Chaque année depuis 2005, nous réalisons, en partenariat avec le centre de recherche en gestion de l'école Polytechnique, une enquête anonyme de satisfaction auprès des salariés des entreprises prestataires. Environ 10 % des salariés des entreprises sous-traitantes répondent. Les résultats sont fournis site par site et concernent la qualité de l'hébergement, les temps d'attente et autres. En 2012-2013, quelque 90 % des personnes interrogées se sont dites satisfaites de leurs conditions de travail dans les centrales, contre 83 % en 2009. On peut également percevoir cette satisfaction quand on rencontre ces personnels sur les chantiers. Cela n'exclut pas, sur une population de 20 000 personnes, qu'il puisse y avoir des difficultés avec l'employeur.
C'est bien le fait de travailler dans la durée qui donne sens à la relation contractuelle avec les entreprises prestataires : celles-ci n'investissent dans le développement des compétences que si elles disposent de visibilité et de lisibilité. La durée est aussi un moyen de créer un climat de confiance qui permet un dialogue franc et une meilleure évaluation des besoins pour améliorer la qualité des prestations. C'est pourquoi nous privilégions les contrats de longue durée, de cinq à sept ans. À cet égard, la disposition de la directive européenne 2004-17 visant à réduire cette durée à quatre ans était, selon nous, très contre-productive. Nous sommes donc heureux que ce projet n'ait pas abouti, car il aurait mis à mal l'esprit même du cahier des charges social du CSFN.
EDF n'a pas de position sur le mix énergétique ; nous mettons en oeuvre celui décidé par les pouvoirs publics, si tant est qu'ils veulent bien nous confier le soin de produire l'électricité. Reste que la production d'électricité d'origine nucléaire joue un rôle positif dans la maîtrise des émissions de dioxyde de carbone puisque le process n'en émet pas lui-même et que les activités annexes n'en émettent que fort peu si on les compare aux moyens de production à base d'énergies fossiles ou de bois.
Le choix de l'énergie nucléaire avait été dicté par des nécessités d'indépendance énergétique et de compétitivité économique. L'outil de production nucléaire est, en effet, un facteur très fort de stabilité de l'approvisionnement en électricité puisqu'il permet de disposer de visibilité sur la capacité à produire mais aussi sur les coûts.
La part d'activité confiée aux sous-traitants n'a pas évolué depuis quinze ou vingt ans. La politique de « faire » ou « faire faire » est ajustée, et j'ai déjà évoqué la réinternalisation des activités de maintenance en matière de robinetterie dans lesquelles nous employons 200 à 250 robinettiers. Nous suivons un processus identique de réinternalisation pour les activités de soudage, notamment à des fins de maintien des compétences. Il est important de disposer de capacités internes avec un haut niveau d'entraînement et susceptibles d'être rapidement déployées dans un CNPE. D'autres évolutions sont possibles, dans la mesure où la politique du « faire » ou « faire faire » n'est pas dogmatique et qu'elle est régulièrement révisée. Nous envisageons d'étendre le champ d'action des équipes chargées de la maintenance des groupes turbo-alternateurs et des motopompes primaires vers la maintenance de machines auxiliaires. Ainsi, si les grands équilibres restent stables – avec la proportion déjà évoquée de 80 % de sous-traitants –, la situation peut évoluer concernant des segments particuliers.
Par ailleurs, le suivi individuel de la dosimétrie des intervenants garantit la traçabilité des doses reçues au cours de toute intervention sur une INB quelle qu'elle soit. La proposition de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques de mettre en place un correspondant référent de la médecine du travail pour chaque site n'a pas connu de suite. En revanche, dans le cadre de la réflexion menée sur le cahier des charges social, le CSFN a proposé de limiter le nombre des services inter-entreprises qui assurent le suivi médical des salariés des entreprises extérieures, de manière à pérenniser les compétences de ces services médicaux dans un contexte où le recrutement de médecins du travail est difficile. En outre, la diminution du nombre d'opérateurs facilitera la traçabilité et le traitement de la dosimétrie. Aujourd'hui, pour les salariés des entreprises sous-traitantes, le suivi médical est assuré soit, lorsqu'ils en ont les compétences, par des services inter-entreprises qui prennent également en compte le suivi médical renforcé au titre des rayonnements ionisants, soit par le service autonome d'une centrale.
En matière de formation des personnels, EDF recrute, tout comme le secteur du nucléaire dans son ensemble. Certaines initiatives communes entre EDF, les entreprises et l'éducation nationale ou les collectivités territoriales pour ce qui est de l'apprentissage, répondent en partie au réel besoin de développer des formations donnant un accès plus facile à nos métiers. Des formations de type baccalauréat professionnel, BTS et Bac+3 ont ainsi été développées en logistique nucléaire – qui inclut la radioprotection – et en robinetterie. En général, les jeunes qui sortent de ces formations trouvent un emploi avant même d'obtenir leur diplôme.
Il est difficile de maintenir la culture de la sûreté dans un contexte d'incertitude. Néanmoins, il faut vivre avec les débats qui animent la société et garder le cap : notre priorité et devoir d'exploitant est de garantir la sûreté, et de faire notre métier le mieux possible. EDF applique les décisions prises en dehors du groupe la concernant, mais, en interne, elle s'efforce d'avoir une vision claire : celle-ci est aujourd'hui incarnée par le projet industriel de l'entreprise, qui fait sens pour les salariés, et qui vise à permettre de fonctionner au-delà de quarante ans en toute sûreté.
Mme Battistel m'a interrogé sur les arrêts de tranche dont la réalisation ne coïncidait pas avec les prévisions. La vie d'une tranche nucléaire se divise en deux parties : l'arrêt de tranche – assimilable à un arrêt technique –, pendant lequel on renouvelle une partie du combustible et on réalise des opérations de contrôle et de maintenance ; le cycle de production, qui se poursuit jusqu'à l'épuisement du combustible et un nouvel arrêt de tranche. En 2013, la disponibilité des centrales durant le cycle de production a été en moyenne de 97,4 %, et de 99 % pour plus de la moitié des tranches. C'est dire si la fiabilité de redémarrage après arrêt est élevée ; elle a progressé ces dernières années. Le niveau de disponibilité des tranches en marche est comparable à celui qu'on trouve chez les autres exploitants internationaux parmi les meilleurs.
Reste le problème de la durée des arrêts, due en particulier à la priorité accordée à la sûreté. Le redémarrage d'une tranche ne peut avoir lieu qu'après la mise en oeuvre d'un programme d'essais et de contrôles très rigoureux ; tant que le dernier contrôle n'est pas satisfaisant, la centrale ne redémarre pas. Il n'y a aucune impasse possible sur l'ensemble des critères – et il y en a beaucoup. Le tout est donc d'y parvenir du premier coup. Or les programmes d'activité sont parfois trop ambitieux ou bien sont construits de telle manière que les difficultés rencontrées conduisent à une prolongation de l'arrêt. C'est pourquoi il est important de reprendre la main localement sur une programmation des opérations optimisée et mieux répartie.
M. le rapporteur s'est étonné du taux de disponibilité, un peu inférieur à 80 %. Il faut prendre en compte à la fois l'excellente fiabilité des tranches une fois remises en service, et la durée des arrêts supérieures aux prévisions et qui explique le taux de charge.