Nous avons en effet estimé l'âge moyen des centrales à trente-cinq ans. Mais nous avons beaucoup travaillé à l'extension de leur durée de vie. Cette décision ne relève pas d'une politique du Royaume-Uni mais du projet industriel de l'exploitant, qui tient compte des coûts de démantèlement et de l'appréciation qu'il fait de l'équilibre économique de la centrale. Nous sommes actuellement autour de trente-huit ans et nous pourrons même peut-être étendre cette moyenne à quarante-deux ans. En ce qui concerne le parc actuel, nous voulons nous assurer que les centrales pourront prolonger leur activité au-delà. À l'origine, il était prévu que les réacteurs AGR (advanced gas-cooled reactors) auraient une durée de vie de vingt-cinq ans, et les perspectives d'extension de la durée de vie sont similaires, en proportion, à celles avancées pour les réacteurs à eau pressurisée.
J'en viens à la variation des estimations de coût. Si je compare ce que l'on peut appeler la conjecture initiale du ministère de l'énergie à l'estimation robuste issue de tous nos travaux, je pense qu'il n'est pas juste d'y voir une augmentation. Nos propres estimations du coût de construction de la centrale de Hinkley Point – fondées sur les données de conception et les informations résultant des appels d'offres auprès des fournisseurs – sont restées très cohérentes au fil du temps et n'ont guère varié au cours des négociations avec les pouvoirs publics. On ne saurait donc parler d'augmentation sensible, même s'il y a eu des spéculations en ce sens à un certain moment. Nous parlons maintenant d'une base de coûts qui a fait l'objet d'un travail détaillé et long et qui a passé avec succès l'examen approfondi du gouvernement, d'experts extérieurs et d'investisseurs.
Le calendrier de construction a également été étudié dans les moindres détails, de l'ingénierie jusqu'à la mise en service, en fonction notamment du calendrier de construction des autres EPR. Ce souci du détail, j'y insiste, est de nature à renforcer la confiance.
La décision est très lourde pour EDF comme pour le Royaume-Uni. Le choix des pouvoirs publics pour les énergies à faible émission de carbone coûte entre 140 livres par MWh pour l'éolien en mer, et 90 livres pour l'éolien terrestre, montants auxquels il faut ajouter le coût systémique de l'intégration au réseau, pour environ 10 livres, ce qui est beaucoup plus cher que le projet de Hinkley Point. Par ailleurs, il est désormais difficile de trouver des sites pouvant se prêter à l'éolien terrestre. Les pouvoirs publics doivent donc parvenir au meilleur équilibre possible et traiter la question du manque de capacité pas à pas. Pour l'heure, le programme britannique prévu par ce contrat est de loin le moins cher.
Cela signifie que, pour EDF, le contrat doit être solide et lui être bénéfique. C'était le principal enjeu du « contract for difference » que d'assurer que les critères d'investissement fixés par le groupe seront bien remplis ; cela prend en compte aussi la perception du risque. L'objectif que nous poursuivons est un dispositif dans lequel nous serons partie prenante au capital ; le mécanisme de garantie publique donnera une assurance de « confort » au capital qui sera apporté et contribuera à la solidité de la structure de capitaux.
Quant au tarif, s'il est de 92,5 livres par MWh pour la première tranche, il devrait baisser pour les suivantes. Le gouvernement britannique et d'autres investisseurs sont très engagés : Hitachi a récemment repris le site de Wylfa au Pays de Galles et investit avec détermination dans la conception du réacteur ABWR. De même, Toshiba a annoncé que Westinghouse nouait des partenariats pour développer le site de NuGen. Ce sont donc deux autres projets qui sont dans les tuyaux au Royaume-Uni.
Les besoins sont tels que nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre. Il faut prendre des décisions, sinon les foyers ne seront plus éclairés ! Nous devons fournir l'électricité à nos clients en émettant le moins possible de dioxyde de carbone grâce à un système sûr et fiable et cela suppose de construire des équipements.
L'examen du projet par la Commission européenne est un passage obligé. Il a déjà commencé et la première phase a été assez courte. Nous pensons que les étapes suivantes avanceront de façon satisfaisante et nous restons relativement optimistes quant au résultat de la procédure. Il ne s'agit d'ailleurs pas seulement de Hinkley Point C, mais, au-delà, de la fourniture en temps et heure d'électricité à faible émission de CO2 et nous sommes tenus d'atteindre l'objectif légalement contraignant de 80 % d'ici à 2050. Nous entendons donc suivre à la lettre les orientations de l'Union européenne.
Comme je l'ai dit, l'accord que nous avons conclu avec le gouvernement nous amène simplement au point où l'investissement devient envisageable et cela doit être pris dûment en considération par l'Union européenne. Nous sommes convaincus que le « contract for difference », dans sa forme actuelle, est essentiel pour la réalisation de notre investissement.
Nous tâchons de tirer tous les enseignements des projets existants. Il convient de tenir compte du contexte de chaque site si l'on souhaite se lancer dans des comparaisons, les situations n'étant pas les mêmes en France, en Finlande et au Royaume-Uni.
En ce qui concerne le mix énergétique, il y a au Royaume uni un marché à court terme qui détermine le mode de production d'énergie à partir de son coût marginal. Le prix du charbon étant inférieur à celui du gaz au Royaume-Uni, la part du charbon a augmenté récemment, ce qui ne fait qu'exacerber le problème puisque les centrales à charbon ont une durée de vie limitée. Il faut garder à l'esprit la nécessité de remplacer le charbon tout en maintenant la fourniture d'électricité. National Grid, qui est responsable de la distribution, a indiqué que, si l'hiver devait être rigoureux, la marge de capacité serait inférieure à ce qui est généralement attendu.