L'Europe est dans une situation financière difficile : d'où vient cet argent ? Ces 11 milliards d'euros ne suffiront pas ; il faudrait plutôt investir 35 milliards en 2014 et 2015.
Je me demande si toute cette affaire a été bien pensée, et si l'histoire a bien été prise en compte. Tout n'a pas commencé en 1991 : l'Ukraine a été rattachée à la Russie jusqu'au Dniepr en 1654 ! La comparaison avec les Sudètes qui appartenaient à l'Empire austro-hongrois jusqu'en 1919 n'a pas de sens. Le général de Gaulle rappelait qu'il n'y avait pas de politique qui vaille en dehors des réalités. Or il est incontestable que, lors de la dissolution de l'URSS, la création de la CEI s'est faite dans des conditions invraisemblables qui posent des problèmes pour des minorités russes comptant environ 25 millions de personnes dans une bonne dizaine de pays – dans les pays baltes, en Asie centrale ou en Ukraine. Affrontons ces problèmes et acceptons le réel !
Je ne veux pas épiloguer sur les questions juridiques – la Rada avait-elle le pouvoir légal de renverser M. Ianoukovitch ? Je préfère que nous imaginions la possibilité de trouver un compromis. S'il n'est pas douteux que, dimanche, le référendum en Crimée sera favorable à l'indépendance, il n'est pas du tout certain que la Russie accepte qu'il en soit ainsi. Elle pourrait se contenter d'utiliser cet élément dans une négociation dans laquelle elle défend l'idée d'une Ukraine fédérale : la Crimée resterait formellement dans l'Ukraine mais elle serait dotée d'un statut d'autonomie renforcée.
Je rappelle que les Russes sont particulièrement attachés aux principes du droit international, comme l'intégrité territoriale des États et le refus de l'ingérence, qu'ils défendent bec et ongles à l'ONU. Parce qu'ils sont aujourd'hui un peu gênés, il y a le chas d'une aiguille pour une négociation productive. Je ne crois pas aux sanctions ; elles seraient à double tranchant. L'habilité et la prudence permettront seules de tracer une voie qui évite d'aggraver une crise majeure, et je sais trop que le ministre n'en manque pas pour lui suggérer d'en faire preuve.