Intervention de Yannick Rousselet

Réunion du 27 février 2014 à 10h00
Commission d'enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d'exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l'électricité nucléaire

Yannick Rousselet :

En tout cas, il est certain qu'il est très gros et très complexe. En outre, l'idée que, grâce à des économies d'échelle, il permettrait de réduire le prix du mégawattheure me paraît erronée.

Le chantier a démarré en 2007. En tant que riverain et membre de la commission locale d'information (CLI) de Flamanville, j'ai pu en suivre l'évolution de bout en bout. On est allé de ratés en ratés. On dit que c'est parce que c'est un prototype, ou une tête de série, mais le chantier a été interrompu pour la première fois dès le début du terrassement, après que l'on a envoyé des gravats sur les réacteurs voisins ; ensuite, tout a été à l'avenant. On n'a pas été capable de réaliser la galerie de rejets telle qu'elle avait été initialement conçue, alors que l'on connaissait dans le détail la géologie du lieu, puisqu'une mine de fer y avait été exploitée durant de très longues années ; du coup, il a fallu modifier complètement les tracés. Quand on a commencé à couler le premier béton, on n'est pas parvenu à fabriquer un béton conforme, avec la teneur en eau nécessaire. Une fois les premiers ferraillages faits, on s'est aperçu que certains avaient été oubliés et que d'autres ne coïncidaient pas entre eux ; on a manchonné comme on a pu pour sauver la situation ! Puis ont commencé les soudures ; dès le début, il fut flagrant qu'il y avait un problème de formation, et que les soudeurs n'étaient pas assez compétents ; résultat : un taux d'échec phénoménal de 26 %, alors qu'il est de 4 à 5 % dans l'industrie classique. On n'a pas réussi à monter le « liner », l'enceinte interne, en raison de défauts sur les tolérances, les soudures, etc. Quant aux consoles du pont polaire, elles ont défrayé la chronique ; il suffisait d'avoir fait son apprentissage en chaudronnerie pour s'apercevoir que leur conception ne ressemblait à rien. Ce qui est incroyable, c'est que malgré ces erreurs, tous les seuils de contrôle ont été franchis et que l'on a fini par monter des produits imparfaits dans l'enceinte de l'EPR ; c'est à ce moment-là qu'un simple peintre, qui voulait sabler les consoles, s'est aperçu, à l'oeil nu, que toutes les soudures étaient défectueuses ! Il m'a immédiatement appelé pour me signaler le problème.

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