Intervention de Marc Dolez

Séance en hémicycle du 24 février 2014 à 16h00
Redonner des perspectives à l'économie réelle et à l'emploi industriel — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Dolez :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour cette lecture définitive, mon propos sera relativement bref dans la mesure où, lors des lectures précédentes, mes collègues Patrice Carvalho et André Chassaigne ont largement expliqué l’appréciation que les députés du Front de Gauche portent sur ce texte. Cette proposition de loi n’apporte pas, selon nous, une réponse qui soit véritablement à la hauteur de la situation et des difficultés industrielles que connaissent nos territoires.

Comme vous l’avez rappelé, madame la rapporteure, la prééminence des stratégies financières sur les projets industriels a depuis de nombreuses années des conséquences dramatiques dans de multiples bassins d’emploi. En dix ans, l’industrie française a effectivement perdu 750 000 emplois, et sa part dans la valeur ajoutée est passée de 18 à 12,5 %. Malheureusement, l’hémorragie se poursuit.

Les fermetures de sites industriels que nos territoires subissent de plein fouet sont avant tout des drames humains. Je pense en particulier à cet instant au site de Corbehem, dans le Pas-de-Calais, site rentable du groupe papetier finlandais Stora-Enso, qui en a annoncé en début d’année la fermeture, plongeant ainsi 330 salariés et leurs familles dans le désarroi. De telles fermetures représentent un traumatisme pour les salariés, pour leurs familles, elles provoquent aussi, parce que l’activité disparaît, un véritable choc pour les habitants, pour les élus locaux, souvent désemparés et impuissants.

La financiarisation de notre économie est le résultat d’une logique qui conduit à favoriser les intérêts financiers à très court terme et à sacrifier, hélas, notre outil industriel, la recherche et l’innovation.

Je ne reviens pas sur la genèse même de cette proposition de loi, qui montre combien est grand l’écart entre les objectifs initialement affichés et le dispositif finalement proposé. Celui-ci ne concerne en effet que les entreprises et établissements d’au moins 1 000 salariés ou appartenant à des groupes ayant un tel effectif. Cela exclut d’ores et déjà un grand nombre d’entreprises et de groupes. Le dispositif ne concernera que 1 500 entreprises au plus et aura un impact sur 15 % des plans de sauvegarde de l’emploi et sur 30 % seulement des personnes touchées par ces PSE.

Le texte instaure certes une obligation de rechercher un repreneur, mais il ne s’agit que d’une obligation de moyens. Les sanctions prévues ne sont guère dissuasives puisqu’il est question d’un montant ne pouvant dépasser vingt fois le SMIC par emploi supprimé, dans la limite de 2 % du chiffre d’affaires annuel de l’entreprise. À titre de comparaison, Continental a dépensé 50 millions d’euros pour fermer son site de Clairoix, soit quarante SMIC nets par emploi supprimé.

En réalité, le mécanisme permettra aux employeurs qui refusent de revendre le site à un concurrent d’anticiper et d’intégrer le coût de cette pénalité dans le plan social. Il est donc à craindre que le dispositif n’ait qu’un effet marginal sur ces stratégies que nous connaissons bien.

Comme nous ne cessons de le répéter, pour endiguer cette hémorragie industrielle, il n’y a pas d’autre solution, selon nous, que de mettre en place un arsenal juridique et législatif permettant à l’administration ou au juge d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement, interdisant les licenciements boursiers, comme nous l’avions proposé l’an dernier dans une proposition de loi qui n’a malheureusement pas été votée par notre assemblée,…

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