Intervention de Thierry Braillard

Réunion du 19 février 2014 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThierry Braillard, rapporteur :

En effet.

Je répondrai à M. Accoyer que, lorsqu'il a voté les dispositions relatives à la rupture conventionnelle, il a ajouté des articles au code du travail. De même, nous en avons ajouté hier soir en examinant la proposition de loi visant à renforcer la responsabilité des maîtres d'ouvrage et des donneurs d'ordre dans le cadre de la sous-traitance et à lutter contre le dumping social et la concurrence déloyale. Mais il faut savoir : soit il vote pour, et il assume ; soit il vote contre, et il assume…

Monsieur Robiliard, il est exact que la conférence sur « La justice du XXIe siècle » a évoqué la réforme prud'homale, notamment la constitution d'une juridiction sociale intégrant les prud'hommes et les tribunaux des affaires de sécurité sociale.

Par ailleurs, si j'approuve l'ensemble de vos propos, je tiens à apporter une précision : le référé permet de trancher dans l'urgence et à titre provisoire. Le juge des référés n'étant pas juge de l'imputabilité, ce n'est pas à lui d'apprécier au fond la rupture du contrat de travail.

Monsieur Cherpion, vous avez dit que, si les délais étaient normaux, ma proposition de loi n'aurait pas lieu d'être, et vous vous êtes interrogé sur l'avenir de l'audience de conciliation. Mais, lorsqu'il y a prise d'acte de rupture et que le salarié a saisi le conseil des prud'hommes sur l'imputabilité de la rupture, à quoi pourrait servir cette audience ? Le salarié demande que la rupture soit jugée imputable à son employeur – ce qui lui permettra ensuite, par exemple, de demander des dommages-intérêts pour rupture abusive. Le bureau de conciliation a pour mission de rapprocher les parties, mais n'a pas le pouvoir de dire, à cette étape de la procédure, qui a raison ou qui a tort. Voilà pourquoi, dans le cas précis d'une prise d'acte de rupture, l'audience de conciliation n'a pas d'utilité. Autant aller directement, dans le mois qui suit, devant le bureau de jugement, qui est seul juge de l'imputabilité et qui pourra dire si la rupture est une démission ou un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Monsieur Roumegas, il est précisé, dans l'exposé des motifs, que Pôle emploi peut prendre en charge le salarié en cas de défaut de paiement de salaire. Encore exige-t-il que le salarié saisisse auparavant la formation des référés des prud'hommes, pour se présenter avec une ordonnance de référé condamnant l'employeur à payer le salaire qui lui est dû – conformément à l'accord d'application n° 14 de l'UNEDIC. Dans ces conditions, Pôle emploi lui versera une allocation de chômage dans l'attente du jugement qui interviendra sur la prise d'acte de rupture. Le salarié est ainsi obligé de lancer deux procédures aux prud'hommes, une procédure en référé et une procédure au fond, alors même qu'il rencontre des difficultés et qu'il n'est pas forcément pris en charge par l'aide juridictionnelle. Ce n'est pas simple, mais c'est la seule méthode possible.

Madame Orliac, vous vous êtes interrogée à propos du délai d'un mois, que certains considèrent comme intenable. Il est vrai que tout le monde devra y mettre du sien, y compris les avocats, qui gagneraient à modifier un peu leurs habitudes : il serait sans doute utile que, au moment où ils saisissent la juridiction, ils fournissent des explications écrites – ce qu'ils ne font pas à ce jour – pour éviter des renvois et l'allongement de la procédure.

Madame Le Callennec, je n'ai pas la prétention de résoudre le problème des juridictions prud'homales avec cette proposition de loi. Mais celle-ci pourrait constituer un signal, comme le disait Mme Orliac, une occasion de montrer que nous sommes conscients de la réalité du problème et de la nécessité d'y remédier.

Ensuite, ni la Chancellerie ni le ministère du travail ne nous ont fourni de statistiques sur le nombre de prises d'acte de rupture. Nous n'en possédons que sur le nombre de ruptures conventionnelles, fournies par les DIRRECTE. Quant aux conseils de prud'hommes, ils ne précisent pas les motifs des recours engagés – licenciement, prise d'acte de rupture, etc.

Enfin, je répondrai par la négative à votre question sur l'impact que pourrait avoir cette proposition de loi sur l'assurance-chômage. Une plus grande rapidité dans le traitement des dossiers ne changera rien, dans la mesure où le fait de dire s'il s'agit d'une démission ou d'un licenciement continuera à relever de la libre appréciation des juges prud'homaux.

Madame Louwagie, vous avez craint que cette proposition constitue un appel d'air : mais, je le répète, c'est au juge qu'il appartient de trancher.

Sur les délais, il faut signaler que lorsqu'un salarié saisit le conseil de prud'hommes de Lyon ou celui de Paris d'une demande de requalification, il est convoqué en bureau de jugement dans le mois qui suit, voire dans les six semaines, conformément à la procédure. C'est ensuite que le traitement du dossier diffère. À Lyon, dans 99 % des cas, le renvoi, s'il est demandé, a lieu dans le mois qui suit. À Paris, le président du conseil de prud'hommes nous a dit que, si le renvoi était demandé, c'était que l'une des parties n'avait pas été diligente et que, par conséquent, le dossier était renvoyé à un an. Il est insupportable de constater que, pour une même demande, le dossier est traité différemment, selon que l'on se trouve à Lyon ou à Paris – d'autant que les différences de délais ne s'entendent pas en mois, mais en années…

Monsieur Tian, je ne peux pas vous laisser dire que les conseils de prud'hommes ne fonctionnent pas. Je veux saluer leurs juges, qui travaillent parfois dans des conditions difficiles et font de leur mieux. Pour autant, je pense qu'il y a des efforts d'organisation à faire, afin de respecter les délais.

Enfin, ne confondons pas la rupture conventionnelle qui est une procédure amiable, avec la prise d'acte ou la résiliation qui supposent l'existence d'un litige, ce qui signifie que l'on n'est pas capable de signer une rupture conventionnelle. On ne peut pas les traiter de la même façon.

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