La guerre, c’est de la souffrance. La guerre, c’est de la chair humaine qui part en lambeaux, ce sont les souffrances de ceux qui restent dans l’attente. C’est l’orphelin, c’est la veuve, c’est celle ou celui qui verra sa vie complètement bouleversée.
Je vous fais part de mes convictions – j’ai un peu abandonné mon discours écrit car je voulais peser mes mots. J’avais peut-être même la prétention, mon cher collègue rapporteur, de vous convaincre que, tout en respectant votre signature et celles d’un certain nombre de nos collègues, le grand service qu’on peut rendre aujourd’hui à nos anciens, c’est de leur dire simplement qu’ils ne sont pas oubliés, que la Voie sacrée est inscrite à jamais sur ces bornes qui n’ont pas changé d’aspect depuis le premier jour, depuis l’inauguration à Bar-le-Duc de la borne kilométrique « Voie sacrée » par Raymond Poincaré.
Cette borne, elle porte le nom de Verdun. Cette borne porte aussi la palme de la victoire. Était-ce d’ailleurs une victoire ? De l’homme sur l’homme peut-être, mais les deux armées étaient exsangues.
Cette borne, elle a un bandeau rouge – comme d’ailleurs les routes nationales. Cette borne, elle est toujours là.
En plus, le conseil général fait de la pédagogie. Sur les délaissés, il y a ces silhouettes de soldats et de camions Berliet ou Latil. Il y a des panneaux pédagogiques, parce que le passant s’arrête, interpellé par le casque Adrien qui couronne cette borne kilométrique.
Cette borne, on l’a tant vue qu’on oublierait presque de la regarder. Or, non seulement on la regarde, mais on s’arrête, on essaie de comprendre. C’est une oeuvre pédagogique, une oeuvre de mémoire. C’est cela, la Voie sacrée et personne ne lui enlèvera, qu’elle soit départementale ou nationale.
Oui, mes chers collègues, le sort de ce projet n’est pas le plus important.