Intervention de Jean-Claude Peyronnet

Réunion du 12 mars 2014 à 17h30
Commission des affaires étrangères

Jean-Claude Peyronnet, président :

Parce que je suis historien, je me garde généralement de parler des « leçons de l'histoire ». Il reste que la similitude entre la situation que nous observons aujourd'hui en Crimée et celle qu'ont connue les Sudètes en 1938 est frappante. Comme les populations à dominante allemande des Sudètes, celles à dominante russe de Crimée considèrent qu'elles sont brimées, ce qui entraîne l'intervention du puissant voisin qui leur vient en aide. Mais, sans remonter au siècle dernier, le cas de la récente crise géorgienne est également plein d'enseignements : nous avons considéré que la paix avait été sauvée mais M. Vladimir Poutine a obtenu ce qu'il souhaitait et, aujourd'hui, plus personne ne parle des deux provinces du nord sur lesquelles il avait des vues.

Le risque est grand que la Crimée connaisse un sort semblable. Elle est déjà un protectorat de fait – vous ne l'avez pas dit de cette façon, monsieur le ministre, mais cela revient au même –, et je crains que nous en restions là. La Russie n'a pas besoin d'une annexion immédiate : il lui suffit de laisser pourrir la situation pour que tout le monde passe à autre chose. Nous oublierons alors la Crimée, sauf si de nouveaux problèmes se posent pour les provinces de l'est de l'Ukraine.

Cela est d'autant plus inquiétant que le risque militaire est réel, même si personne ne souhaite qu'il se concrétise. Des forces américaines et des avions espions se déploient en Pologne ou en Roumanie. On ne sait jamais à l'avance ce qui mettra le feu aux poudres…

Les Occidentaux font ce qu'ils peuvent mais il ne faut pas oublier qu'en raison de l'imbrication des économies, presque toutes les mesures de rétorsions envisagées auraient un effet boomerang. Seules celles concernant les avoirs de l'entourage de M. Vladimir Poutine pourraient être efficaces, à condition que le président de la Fédération de Russie soit sensible aux arguments de ses amis.

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