Intervention de Guy Landmann

Réunion du 12 février 2014 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Guy Landmann, directeur-adjoint du GIP Ecofor :

Nos concitoyens sont sensibles, je crois, à la question des changements climatiques et de leurs conséquences sur la forêt. Mais, vous l'avez constaté, ces conséquences sont très complexes et donc difficiles à traiter : à nous de trouver les moyens de le faire.

La forêt peut-elle disparaître ? Tout dépend de l'élévation de la température ; le scénario le plus probable n'est pas celui d'un effondrement massif de la ressource, mais plutôt d'une accélération des dépérissements qui, au lieu de concerner un à deux millions de mètres cubes, en feraient disparaître dix millions, puis cinquante… Certes, les tempêtes hors normes de 1999 ont mis à terre 170 millions de mètres cubes, mais des pertes de 20 ou 30 millions de mètres cubes qui ne seraient pas liées à des tempêtes n'en seraient pas moins très significatives. Plus qu'à une catastrophe soudaine, il faut donc plutôt s'attendre à une baisse de production d'une partie importante de la forêt française, notamment dans le sud : cela fera moins de bruit, mais n'en sera pas moins sensible. Le prochain rapport de l'ONERC, que vous recevrez bientôt puisqu'il est envoyé au Parlement et au Premier ministre, sera consacré à la forêt, et un chapitre y présentera ce que pourrait devenir la forêt française en 2100.

Quelles politiques forestières faut-il aider, et comment améliorer notre efficacité en matière d'atténuation ? Il a été opportunément rappelé que la forêt captait l'équivalent de 10 à 15 % de nos émissions annuelles de CO2, ce qui est considérable. Il existe aujourd'hui des politiques visant à favoriser la biodiversité, mais aussi la transition écologique, donc entre autres choses l'utilisation accrue de bois pour l'énergie. Une action efficace en faveur de la forêt, c'est aussi, nécessairement, un soutien à la filière et à l'emploi. Tous les plans que nous pouvons élaborer n'ont de chances de succès que s'ils s'appuient sur une politique de développement forestier économiquement et territorialement cohérente. Mais il sera à coup sûr difficile de conserver les performances actuelles de la forêt française dans tous les domaines – énergie, captation de carbone, biodiversité, emploi…

Nous disposons maintenant d'un arsenal de plans régionaux : du point de vue administratif, le travail est fait. En revanche, nous sommes moins bons – moins bons que nos collègues canadiens, par exemple – pour impliquer toutes les parties prenantes : nous tâtonnons. On réalise cependant de plus en plus de prospectives – le ministère de l'agriculture a par exemple publié un rapport sur ce que pourrait devenir la forêt française entre 2050 et 2100 – et ce type d'exercice permet de faire prendre conscience à tous les acteurs des évolutions possibles et, ainsi, de les motiver.

L'outre-mer est effectivement trop souvent oublié ; à Ecofor, nous essayons systématiquement soit de traiter cette question, soit d'expliquer pourquoi nous ne le faisons pas – dans le rapport « Connaissance des impacts du changement climatique dans la France métropolitaine », c'est parce que le marché ne nous avait pas été attribué… Mais nous travaillons aujourd'hui à une synthèse des indicateurs de gestion de la forêt – couvrant donc la question du changement climatique – dans tous les outre-mer – domaine extraordinairement vaste.

Ecofor anime en effet, pour le compte du ministère de l'écologie, le programme « Gestion et impacts du changement climatique » (GICC), dans lequel nous poussons l'interdisciplinarité très loin : les sciences sociales y interviennent au même niveau que les sciences dures, ce qui est assez remarquable.

En matière de recherche et développement comme en matière de traduction concrète des résultats de nos recherches, nous ne sommes pas au bout de nos peines, je le reconnais. Je veux toutefois mentionner le travail du réseau mixte technologique AFORCE, « Adaptation des forêts au changement climatique », qui rassemble forestiers et chercheurs. Il existe en tout cas une volonté forte chez les acteurs du secteur forestier de prendre cette question à bras-le-corps. Mais c'est aussi une affaire de moyens !

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