Après avoir présenté les grandes lignes du projet de loi de finances pour 2013, je vous proposerai un développement thématique sur l'immobilier de la gendarmerie, un sujet qui devient particulièrement sensible.
Le Président de la République a fait de la mission « Sécurité » une priorité et le projet de loi de finances (PLF) pour 2013 traduit cet engagement dans les faits. Le PLF pour 2013 propose un bon budget pour la gendarmerie. Les crédits du programme 152 « Gendarmerie nationale » sont globalement stables entre 2012 et 2013, autour de 7,9 milliards d'euros en engagement comme en paiement, ce qui représente un effort réel dans le contexte de réduction des dépenses de l'État.
Nous nous réjouirons tous de l'augmentation des effectifs de la gendarmerie. Hors évolutions de périmètre, le gain net sera de 193 ETPT. Il s'agit d'un ballon d'oxygène particulièrement bienvenu, qui permettra aux gendarmes de faire face aux sollicitations toujours plus nombreuses dont ils sont l'objet. Il s'agit d'une inversion de tendance qui fait écho aux demandes de notre commission.
À la suite de plusieurs années de diminution, les crédits de fonctionnement avaient atteint un niveau relativement faible. Pour 2013, cette tendance est arrêtée et les ressources seront stables. On pourrait souhaiter plus, mais il s'agit d'un premier progrès. Ces crédits permettront de répondre aux besoins essentiels, sans plus. La partie carburant pose une difficulté réelle, leurs missions de service public imposant aux gendarmes de parcourir l'ensemble du territoire national. Ils bénéficient pour ce faire d'une dotation globale exprimée en litres et il faut espérer que ce financement repose sur de bonnes anticipations de prix, faute de quoi l'enveloppe de fonctionnement pourrait se trouver fragilisée.
En 2013, les crédits d'investissement du programme 152 permettront de répondre à des besoins pressants ; travaux urgents dans les casernes, achat de véhicules, modernisation des systèmes d'information et de communication. L'arbitrage pour cette année a été de limiter les crédits d'investissement lourd dans le domaine immobilier et notamment domanial. La baisse est importante, puisque l'enveloppe passe de 289 millions d'euros à environ 165 millions d'euros. Ce montant permettra de parer au plus pressé mais, à l'avenir, il faudra dégager des crédits importants pour faire face aux besoins dans ce domaine.
Ces moyens permettent aux gendarmes d'assurer des missions nombreuses et toujours plus exigeantes. Je retiens tout d'abord l'évolution lente mais profonde de la place du gendarme dans la société. Il est de plus en plus souvent impliqué dans les drames du quotidien tels que les accidents de la route et de la vie ou encore les conflits familiaux. Dans les territoires où les services publics s'affaiblissent, et notamment dans les zones rurales, il est bien souvent le seul interlocuteur immédiatement disponible.
Au titre de ses missions traditionnelles, je relève sa forte mobilisation face à la croissance des cambriolages et notamment face à la délinquance itinérante. Des moyens particuliers sont aujourd'hui mis en place pour lutter contre un certain nombre de réseaux venus notamment de l'Europe de l'Est.
Outre-mer, la gendarmerie déploie des moyens essentiels au maintien de l'ordre et de notre souveraineté, que ce soit à Mayotte avec la lutte contre l'immigration clandestine ou bien sûr en Guyane, avec son investissement exemplaire dans l'opération HARPIE de lutte contre l'orpaillage clandestin.
Elle est également engagée en opérations extérieures. À ce titre, j'ai souhaité me rendre au Kosovo, qui est le deuxième théâtre de déploiement. Environ 70 gendarmes y sont déployés, dont 52 dans le cadre du programme de formation de l'Union européenne EULEX. La taille de notre contingent a régulièrement diminué et ma conclusion est que nous devons maintenant retirer nos gendarmes de ce théâtre. Le coût de déploiement de moyens blindés est trop élevé, les troupes ne sont pas suffisamment nombreuses pour intervenir en toute sécurité et, disons-le, je n'ai pas le sentiment que l'État kosovare soit devenu un partenaire particulièrement solide.
J'ai le sentiment que nos gendarmes sont maintenus artificiellement sur ce théâtre afin d'entretenir une présence française. Cela n'est pas tenable et, surtout, nous invite à constater, une fois de plus, que notre diplomatie politique et économique ne sait pas défendre nos intérêts sur les théâtres où nous envoyons nos militaires. Les ministères ne sont jamais parvenus à résoudre cette question. Peut-être devrions-nous nous en saisir ? D'autres pays savent mettre à profit leur présence militaire pour y promouvoir leurs intérêts économiques ; je pense par exemple à l'Allemagne.
Dans une démarche plus prospective, le constat des difficultés, liées au casernement de la gendarmerie m'a conduit à consacrer un développement spécifique aux questions immobilières en deuxième partie de mon avis budgétaire.
Je me suis efforcé de recenser les principales difficultés, qui sont surtout liées au manque d'investissement dans les casernes domaniales. Les besoins en rénovation sont considérables : il faudrait investir 200 à 300 millions d'euros par an pour remettre le parc à niveau.
Si, en dehors du parc domanial, le casernement est fréquemment en bon état - notamment lorsqu'il a été mis en place par des collectivités locales dans le cadre de financements innovants -, le coût des loyers va croissant, s'élevant de plus de 10 millions d'euros chaque année. Là encore, il nous faudra gérer une pression de plus en plus importante sur les crédits immobiliers.
Le ministère et notamment la direction générale de la gendarmerie nationale mettent en oeuvre une série de mesures d'amélioration du parc, telles que l'isolation thermique ou l'installation de panneaux photovoltaïques. Mais cela ne répond pas complètement au fond du problème qui demeure fort simple : le manque de ressources. Dans le contexte particulièrement contraint que nous connaissons, j'ai donc considéré que mon rôle était de proposer des pistes réalistes pour améliorer la situation.
Avant d'investir dans les infrastructures, il nous faut revoir les implantations de la gendarmerie. Il n'est plus possible de travailler dans des casernes particulièrement dégradées. Faute d'investissement des collectivités notamment, les brigades sous-dotées en personnels devront être fermées. Maintenir des brigades à quatre ou cinq gendarmes présente en effet un coût de fonctionnement élevé sans qu'elles puissent assurer un niveau suffisant de service public. Nous devons avoir le courage de fermer certaines casernes.
Parallèlement, il me semble nécessaire de profiter de l'importante mobilisation du Gouvernement en faveur des économies d'énergie pour entreprendre un plan d'amélioration des logements. Cela doit constituer une priorité.
S'agissant là encore des questions géographiques, je relève que l'implantation des pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie pose parfois question, lorsque par exemple ils se trouvent à une heure de temps des agglomérations. En outre, une réflexion devra être conduite sur la pertinence du cadre départemental, le découpage administratif ne correspondant plus forcément à la réalité des problèmes de sécurité.
Enfin, notre commission devra suivre de près l'évolution des produits de cessions immobilières de la gendarmerie. La loi sur le logement social, dite loi Duflot, même retardée, prévoit un mécanisme de décote pour diminuer le prix de vente des emprises publiques afin d'aménager des logements sociaux. Dans le cas des gendarmes, cela pourrait signifier la diminution d'une ressource attendue à 120 millions d'euros d'ici à 2014 et pourtant vitale. Les préfets, qui décident de la décote, devront préserver les intérêts de la gendarmerie, car cet abondement est indispensable à la rénovation du parc domanial.
En conclusion, je considère que nous sommes face à un bon projet de budget. C'est pourquoi je vous recommande d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 152 « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurité » du projet de loi de finances pour 2013.