Intervention de Amiral Marin Gillier

Réunion du 5 février 2014 à 9h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Amiral Marin Gillier, directeur de la coopération de sécurité et de défense :

D'abord, entendons-nous sur les termes utilisés. Pour le grand public, la sécurité maritime, c'est la lutte contre la piraterie, mais son champ d'action est en réalité bien plus large : il s'agit aussi de protéger les ressources halieutiques et les fonds marins, de lutter contre la pollution, de définir la responsabilité des États en cas d'avarie ou de pollution, de faire appliquer le code international ISPS pour la sûreté des navires et des installations portuaires, de surveiller le trafic maritime et de lutter contre les trafics de toute nature – drogue, êtres humains, armes, etc. – qui déstructurent les États et favorisent le développement des réseaux terroristes. C'est dans ce cadre global que nous nous attaquons à l'insécurité maritime.

La mer, c'est la res nullius ; pourtant, quand un navire circule, il passe d'une zone de droit à une autre sans toujours s'en rendre compte. C'est tellement compliqué que l'on ne peut pas intervenir dans ces grands espaces sans une coordination internationale très forte : cela s'est vérifié sur la côte est de l'Afrique, et c'est la même chose sur la côte ouest. En revanche, les solutions ne sont pas transposables : alors que, en Somalie, il n'y avait ni État ni richesses, dans le golfe de Guinée, les États veillent au respect de leurs prérogatives régaliennes, et il y a des richesses à protéger.

Ce n'est ni à la France ni à la communauté internationale de dire aux Africains ce qu'ils doivent faire en la matière ; ils l'ont eux-mêmes décidé lors de la conférence de Yaoundé, en juin dernier. Notre rôle est d'apporter notre soutien à la dynamique lancée à cette occasion, quitte à leur faire part de nos doutes sur certains points – par exemple, quatre niveaux de coordination de commandement, c'est un de trop.

La DCSD dispose de dix coopérants sur la côte ouest africaine ; à la suite du sommet de l'Élysée, elle va en placer trois autres auprès de la CEDEAO, de la CEEAC et de l'Union africaine. L'école navale de Bata avait été initialement créée pour développer un savoir-faire dans le domaine de l'AEM, mais il s'est avéré que les compétences de base étaient encore inexistantes ; pour l'heure, on essaie donc d'y remédier – sachant que, contrairement à Oman ou au Yémen, il n'existe pas de tradition hauturière dans la région. Les populations et les gouvernements ont donc besoin de s'approprier progressivement les compétences pour être ensuite capables de gérer seuls ces questions.

La première chose que nous les aidons à faire, c'est à mettre en place un système administratif et judiciaire : à savoir, l'AEM à la française, qui consiste à mettre en synergie toutes les institutions du pays – forces armées, marine marchande, police, gendarmerie, douanes, justice, administration des transports, de la santé, etc. En France, il nous a fallu vingt-cinq ans pour y parvenir – cela a débuté à la suite du naufrage de l'Amoco Cadiz en 1978 –, mais cela marche très bien aujourd'hui.

Il faut ensuite développer des capacités de gestion interministérielle des crises et prévoir des capacités d'intervention : c'est sur ce dernier point qu'intervient l'école de Bata. Sur le premier, nous envisageons désormais de soutenir la création d'un collège international dédié à l'AEM.

Mais il faut aussi des moyens. C'est pourquoi nous incitons les marines de ces pays à s'équiper, qui avec OCEA, qui avec Constructions mécaniques de Normandie (CMN), qui avec DCNS, qui avec Piriou. Nous associons donc à notre action non seulement la DGA, mais surtout des entreprises de taille intermédiaire – qui, dans ce domaine, sont plus appropriées. Nous avons ainsi organisé le 24 janvier dernier une réunion ouverte à toutes les entreprises susceptibles d'être intéressées par ces questions ; soixante y ont participé. Nous leur avons expliqué comment obtenir ces marchés, soit directement, soit en passant par l'Union européenne.

Pour ce qui est des accords de défense, vous êtes mieux placés que moi pour savoir s'ils ont été ratifiés par le Parlement.

Plutôt que de « maintien de l'ordre », on parle désormais de « gestion démocratique des foules ».

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