Ce projet de loi était très attendu par les écologistes : en effet, dès mars 2000, Guy Hascoët, alors secrétaire d'État à l'économie sociale et solidaire (ESS), avait accompli un grand travail avec les acteurs de ce secteur afin d'élaborer la première loi sur l'ESS. Mais, en raison des événements électoraux de 2002, cette page fut trop vite tournée et il aura fallu attendre une décennie pour rouvrir ce débat. Les attentes des acteurs du secteur étant par conséquent très fortes, nous apprécions que le remaniement ministériel ne se soit pas traduit par l'enterrement de cet excellent projet de loi.
C'est en effet la première fois, qu'une loi définit et encadre ce secteur – que les écologistes soutiennent depuis longtemps dans les territoires. En proposant un autre modèle économique et une autre approche, les acteurs de l'ESS sont source d'innovation, tant grâce aux réponses qu'ils apportent au public qu'à leur mode de développement. Et concrètement, sur le terrain, ce modèle fonctionne !
Nous attendons donc beaucoup de cette loi pour consolider ce secteur, pour que l'impact social et environnemental des activités économiques ne soit plus relégué au second plan et que les valeurs de l'ESS se propagent sur l'ensemble du territoire. Cette loi doit permettre à ce modèle économique alternatif de se diffuser afin de favoriser la proximité et la solidarité et de créer des emplois non délocalisables.
Au Sénat, ce texte a déjà bien évolué grâce au travail de nos collègues, qui a notamment permis l'intégration de l'insertion par l'activité économique dans le périmètre de l'ESS de même que celle de la stratégie régionale de l'ESS au sein du schéma régional de développement économique et de l'innovation, et qui a également prévu la possibilité pour les sociétés commerciales à capital variable de racheter leurs parts, ainsi que l'information des salariés en cas de cession d'une entreprise.
À l'Assemblée nationale, nous serons nous aussi force de proposition, notamment afin d'inciter les acteurs à se regrouper au sein des pôles territoriaux de coopération économique, de promouvoir l'ESS et les circuits courts grâce aux contrats alimentaires territoriaux, d'assurer la reconnaissance des monnaies locales complémentaires et de permettre la mise en commun de matériel, et ce pas uniquement dans le domaine agricole.
Avant d'en venir aux articles dont nous sommes saisis, je tiens à souligner l'importance de l'article 9, qui permet de réserver des marchés publics à des structures oeuvrant pour l'intégration sociale et professionnelle des personnes handicapées. Quant aux articles que nous allons examiner, si les dispositions relatives aux fondations et aux fonds de dotations sont intéressantes, j'axerai néanmoins mon propos sur les associations. S'agissant de l'article 10, j'ai déjà eu l'occasion d'indiquer à quel point la question du financement est primordiale. Les associations étant avant tout des acteurs de terrain assurant de nombreuses missions relevant de l'intérêt général, leur utilité publique n'est plus à démontrer. Or la reconnaissance de celle-ci doit aller de pair avec des financements pluriannuels et le subventionnement doit être réaffirmé comme l'un des principaux moyens de soutien de la vie associative. Il nous faut en effet sortir du système de financement par projets et par voie d'appels d'offres qui fragilise les associations, parfois contraintes de tordre leurs projets pour les faire « entrer dans des cases », c'est-à-dire pour les faire correspondre aux critères requis. Un tel système ne leur garantit nullement les financements pérennes dont elles ont besoin et exclut toute possibilité de financement de leurs besoins structurels de fonctionnement. Les appels d'offres tendent à privilégier les « moins-disants » au lieu des « mieux-disants ». Dangereuse, la mise en concurrence constante des associations avec le secteur privé traditionnel réduit leur rôle à celui de simples prestataires de services. En les obligeant à répondre à une commande, ce système détruit la capacité de ces acteurs de terrain à proposer de véritables solutions innovantes et nous éloigne de la nécessaire co-construction des politiques publiques. Il est donc indispensable de sécuriser le modèle des subventions, notamment dans le contexte, déjà évoqué par notre rapporteur, de diminution des financements publics.
J'insisterai aussi sur la nécessité de simplifier les démarches administratives des associations, y compris en ce qui concerne leurs demandes de financement, et sur le fait que les conditions de versement des subventions aux associations sont tout aussi importantes que leur mobilisation. Il conviendrait donc notamment d'en revoir les délais d'obtention.
Quant aux dispositifs permettant aux associations de développer leurs fonds propres, ils vont dans le bon sens.
S'agissant enfin de l'article 41, il semble nécessaire – afin, encore une fois, de faciliter le travail des associations et de limiter leurs coûts de fonctionnement – de permettre la mutualisation de moyens entre les structures qui ne souhaitent pas fusionner, en instituant un statut juridique qui leur permette de bénéficier de droits spécifiques, notamment en matière fiscale.
Comme vous l'aurez bien évidemment compris, nous voterons ce texte avec enthousiasme.