Intervention de Germinal Peiro

Réunion du 25 février 2014 à 19h15
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGerminal Peiro, rapporteur pour avis :

Ce texte, qui nous est soumis pour avis – la commission du développement durable étant saisie au fond –, nous ramène en effet quelques années en arrière, et ce n'est pas sans émotion que je me souviens de la mission que nous avions effectuée sur le sujet avec Antoine Herth. Il s'agit d'une proposition de loi qui ne devrait pas faire polémique entre nous, dans la mesure où elle s'inscrit dans la continuité de l'action menée par les gouvernements successifs ces dernières années. Elle entend, dans une certaine urgence, prolonger le moratoire sur le maïs MON810, autorisé pour dix ans en 1998 sur la base de la directive 90220CEE, qui n'avait pas les mêmes exigences environnementales que celle qui l'a remplacée en 2001. Une demande de renouvellement est en cours depuis plusieurs années.

L'Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) a, à plusieurs reprises, estimé que la culture de ce maïs avait un impact sur la résistance des insectes ravageurs mais également sur la mortalité d'insectes non cibles. Elle a donc recommandé des mesures de gestion et un renforcement des mesures de surveillance. Le maïs MON810 est, en effet, un maïs pesticide, qui produit lui-même le poison censé tuer les insectes ravageurs, et notamment la pyrale. Malheureusement, d'autres insectes sont touchés, en particulier les abeilles, et ce alors que la filière apicole est en grande difficulté.

Au-delà des questions environnementales, la culture de ce maïs est également contestable d'un point de vue économique, dans la mesure où elle concurrence directement des filières agricoles à forte valeur ajoutée, incompatibles avec les OGM, qu'il s'agisse de cultures biologiques ou de cultures sous label.

Je rappelle que le Conseil d'État a annulé, en août 2013, la mesure d'urgence prise par le précédent gouvernement en 2012, après avoir annulé la clause de sauvegarde prise en 2008 : on peut donc, en 2014, semer du maïs MON810 dans notre pays.

Je dirai un mot de la procédure européenne qui conduit à cette situation ubuesque. Une demande d'autorisation a été déposée par Pioneer pour la mise en culture du maïs 1507 en 2001. C'est un maïs qui résiste à certains insectes ravageurs et est tolérant à un herbicide que l'Europe va interdire.

La Cour de justice de l'Union européenne a condamné la Commission pour avoir retardé la procédure en ne soumettant pas la proposition d'autorisation au vote des États membres. La Commission s'est donc exécutée le 11 février 2014 : sur vingt-huit États membres, cinq seulement – l'Espagne, le Royaume-Uni, la Suède, la Finlande et l'Estonie – se sont prononcés pour, alors même que certains d'entre eux ne peuvent même pas cultiver le maïs ; dix-neuf États membres ont voté contre, et quatre se sont abstenus, dont l'Allemagne. Cette large opposition ne suffit pourtant pas à atteindre la majorité qualifiée permettant de repousser la proposition, chaque État disposant d'un nombre de voix calculé en fonction de sa population. Nous nous trouvons donc dans une situation où cinq États membres décident pour vingt-trois ! La Commission est donc dans l'obligation d'autoriser le maïs 1507.

La procédure européenne comprend de nombreuses lacunes : absence d'évaluation coût-bénéfice, absence d'étude socio-économique, évaluation environnementale de trop court terme et absence de suivi après l'autorisation de mise sur le marché.

La présente proposition de loi n'a qu'un objectif : répondre à l'urgence. Il y a urgence, en effet, les semis de 2014 approchant, à maintenir le moratoire français sur les OGM en interdisant la mise en culture du maïs OGM.

À moyen terme, le ministre de l'agriculture et le ministre de l'écologie se sont engagés à soutenir une proposition de réforme au niveau européen pour réviser la procédure d'autorisation afin que, tout en conservant une évaluation environnementale européenne, il existe, en matière de culture des OGM, une certaine subsidiarité, c'est-à-dire que les États conservent un pouvoir de décision.

Je vous invite donc à adopter cette proposition de loi.

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