L'instruction de la troisième visite décennale des réacteurs de 1 300 MW devrait être close en octobre 2014, soit six mois seulement avant le début du premier arrêt sur le site de Paluel. Il nous semblerait anormal de devoir choisir – pour ce qui est des équipes de travail – entre la fin de l'instruction des dossiers de Flamanville 3I et l'instruction des dossiers du parc en exploitation uniquement à cause des moyens réduits de l'ASN et de l'IRSN, alors qu'il s'agit de deux dossiers fondamentaux pour l'économie française. Je rappelle que la moitié des taxes sur les installations nucléaires de base payées par EDF constituent le budget de ces deux organismes, et qu'EDF acquitte 90 % de cette taxe.
J'en viens aux atouts de la prolongation. Il s'agit de bénéficier, sur le plan économique, d'un coût complet du mégawattheure de 55 euros, pour une énergie nucléaire décarbonée, qui contribue à l'indépendance énergétique du pays. Nous avons bien conscience que nous n'obtiendrons pas d'autorisation de prolongation de l'activité jusqu'à soixante ans dans l'immédiat – la loi relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire donne une visibilité de dix ans, non de vingt. Nous discutons donc avec l'ASN d'une prolongation de dix années, soit un total de cinquante ans. En même temps, nous nous préparons à la situation qui prévaudra au terme de ces cinquante ans. Cela justifie, par exemple, l'installation d'un réacteur de type EPR à Flamanville 3. Il sera intéressant, par ailleurs, de prendre en compte le retour d'expérience dans la conception des futurs réacteurs.
J'ai lu dans la presse que le calendrier du grand carénage aurait fait l'objet de révisions. Nous avons travaillé sur un programme de montée en charge plus progressive que celui initialement envisagé. Nous avons donc lissé le programme pour en renforcer la maîtrise et la faisabilité industrielle, mais aussi la faisabilité financière. Cette courbe revue est actuellement présentée à la Cour des comptes qui vous y donnera accès.
Il existe, monsieur Sordi, d'importantes différences entre les réacteurs de Fukushima et les nôtres, notamment grâce à toutes les améliorations de conception que nous avons apportées depuis les accidents de Three Mile Island et de Tchernobyl. Nous avons mis en place des recombineurs à hydrogène, des filtres à sable, si bien que, en cas de fusion du coeur, notre objectif – et nous sommes en mesure de le tenir très largement – est d'éviter une contamination à long terme des territoires. Je rappelle que les filtres à sable retiennent le césium qui est responsable de la contamination à long terme des territoires autour de Fukushima. Une telle démarche suppose que les exploitants prennent vraiment leurs responsabilités, tant dans le design initial que dans ses évolutions.
À ce titre, je rappellerai un fait que vous ignorez peut-être. Fukushima se trouvait à 120 kilomètres de l'épicentre du séisme. On oublie que la centrale d'Onagawa, exploitée par le groupe japonais Tohoku Electric Power Company, se situait, elle, à 60 kilomètres de l'épicentre et a subi une vague beaucoup plus importante. Seulement, Tohoku est un exploitant responsable et avait étudié les précédents tsunamis, concluant qu'il fallait caler les plateformes des trois centrales à quinze mètres de hauteur, même si, d'un point de vue économique, il faudrait tenir compte du coût du pompage de l'eau pour l'apporter à bonne hauteur. La sûreté, à ses yeux, devait primer. Bilan : le site d'Onagawa a subi un tsunami de quatorze mètres et n'a donc pas été inondé. En revanche, les villages alentour l'ont été et la population s'est réfugiée… dans la centrale.