Intervention de Valérie Niquet

Réunion du 11 février 2014 à 17h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Valérie Niquet, maître de recherche à la FRS :

Pour revenir sur la question précédente, je souligne que la première mission assignée à l'Armée populaire de libération (APL) est la défense du système politique. C'est ce qui m'a conduit à soutenir que la Chine occupait une position intermédiaire entre les grandes puissances nucléaires et ces États qui considèrent que l'arme nucléaire, même peu développée, est suffisamment dissuasive pour préserver l'existence de quelque régime politique que ce soit.

Même si les limites de sa puissance restent bien réelles, la Chine développe aujourd'hui, vous avez raison, ses capacités militaires. Son budget militaire avoisine, officiellement, les 114 milliards de dollars : c'est le deuxième budget militaire du monde après celui des États-Unis ; ce n'est pas négligeable, surtout si l'on calcule en parité de pouvoir d'achat – les pensions des vétérans chinois étant évidemment moins onéreuses pour le budget de l'État que celles des vétérans américains – et si l'on prend en considération le fait que le pays ne mène pas d'opération extérieure.

Ses voisins nourrissent donc des inquiétudes : à l'inverse de ce qui se passait dans les années 1970 et 1980, une grande majorité des pays de la région accueille avec enthousiasme le rééquilibrage de la stratégie américaine vers l'Asie. Hormis la Chine et la Corée du Nord bien sûr, ils veulent que les États-Unis les protègent. On peut certes s'interroger sur l'efficacité du bouclier américain, même si les États-Unis insistent officiellement sur la solidité de leur engagement, et, au Japon notamment, il existe des débats sur l'opportunité de développer une capacité de dissuasion autonome, mais sans que cela ait une traduction politique, l'opinion publique n'étant pas prête du tout à aller dans cette direction. Les Japonais, comme les Sud-Coréens, sont plutôt favorables à la présence de bases américaines : si leur pays était attaqué, des vies américaines seraient en jeu et il est très probable que les États-Unis réagiraient.

Dans les années 1980, la Chine a tout fait pour bloquer la constitution du bouclier antimissile américain ; elle a même essayé d'entraîner à sa suite la Russie mais, à l'époque, celle-ci était plus qu'aujourd'hui tournée vers l'Occident et Vladimir Poutine avait accepté que les États-Unis se retirent du traité ABM. La Chine s'est donc retrouvée un peu seule, mais elle n'a pas non plus, comme elle avait menacé de le faire, multiplié le nombre de ses ogives nucléaires. En revanche, elle essaye aujourd'hui de développer des armes qui pourraient percer ce bouclier et réfléchit à la possibilité de se doter de ses propres armes antimissile, avec l'aide de la Russie.

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