Je vous remercie d'avoir dès le départ insisté sur le problème du vieillissement des installations, qui se pose dans beaucoup de pays européens. Quelles que soient les appréciations que l'on porte sur les réponses à y apporter – et notamment sur les différentes solutions technologiques –, l'obsolescence des réseaux et des installations exige des décisions que l'on ne peut pas éternellement repousser. Dans tous les cas, nous devrons consentir des investissements massifs.
Vous avez évoqué la question de la résilience des réseaux face au changement climatique ; mais cette résilience ne concerne-t-elle pas également certaines installations qui, en cas d'événements climatiques extrêmes, peuvent être menacées ? Ainsi, au moment des tempêtes aux États-Unis, certains sites de production ont dû fermer. Quant aux installations nucléaires, qui se situent toujours à proximité de cours ou de plans d'eau, leur fonctionnement peut être perturbé tant par l'élévation du niveau des mers que par les sécheresses.
Toujours en lien avec les enjeux climatiques, si le prix de l'électricité est beaucoup plus faible aux États-Unis qu'en Europe, il ne faudrait pas en conclure que la recherche de la compétitivité exige de le faire baisser chez nous. En effet, ces prix bas s'expliquent par l'absence de la prise en compte du coût du carbone. L'AIE ayant à de multiples reprises attiré l'attention sur le risque climatique et ses conséquences sur la sécurité énergétique et plus globale de nos pays, je n'imagine pas qu'elle puisse suggérer d'imiter les États-Unis en cette matière.
La pointe hivernale constitue indéniablement un élément important de variabilité de la consommation électrique en France. Pour l'affronter, il convient entre autres de travailler directement à la source du problème : le chauffage électrique. Il s'agit donc d'une politique nationale à mener dans le cadre de la transition énergétique.
Dans son rapport de 2011, l'AIE recommandait d'adopter, face aux dérèglements climatiques, une série de mesures dont 70 % concernaient l'efficacité énergétique, 18 % les énergies renouvelables et 3 % le nucléaire. Cette répartition reste-t-elle valable aujourd'hui ?
En matière de sécurité d'approvisionnement, vous avez évoqué, avec raison, la variabilité des énergies renouvelables qui reste problématique tant que l'on ne sait pas correctement stocker l'électricité. Pourtant, lorsque la production est concentrée dans quelques installations de grande puissance, l'arrêt d'une d'entre elles entraîne également des conséquences importantes. La variabilité est donc valable pour toutes les énergies. Ainsi, un accident majeur dans une centrale nucléaire – comme au Japon –, voire un accident générique obligeant à fermer plusieurs installations – scénario mis en exergue par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) française –, auraient un impact très considérable. Comment évaluez-vous, en cette matière, les différentes énergies non carbonées, porteuses de mérites et de vulnérabilités différentes ?
Le président Brottes s'est demandé si l'on pouvait mener une politique énergétique nationale ; que pensez-vous aujourd'hui du marché électrique européen ? Plusieurs de nos auditions ont mis en évidence ses dysfonctionnements, son incapacité à prendre en compte l'adaptabilité aux situations de crise. Comment le rendre plus efficace ?
Enfin, les mécanismes de capacité – compléments permettant de faire face aux moments de pénurie d'électricité lors des pointes –, se limitent pour l'instant en général aux énergies fossiles, et de plus en plus souvent – en raison de son faible prix – au charbon. Or toutes les énergies fossiles ne se valent pas ; d'après vous, lesquelles d'entre elles correspondent le mieux à l'objectif de transition énergétique que se sont fixé les pays de l'Europe et de l'OCDE ?