La maintenance des centrales nucléaires en exploitation recouvre à la fois des opérations de maintenance courante et de contrôle des installations, systèmes et matériels, ainsi que le remplacement de gros composants ou des modifications visant à garantir et améliorer régulièrement la sûreté et la disponibilité des installations. Les opérations de maintenance sont effectuées le plus souvent lors des arrêts de tranche, tous les douze à dix-huit mois suivant le type de centrale. En 2012, les dépenses totales d'investissement de maintenance se sont élevées à 2,748 milliards d'euros et le montant des dépenses d'exploitation liées à la sous-traitance à 1,351 milliard d'euros, soit un total de 4,099 milliards d'euros.
L'appel à la sous-traitance pour les opérations de maintenance répond à un triple besoin. Tout d'abord, c'est le moyen de bénéficier des compétences pointues ou rares, acquises et entretenues en permanence, que seuls des constructeurs et des entreprises spécialisées, qui travaillent aussi pour d'autres industriels, peuvent mettre à la disposition d'EDF. Ensuite, la sous-traitance permet de faire face à la forte saisonnalité des arrêts de tranche et donc d'absorber des pics de charge. Pour information, une visite décennale mobilise, à elle seule, plus de 1 500 salariés de différents métiers. Enfin, dans des domaines tels que la logistique ou le nettoyage, la présence permanente sur site de cette main-d'oeuvre spécialisée est un gage d'efficacité dans les périodes d'arrêt de tranche.
Dans tous les cas, EDF conserve la maîtrise technique et industrielle des opérations de maintenance confiées aux entreprises prestataires, ce qui lui permet d'actualiser régulièrement sa politique industrielle. C'est ainsi qu'elle a procédé à la réinternalisation partielle de la maintenance de la robinetterie ou des activités de tuyauterie-soudage, en vue de pérenniser ses compétences de maîtrise d'ouvrage.
Le recours à des entreprises prestataires répond à une politique industrielle qui vise à garantir en permanence la performance dans tous les domaines, et non pas à réduire les effectifs d'EDF. Autrement, pourquoi procéderait-elle à 6 000 recrutements par an, dont 2 000 correspondent à des créations nettes d'emploi ? Un tiers des collaborateurs ainsi embauchés est affecté au domaine nucléaire.
EDF a fait le choix de confier à des entreprises prestataires la majeure partie des opérations de maintenance effectuées dans ses centrales depuis plus de vingt ans. Ces entreprises sont aujourd'hui des partenaires et des acteurs essentiels du parc nucléaire français. En 2012, elles ont effectué 32 millions d'heures de travail et mobilisé régulièrement quelque 22 000 salariés. Plus de 19 500 d'entre eux sont intervenus en zone contrôlée, c'est-à-dire dans la partie nucléaire de l'installation. Pour leur part, les salariés d'EDF étaient 27 000 à être directement affectés au domaine nucléaire, dont 20 000 sur les sites de production.
L'ASN procède régulièrement à des inspections externes sur le recours à des entreprises prestataires.
Depuis plus de quinze ans, EDF et les entreprises prestataires mènent une action commune pour améliorer la radioprotection des intervenants, stabiliser les emplois, détecter d'éventuelles situations de sous-traitance anormale, améliorer la sûreté et la qualité des interventions ainsi que les conditions de travail et de vie des salariés de ces entreprises. À cet effet, depuis le début de 2013, EDF intègre dans ses appels d'offres et ses marchés le cahier des charges social établi en juillet 2012 par le comité stratégique de la filière nucléaire (CSFN).
Les opérations de maintenance sont soumises à des procédures strictes et à de nombreux contrôles internes et externes, prévus notamment par le droit du travail et l'arrêté du 7 février 2012. Celui-ci fixe les règles générales relatives aux installations nucléaires de base, en particulier en matière de contrôles dosimétriques et de suivi médical.
Un processus rigoureux de sélection des entreprises prestataires permet de s'assurer qu'elles ont les compétences nécessaires pour obtenir la qualification requise pour travailler dans les centrales nucléaires. Cette qualification est décernée sur examen d'un dossier d'aptitude remis par l'entreprise, suivi d'un audit complet de celle-ci.
À la fin de l'année 2013, 810 entreprises prestataires de service de toute taille étaient qualifiées pour effectuer des opérations de maintenance sur les centrales nucléaires d'EDF. Elles soutiennent ainsi la filière nucléaire, qui génère directement 220 000 emplois et dont 60 % des acteurs industriels sont en recherche de collaborateurs. Elles contribuent également au renforcement du tissu industriel français. Bon nombre de ces entreprises interviennent, en effet, dans d'autres secteurs d'activité, comme la pétrochimie ou la papeterie, et trouvent dans la maintenance nucléaire un moyen de consolider leur plan de charge et leurs emplois.
EDF impose à toutes les entreprises prestataires travaillant en zone nucléaire d'avoir obtenu la certification du comité français de certification des entreprises pour la formation et le suivi des personnes travaillant sous rayonnement ionisant (CEFRI). Elle appliquera également, dès le 1er juillet 2015, les dispositions de l'arrêté interministériel du 12 décembre 2013, qui renforce la procédure de certification.
En matière de passation de marchés, EDF relève de la directive européenne 2004-17 portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux, qui a été transposée dans le droit français. À cet égard, elle doit respecter les principes généraux de mise en concurrence avec publicité européenne préalable, d'égalité de traitement des candidats, de transparence des procédures et de non-discrimination.
Le dispositif d'analyse des offres mis en place par EDF exclut toute sélection d'une entreprise qui offrirait des prix moins élevés dus à une prestation technique de mauvaise qualité ou non conforme aux exigences techniques et contractuelles d'EDF ou des prix anormalement bas. La règle de base pour l'attribution des marchés est aujourd'hui la « mieux-disance » : les offres ne sont plus évaluées sur le seul critère du prix, mais également sur ceux du professionnalisme, de la sécurité et de la radioprotection, de la protection de l'environnement, des conditions de travail et de l'environnement social des salariés de l'entreprise. De tels critères peuvent peser jusqu'à 20 % dans l'attribution, notamment sur les marchés à forte composante de main-d'oeuvre.
La durée moyenne des marchés de maintenance passés par EDF est aujourd'hui de l'ordre de cinq ans – sept ans pour les marchés de logistique, parfois plus pour les marchés de modification couvrant l'ensemble d'un palier technique. Ces durées longues sont privilégiées pour donner de la visibilité aux entreprises et leur permettre d'investir dans les ressources, les embauches et la formation. EDF s'est d'ailleurs mobilisée au cours de l'année 2013 contre la révision de la directive européenne 2004-17 limitant la durée des marchés à quatre ans.
Au renouvellement de ces marchés, EDF impose désormais aux entreprises « entrantes » la reprise des salariés de l'entreprise « sortante » qui étaient présents de manière permanente sur un site donné pour l'exécution du marché, sur la base du volontariat. Les conditions fixées par EDF pour cette reprise sont définies dans l'appel d'offres : maintien de la rémunération, maintien de l'ancienneté, pas de période d'essai dans la nouvelle entreprise. Cette exigence renforce les dispositions déjà prévues à l'article 10 du cahier des charges social du CSFN.
Six grands groupes français réalisent 50 % du chiffre d'affaires de la maintenance sous-traitée par EDF : Alstom, AREVA, Onet, SPIE, Suez, et VINCI.
Toute sous-traitance doit être déclarée à EDF par l'entreprise prestataire, qui doit répercuter l'intégralité des exigences d'EDF à ses sous-traitants et contrôler les prestations réalisées. Le nombre de niveaux de sous-traitance « en cascade » qui existeraient sur les centrales nucléaires a fait l'objet de nombreuses polémiques. En septembre 2011, EDF a proposé, dans les dossiers d'évaluation complémentaire de sûreté remis à l'ASN, de les limiter à trois pour toutes les opérations de maintenance effectuées sur les centres nucléaires de production d'électricité (CNPE). Cette disposition a été reprise en juillet 2012 par l'ensemble des exploitants nucléaires civils dans le cahier des charges social du CSFN. EDF a décidé de mettre en oeuvre de manière volontariste cette disposition dans tous ses appels d'offres dès le 1er juillet 2012, et de l'imposer également de manière rétroactive à tous les marchés en cours ou en négociation à cette date. Ainsi, depuis le 1er juillet 2012, tout titulaire d'un marché signé avec EDF n'est autorisé qu'à deux niveaux de sous-traitance. Précisons que les salariés étrangers ne représentent, quant à eux, que 6 à 7 % des salariés des entreprises prestataires.
L'arrêté « Installation nucléaire de base » (INB) du 7 février 2012 prévoit que l'exploitant exerce une surveillance sur les intervenants extérieurs exécutant des activités importantes pour la protection des intérêts (AIP). La surveillance opérée par EDF répond à ces exigences. Elle permet également, à la fin d'une opération de maintenance, d'établir une évaluation de la prestation, qui constitue un outil à la fois de dialogue avec l'entreprise prestataire et de retour d'information sur la qualification de l'entreprise prestataire.
En matière de formation à la prévention des risques, pour pouvoir travailler en zone nucléaire ou sur des matériels importants pour la sûreté, tout salarié d'une entreprise prestataire doit avoir suivi un cursus de trois, voire quatre, formations obligatoires aux règles de l'assurance qualité, de la sûreté et de la radioprotection. Quelque 750 000 heures de formation ont ainsi été délivrées en 2012 par quatorze organismes.
En matière de radioprotection et de sécurité, EDF a pour politique d'offrir à tous les intervenants, salariés EDF comme salariés d'entreprises prestataires, les mêmes conditions de travail. Les différences d'exposition aux rayonnements ionisants sont liées aux métiers exercés, non au statut des salariés. Chaque intervenant en zone nucléaire doit obligatoirement porter deux dosimètres. Les données provenant du dosimètre électronique fourni par EDF sont collectées en temps réel, à chaque sortie de la zone nucléaire. Tous les résultats des deux mesures de dosimétrie sont collectés par l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Trois portiques successifs constituent une chaîne complète de contrôles pour s'assurer de l'absence de contamination externe des intervenants.
Depuis 2005, la réglementation française fixe la limite de dose reçue par exposition aux rayonnements ionisants à 20 millisieverts sur douze mois glissants pour les travailleurs du nucléaire. La même limite réglementaire a été retenue en Belgique ; elle est de 20 millisieverts par an en Allemagne et au Royaume-Uni, et de 50 millisieverts par an aux États-Unis. EDF s'est fixé pour objectif qu'aucun intervenant ne dépasse 16 millisieverts par an, instituant un seuil d'alerte à 14 millisieverts.
En 2013, le seuil de 16 millisieverts n'a pas été dépassé, et seulement huit intervenants ont atteint les 14 millisieverts à un moment de l'année, ce qui a déclenché une procédure de concertation avec l'employeur. La même année, la dose moyenne reçue par les intervenants en zone nucléaire qui ont reçu une dose non nulle était de 1,40 millisievert pour les salariés des entreprises prestataires et de 0,50 millisievert pour les salariés d'EDF. Dans les deux cas, elle a été réduite d'un facteur deux en dix ans. Pour information, la limite d'exposition pour le public est de 1 millisievert par an, un habitant de la région parisienne reçoit 2,5 millisieverts par an, et un scanner peut délivrer une dose de plus de 10 millisieverts.
Les travailleurs intérimaires ou en CDD ne sont pas autorisés à travailler dans les zones orange et rouges, où le débit de dose est le plus élevé. Ils bénéficient également d'une disposition particulière dite de prorata temporis, qui détermine une limite de dose proportionnelle à la durée de leur contrat de travail.
Dans le cadre de sa relation avec les entreprises prestataires, EDF a développé, depuis plus de quinze ans, un partenariat avec les sous-traitants marqué par plusieurs étapes clés. En 1997, une première charte de progrès a été signée avec neuf organisations professionnelles ; une seconde a suivi, en 2004, avec treize autres organisations. Cette charte de progrès et de développement durable porte des engagements, notamment en matière de conditions de travail des salariés des entreprises prestataires. Quoique signée avant la conclusion de l'accord interne EDF de 2006 sur la sous-traitance socialement responsable, elle s'inscrit pleinement dans cet accord.
Une nouvelle et importante évolution a eu lieu en 2012, avec la mise en place du cahier des charges social du CSFN, que tous les exploitants nucléaires doivent intégrer à leurs appels d'offres pour toutes les activités de service et de travaux sur les INB. Ce cahier des charges social a été transmis, le 20 juillet 2012, au Premier ministre, au ministre du redressement productif et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, à l'issue de dix réunions d'un groupe de travail spécialement constitué, composé des quatre exploitants nucléaires civils, des organisations syndicales, d'organisations professionnelles, d'entreprises prestataires, de représentants d'administrations et de représentants de l'ASN.
Ce document vise à mieux encadrer le recours à la sous-traitance sur les installations nucléaires, à garantir le savoir-faire, les compétences et l'expérience des intervenants sur site. Il prend comme critères incontournables la sûreté nucléaire, la radioprotection, la prévention des risques professionnels et la qualité de vie au travail. Il constitue désormais une pièce contractuelle intégrée aux appels d'offres et aux marchés, qui lie l'exploitant nucléaire et l'entreprise prestataire, ce qui lui confère un poids bien plus important que celui d'une charte signée avec des organisations professionnelles.
Le cahier des charges social encadre notamment le recours à l'intérim et limite à trois les niveaux de sous-traitance. La qualification des entreprises inclut désormais l'existence d'une grille des salaires et la prise en compte de l'ancienneté et des qualifications ; des seuils qualitatifs sont aussi fixés pour l'indemnisation des grands déplacements, complétés par des critères de « mieux-disance » renforcés. Tous les exploitants nucléaires se sont engagés à mettre en oeuvre ce cahier dès le début de 2013. EDF l'intègre dans ses appels d'offres depuis la fin janvier 2013.
Les dispositions dont je viens de faire état ainsi que leurs résultats font l'objet d'un rapport annuel sur les conditions de recours aux entreprises prestataires sur le parc nucléaire en exploitation. Le rapport annuel 2012 a été transmis, le 16 septembre 2013, au ministre du redressement productif et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, ainsi qu'au président de l'ASN et au président du Haut comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire (HCTISN).