Intervention de Fabian Tosolini

Réunion du 9 avril 2014 à 9h15
Mission d'information sur l'écotaxe poids lourds

Fabian Tosolini, secrétaire général de la FGTE-CFDT :

Nous voici aujourd'hui revenus autour de la table pour parler de l'écotaxe – énième épisode d'un dossier qui a vu le jour à la sortie du Grenelle de l'environnement 1 et qui aujourd'hui est remis en cause, non sur le fond, mais dans sa forme.

La CFDT Transports Environnement a toujours défendu et reste favorable à la mise en place d'une taxe sur le principe du pollueur-payeur.

Ce préalable étant établi, revenons à l'histoire récente de l'écotaxe. Fin octobre 2013, durant un week-end, la mise en place de celle-ci a provoqué en Bretagne de multiples incidents graves et inadmissibles. Rappelons que des milliers de manifestants à l'époque s'étaient rassemblés afin de procéder au démantèlement d'un portique écotaxe dans le Finistère.

La CFDT avait notamment dénoncé fermement la participation de transporteurs routiers à ces agissements, qui ne représentaient finalement qu'une branche du secteur du transport routier.

Cette instrumentalisation de salariés par les patrons consistant à opposer l'écotaxe poids lourds et l'emploi fut indigne de représentants patronaux. Car, pour la CFDT, les enjeux écologiques et de santé publique liés à une crise environnementale, dont nous voyons les effets chaque jour un peu plus, méritent mieux que l'excitation de représentants d'un secteur le plus souvent bien peu regardants à l'égard du bien-être de leurs salariés.

En septembre 2013, lors de la conférence ministérielle pour la relance du transport routier de marchandises, la CFDT avait demandé au ministre des transports la mise en place d'un corps d'inspectorat mobile pouvant appliquer des sanctions adaptées afin de garantir la bonne application de l'écotaxe auprès des transporteurs.

Mais cela paraît maintenant bien prématuré. Les dernières déclarations de la nouvelle ministre en charge du dossier semblent vouloir tracer une nouvelle voie.

La CFDT Transports Environnement exige à cet égard d'être associée à l'ensemble des discussions qui vont à nouveau s'ouvrir sur ce dossier – discussions qui reprendront nécessairement les éléments environnementaux, sociaux, sociétaux et économiques, afin qu'ils ne soient pas une seconde fois les grands oubliés des débats. Il est important de rappeler qu'au moment de la création de l'écotaxe, seules les organisations patronales avaient eu un droit de parole, occultant de fait la vision de ceux qui vivront au quotidien le contrôle.

L'éventuelle remise à plat de l'écotaxe est un très mauvais signe envoyé auprès de l'ensemble des acteurs engagés dans la construction d'un transport pérenne écologiquement responsable et économiquement équilibré. Cette éventualité pose la question du lobbying des chargeurs et de la grande distribution qui pousse les transporteurs à ne pas appliquer le vrai prix du transport.

Pour la CFDT, l'écotaxe doit permettre la prise en compte du coût réel citoyen du transport. Elle doit être gérée, tant pour sa perception que son contrôle, par les services de l'État. Une réflexion devra aussi être menée sur les salariés d'Ecomouv' qui, sur le plan de l'emploi, se sont retrouvés directement impactés par les tergiversations ministérielles et la pression du populisme.

Je rappelle que les salariés étrangers qui utilisent chaque jour nos routes ont de plus en plus pour consigne de prendre les routes nationales gratuites, dont l'entretien est exclusivement financé par les contribuables.

Quelle solution avons-nous pour arrêter cet état de fait sinon la mise en place d'une taxe visant à faire payer au juste prix ceux qui ne parient pas sur le respect de l'environnement ?

La CFDT reste ouverte au débat sur son mode de calcul et de contrôle. Il convient par exemple de noter qu'aucune réflexion n'a été menée sur la gestion des contrôles, notamment sur le cas d'un routier obligé par son patron de ne pas activer son badge et se retrouvant verbalisé par une patrouille de douane.

La CFDT défend que le système et la méthode de calcul de paiement de l'écotaxe doivent reposer sur une automaticité du dispositif, et non sur le salarié.

La mise en place d'une taxe écologique sur les transports routiers ne peut être une fin en soi. Elle doit être clairement établie dans une réflexion plus globale sur ce que nous voulons créer comme transports de demain, dont les grandes lignes sont d'ores et déjà fixées par le livre blanc des transports européens de mai 2011.

Cela veut dire réfléchir ensemble sur l'avenir de l'énergie fossile, la pertinence des modes de transport et la mise en place d'une tarification européenne de ceux-ci – éléments dont nous pourrions utilement débattre lors de la remise en fonctionnement du Conseil national des transports (CNT).

Certes, l'écotaxe peut être une opportunité de financer de nouvelles infrastructures de transports, mais celles-ci doivent être conçues pour tous, tant pour l'amélioration du quotidien de millions de Français qui utilisent les transports en commun que pour les chargeurs qui parfois, faute de solutions proposées par les autres modes de communication à la suite d'une politique du tout routier depuis 1995, se voient dans l'obligation d'utiliser la route. Cette écotaxe devra retrouver son objectif premier de financement d'innovations d'infrastructures alternatives pour le ferroviaire et la voie d'eau, seule possibilité pour désengorger des infrastructures routières en surcapacité.

En résumé, l'écotaxe doit être un élément moteur des nouveaux transports que nous voulons construire. Ces nouveaux transports ne pourront pas être déconnectés de choix d'urbanisation écologiquement responsables favorisant les transports en commun tout en ne perdant pas de vue les choix de consommation des Français consistant à vouloir tout, tout de suite, tout le temps.

La CFDT Transport Environnement ne considère en rien que l'écotaxe soit un alourdissement fiscal à condition que sa conception et son application fassent l'objet d'une réflexion et d'une concertation et tiennent compte de l'intérêt collectif.

La seule question qui se pose donc est de savoir si au sein de la représentation nationale cet avis est partagé.

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