Ce texte visant à instituer une obligation de déclaration de domiciliation auprès des communes pose divers problèmes.
La création d'un fichier communal partagé ou interconnecté soulève des questions d'ordre juridique et d'ordre technique.
D'un point de vue juridique, la loi relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés dispose que la constitution de tout fichier doit répondre à une finalité précise. Un fichier ne saurait être utilisé à divers effets. Or la variété des usages possibles de ces registres, tout comme la multiplicité des destinataires – prestataires et groupements de communes, entre autres –, ne garantissent ni la confidentialité des données ni leur sécurité. Même si l'amendement CL3 de la rapporteure en décrit certains usages et traitements potentiels, il n'en demeure pas moins qu'aucune finalité explicite n'est précisée
Le texte contrevient ainsi à l'esprit et à la lettre de l'article 6 de la loi précitée, qui pose des obligations et des contraintes différentes selon le choix de traitement et d'utilisation de cette base de données. Soit il s'agit de fichiers locaux, dont les données sont échangeables entre communes, auquel cas il convient de préciser les destinataires explicitement désignés pour en obtenir régulièrement communication ainsi que les tiers autorisés ayant qualité pour les recevoir de façon ponctuelle et motivée. Soit il s'agit de fichiers locaux interconnectés dans une base nationale, ce qui suppose un système d'information commun aux communes, ainsi que la gestion et la mise en place des systèmes, des logiciels et de la formation des utilisateurs autorisés à accéder aux données. Dans les deux cas, nous considérons que la mise en place de cette déclaration de domiciliation et la constitution de fichiers auront nécessairement un coût important, notamment en termes d'ETP (équivalents temps plein) dans les mairies, sans garantie significative d'une amélioration des performances dans les missions statistiques dévolues à l'INSEE.
Il est prétendu que l'absence de déclaration de domiciliation ne sera pas soumise à sanction. Mais le récépissé de déclaration sera indispensable pour le raccordement aux différents réseaux, l'inscription sur les listes électorales, l'inscription des enfants à la crèche, à l'école, à des activités périscolaires ou culturelles. La privation de l'accès à des biens et services d'intérêt général est une sanction qui ne dit pas son nom ! Si tel n'était pas le cas, d'ailleurs, la déclaration de domiciliation resterait facultative et cette proposition de loi deviendrait inutile.
Si l'esprit de ce texte peut répondre à des difficultés spécifiques – notamment celles que posent les faux résidents des communes des régions frontalières –, les dispositions semblent cependant disproportionnées et laissent planer de vastes incertitudes juridiques et techniques.