Compte tenu du temps limité qui nous est imparti, je me réserverai la possibilité de répondre par écrit aux questions auxquelles je n'aurais pu apporter de réponse aujourd'hui.
S'agissant des montants que nous comptons récupérer, je ne peux retenir le calcul par la règle de trois que vous évoquez dans la mesure où elle comporte une marge d'erreur, ce calcul dépendant du montant des avoirs de tous les dossiers et de la situation fiscale de chacun. Par ailleurs, compte tenu de ce qu'il y aurait près de 80 000 comptes à l'étranger, on peut se dire que le chiffre de 15 000 dossiers que j'ai évoqué n'est pas définitif et que ceux qui ont les plus grosses fortunes sont ceux qui réfléchissent le plus longtemps avant de se mettre en conformité. Dès lors, on peut penser que les dossiers de déclaration spontanée vont continuer à nous parvenir et que, plus le temps passera, plus ils seront substantiels.
J'en profite d'ailleurs pour dire à ceux qui ont les comptes les plus garnis que chaque minute qui passe s'inscrit dans un compteur qui tourne à leur désavantage ; le temps de leur réflexion donne lieu à un taux d'intérêt bien différent de celui des banques dans lesquelles les avoirs sont placés. Je les invite donc à se régulariser au plus vite.
Reste que le flux des dossiers qui nous parviennent est significatif et les sommes potentiellement récupérables importantes.
Monsieur de Courson, au travers des accords Rubik, les Suisses nous ont proposé un prélèvement sur les avoirs déposés sur leurs comptes : cela nous garantissait une recette, en contrepartie de laquelle les déposants ne seraient pas inquiétés et le secret bancaire pas remis en cause. Comme ces accords étaient une forme d'amnistie qui ne disait pas son nom et se dissimulait derrière des perspectives de gain significatives pour les États signataires, ceux qui les ont proposés ont eu tendance à majorer fortement le niveau des avoirs déposés et les perspectives de gain. Cela est très classique et très habile, mais ce n'est pas une raison pour tomber dans le piège ! Surtout si l'on compare ce qu'on nous promet en contrepartie du secret bancaire à ce que l'on est sûr de récupérer si on reste ferme dans la plus grande transparence. Vous en étiez d'ailleurs d'accord. Il ne faut avoir aucune naïveté à cet égard.
Quant au raisonnement consistant à dire que c'est parce que les autorités helvétiques ont incité leurs clients à se rapatrier que ceux-ci le font, je pense que si telle était vraiment leur intention, la manière la plus sûre serait de signer une convention d'échange automatique d'informations – ce qui n'a pas été fait jusqu'à présent. Nous souhaitons d'ailleurs renforcer notre pression avec tous nos partenaires pour l'obtenir, à l'instar de ce qu'ont fait les États-Unis.
Je comprends que lorsqu'on est dans l'opposition, on ait tendance à trouver des raisons externes au succès de ce qui est fait par la majorité. Je n'exprime d'ailleurs aucune satisfaction excessive en la matière car nous voulons obtenir plus, voire le rapatriement de la totalité des avoirs. Mais je ne remercierai pas des partenaires extérieurs – qui ne sont pas encore totalement des partenaires – pour les résultats que nous avons obtenus du fait de notre détermination.
Nous poursuivrons et intensifierons les relations avec la Suisse. Nous nous y rendrons d'ailleurs prochainement avec Pierre Moscovici pour évoquer cette question avec les autorités de ce pays et maintenir les pressions nécessaires pour atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés.
S'agissant de la DNVSF et du rapport de la Cour des comptes, qui s'interrogeait notamment sur les conditions de la transaction, le service dont nous disposons fait un travail extraordinaire avec un niveau de professionnalisme reconnu. En outre, la circulaire que j'ai prise ne laisse aucune place à la transaction et la présente réunion témoigne de la volonté que nous avons de rendre compte de tous les aspects de la régularisation.
D'ailleurs, monsieur Cherki, quand nous aurons un échantillon suffisamment large, nous communiquerons les données sur la structure des patrimoines et le montant des sommes obtenues au regard des avoirs, ce qui permettra au Parlement de mesurer les conditions dans lesquelles les pénalités, les amendes et les impôts ont été recouvrés.
Nous progressons considérablement sur ce point : je m'en réjouis car c'est le résultat d'un travail commun entre le Gouvernement et le Parlement et cela témoigne de la reconnaissance par le premier des prérogatives de contrôle du second. C'est aussi une manière de montrer qu'il n'y a pas un verrou à Bercy et un écrou ailleurs : il y a à Bercy une catapulte qui envoie vers la justice ceux qui doivent y être renvoyés et des fonctionnaires appliquant le droit dans toute sa rigueur.
Enfin, je suis tout à fait prêt, monsieur le président, à rendre compte devant votre commission des conditions dans lesquelles nous obtenons des résultats dans la lutte contre la fraude des entreprises, ainsi que de l'efficacité des outils dont nous nous sommes dotés à cet effet – ce serait à la fois utile et intéressant. Je rappelle que nous avons adopté soixante mesures de lutte contre la fraude depuis le début du quinquennat, dont plusieurs ne concernent pas que les particuliers.
Si parfois nous avons eu des débats de droit sur des dispositions destinées à lutter contre l'optimisation ou la fraude, jamais ils n'ont fait apparaître entre nous une différence de volonté. Si j'ai souhaité avoir ces débats, c'est parce que j'ai estimé important, dès lors que nous étions déterminés à mener cette lutte, de faire en sorte que les outils juridiques dont nous nous dotions ne fassent l'objet d'aucune contestation. Car si on veut réussir ce combat, il ne faut s'exposer à aucun risque juridique. Nous aurons donc encore des débats de ce type, tant notre détermination est forte dans ce domaine.