Les libraires sont favorables à cette proposition, les éditeurs beaucoup moins ; il y a donc un terrain d'entente à trouver sur cette proposition pertinente.
Concernant les soutiens au secteur, et face à la multiplicité d'intervenants et de dispositifs, une coordination est devenue nécessaire. Sans méconnaître le principe de libre administration des collectivités territoriales, une meilleure articulation entre l'action de l'État et celle des collectivités permettrait d'apporter plus de cohérence sur tout le territoire et surtout de dresser une cartographie des points de vente. Il serait judicieux d'instituer un chef de file, voire un interlocuteur unique, au travers d'une structure existante afin de mieux répartir les rôles, pour, là encore, plus d'efficacité. Ce qui est certain, c'est que ces différents soutiens doivent faire l'objet d'un suivi.
Quant à la librairie, elle doit devenir un commerce rentable et, en conséquence, s'organiser pour s'adapter à sa zone de chalandise et s'orienter vers une stratégie de l'offre. Il est essentiel que les libraires se regroupent, se fédèrent afin de réaliser leurs achats groupés auprès des distributeurs pour obtenir de meilleures conditions de remise.
D'autre part, une vraie réflexion doit être menée sur la loi du prix du livre, détournée par des opérateurs de vente en ligne qui incluent les frais de livraison dans la remise de 5 %. Cette loi doit mériter son titre : le « prix unique » !
N'oublions pas que 13 % des ventes s'effectuent en ligne aujourd'hui. L'échec du portail « 1001libraires.com » doit être surmonté et une alternative trouvée, afin d'éviter qu'une part de marché croissante ne soit détenue par un opérateur unique, en situation monopolistique.
Enfin, le libraire se doit de répondre à la demande du livre numérique pour élargir son offre et offrir un service supplémentaire, complémentaire au livre physique. Il s'agit bien là de complémentarité.
Savez-vous, mes chers collègues, que 500 millions de livres sont édités chaque année, dont 400 millions sont vendus et 100 millions partent au pilon ? L'essayiste et romancier Pierre Jourde a écrit : « Le vingt-et-unième siècle a sacralisé l'individu et le livre, et c'est lui qui, en même temps, a inventé les méthodes industrielles de leur destruction. »
Saviez-vous que la boîte qui contient les précieuses chaussures qui vous ont fait un clin d'oeil totalement irrésistible dans la vitrine d'une boutique, mesdames, ou encore la boîte qui tient au chaud la pizza commandée un soir parce qu'il n'y a plus rien dans le frigo, sont remplies de mots, de poésie, de tranches de vie, d'histoires que tant d'écrivains ont rêvé de partager ? Ce sont des livres tout simplement ! Ils racontent leur histoire dans l'histoire, celle de leur triste fin de vie au fond d'une décharge. Ils vous racontent comment ils ont été broyés, compactés, empilés en balles d'une tonne, vendus au poids, avant d'être mis en boîte, triste jeu de mots !
À défaut de faire parler ces boîtes – je suis tout de même sûre que vous les regarderez différemment –, ces chiffres interpellent. La situation qu'ils décrivent constitue une opportunité pour qui souhaite développer une politique aussi ambitieuse que volontariste de valorisation de la lecture comme vecteur de réussite sociale, d'épanouissement personnel. Pourquoi ne pas s'inspirer de la Nouvelle-Zélande, qui distribue des ouvrages personnalisés, avec le nom du destinataire ? Car ça marche !
Alors, on se prend à rêver : et si seulement deux petits pour cents de ces ouvrages français voués au pilon pouvaient faire le bonheur de celles et ceux qui ne peuvent pas s'offrir de livres ! Quelle belle preuve d'incitation à la lecture nous donnerions ! Il s'agit d'une autre piste de réflexion ; je souhaite que l'on s'y intéresse et que nous tentions, tous ensemble, de la mettre en oeuvre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI et sur de nombreux bancs du groupe SRC.)