela ne me gêne pas si ces programmes sont ensuite présentés comme étant d'origine européenne, et non pas française : le but est de stabiliser une zone cruciale pour la sécurité de l'ensemble de l'Union, et non de notre seul pays.
Au-delà, j'ai conseillé à mes interlocuteurs de prendre contact avec notre réseau de coopérants : ils sont non seulement français, mais également européens, et grâce à leur connaissance intime du pays, ils peuvent être de bon conseil. Et, lorsque je suis en visite dans un pays africain, je rencontre systématiquement le représentant de la DUE, celui des États-Unis et les ambassadeurs des pays qui soutiennent notre action, par exemple via le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).
La France se trouve à la pointe des actions de coopération dans le golfe de Guinée, avec le projet d'appui à la réforme du système de sécurité maritime (ASECMAR), lancé il y a deux ans et demi, qui vise à mettre en place un système d'Action de l'État en mer (AEM). Nous avons proposé notre aide aux dix-huit pays du golfe, avec succès : six ont déjà adopté un système administratif à la française, avec un préfet maritime ou une haute autorité maritime. L'Union européenne, de son côté, a lancé le programme CRIMGO, plus récent et bien mieux doté que le nôtre, mais qui ne fonctionne pas très bien – la conception est bonne, mais la mise en oeuvre fait problème. Je suis allé défendre notre projet à Bruxelles ; ils en sont très contents et veulent même l'intégrer à CRIMGO. J'ai donné mon accord. Nous proposons à la Commission d'être l'un de ses opérateurs, ce qui nous permet de faire avancer nos idées et de donner une couverture politique à notre action, sans que l'on puisse accuser la France de vouloir placer ses pions.