Intervention de Meyer Habib

Séance en hémicycle du 24 février 2014 à 16h00
Redonner des perspectives à l'économie réelle et à l'emploi industriel — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMeyer Habib :

Et malgré le coup de semonce de la baisse de 77 % des investissements étrangers en 2013, qui a été rappelé, vous persistez dans l’erreur.

Au groupe UDI, nous avons toujours considéré que la compétitivité constitue la clé de voûte pour relancer notre industrie. La compétitivité passe par une baisse massive et immédiate des charges qui pèsent sur les entreprises afin de libérer l’activité, et leur permettre de lutter à armes égales avec nos principaux concurrents. Le rapport Gallois sur la compétitivité de l’industrie française vous offrait cette possibilité ; nous regrettons vivement que vous ne l’ayez pas saisie.

Nous devons également renouer avec une véritable stratégie de valorisation des filières, en amont et en aval, et investir davantage dans l’innovation et la recherche pour redonner du souffle et des perspectives d’avenir à notre industrie qui décroche. Malheureusement, ce texte nous semble archaïque. Il poursuit deux objectifs : d’une part, garantir que des sites industriels rentables ne puissent être fermés pour des raisons stratégiques et financières sans que tout ait été fait pour trouver un repreneur et, d’autre part, favoriser l’actionnariat de long terme.

Je me concentrerai sur le premier de ces deux volets. L’article 1er de ce texte consiste à alourdir considérablement les contraintes qui pèsent sur les entreprises souhaitant fermer l’un de leurs établissements, avant d’ouvrir une phase juridictionnelle au cours de laquelle l’employeur qui aurait refusé des offres de reprise se retrouverait lourdement sanctionné – la pénalité pouvant atteindre 20 SMIC par emploi supprimé, dans la limite de 2 % du chiffre d’affaires annuel de l’entreprise. Ce dispositif ne permettra pas de maintenir l’activité, hélas. Si le texte avait été en vigueur au moment de l’affaire Mittal, l’issue aurait-elle été différente ou plus favorable pour les salariés du site ? Très probablement, non. Il suffit d’avoir quelques rudiments de compréhension de l’économie pour s’en rendre compte. Par ailleurs, l’impact négatif des nouvelles obligations et sanctions prévues dans cet article serait de nature à peser bien plus lourdement sur l’ensemble de l’économie que les quelques bénéfices imaginaires tirés d’un raisonnement archaïque !

Nous nous étonnons de votre volonté délibérée de ne pas mener d’étude d’impact sur le dispositif que vous proposez. Cherchez-vous donc à cacher un résultat qui ne peut qu’être négatif ? Nous nous étonnons également que vous reveniez sur les conditions d’examen des offres de reprise des sites qui envisagent une fermeture, alors même que le sujet avait été traité dans le cadre de l’accord national interprofessionnel du mois de janvier 2013, dans son article 12. Vous vous apprêtez déjà à alourdir la législation, quand l’ensemble des acteurs économiques du pays vous demandent plus de stabilité normative, conformément au choc de simplification annoncé et toujours attendu à ce jour.

Les obligations nouvelles et les sanctions que vous faites peser sur les dirigeants d’entreprise dans le cadre de la recherche d’un repreneur sont juridiquement fragiles, inutiles en termes de sauvegarde d’emplois et dangereuses économiquement.

Fragiles, d’abord, car si le Conseil d’État et nos travaux parlementaires ont permis de corriger les failles les plus flagrantes de votre dispositif, un grand nombre d’imprécisions restent encore à lever, et nous craignons que votre texte ne soit une nouvelle source de contentieux et un nouveau facteur de judiciarisation de l’économie – le Conseil constitutionnel ne manquera pas de vous le rappeler.

Inutiles en termes de sauvegarde d’emplois, ensuite, car de l’aveu même des rapporteurs, les sanctions ne concerneront qu’un nombre marginal de sites alors que les nouvelles contraintes s’imposent à tous. En alourdissant les procédures et les délais, ce texte pourrait avoir des conséquences contre-productives à l’égard d’éventuels repreneurs, dissuadés par la lourdeur de ces nouvelles contraintes.

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