Intervention de Frédéric Cuvillier

Réunion du 11 décembre 2013 à 11h00
Mission d'information sur l'écotaxe poids lourds

Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche :

En tant que ministre de la République, ma mission est d'assurer la continuité de l'engagement de l'État en défendant un dispositif dont le Parlement s'est saisi à plusieurs reprises. La responsabilité de chacun est donc engagée. À nous de faire en sorte que ce dispositif soit une réussite.

Notre objectif est de promouvoir, grâce à l'écotaxe, une politique des infrastructures de transport cohérente et complémentaire entre les différents types d'infrastructures – fluvial, routier, ferroviaire –, pour disposer d'un réseau efficace, sécurisé, créateur de croissance et d'emplois.

Monsieur Ferrand, les contraintes juridiques sont celles de la directive européenne « Eurovignette ». Nous ne pourrons construire un dispositif que dans le cadre de cette directive, tant en ce qui concerne les exonérations que les tonnages et les critères de proximité. Les contraintes contractuelles sont celles du contrat signé avec Ecomouv', sauf à considérer que l'État indemnisera cette entreprise – en faisant peser 40 euros par foyer fiscal – pour cause de résiliation du contrat.

S'agissant du principe de l'utilisateur-payeur, je remercie ceux d'entre vous qui sont prêts à faire oeuvre de pédagogie. Au demeurant, en discutant avec les gens, y compris les transporteurs, on se rend compte que l'acceptabilité est bien supérieure à ce que l'on pensait. Le dispositif protégera les entreprises dans la mesure où la répercussion portera sur le consommateur, ainsi que sur le donneur d'ordre.

Monsieur Giraud, le choix a été fait, par décret de 2011, de retirer du réseau national certains axes sur le critère de faible trafic – moins de 800 poids lourds par jour. Pour les routes départementales, une concertation a été menée avec les conseils généraux. Toutes les routes nationales peuvent être taxées, et la taxation est obligatoire pour celles incluses dans le RTE-T (réseau transeuropéen de transport). La route nationale 85 fait partie du réseau RTE-T et sera donc taxée.

À cet égard, les observatoires sont indispensables car des éléments pertinents auparavant ne le sont plus nécessairement aujourd'hui. Au surplus, le dispositif sera difficile à mettre en place d'un point de vue technologique, mais aussi au regard de la révolution des modes de de financement. J'ajoute que le décret du 6 mai 2012 était d'une complexité son nom – aucune PME de transport n'aurait pu établir une facturation à l'unité ! C'est pourquoi j'ai voulu le simplifier.

Monsieur Le Fur, le taux de 10 % est une moyenne et concerne l'ensemble de la chaîne du transport.

La majoration forfaitaire est plus sécurisante et fiable que tout autre dispositif, notamment le régime réel. Le dispositif sera donc efficace, et il n'y aura globalement aucun enrichissement sans cause, faute de quoi le dispositif aurait été censuré par le Conseil constitutionnel. Le taux régional et le taux interrégional aboutiront à une moyenne de facturation.

Monsieur Thévenoud, le loyer a été négocié à hauteur de 230 millions d'euros HT, soit 270 millions d'euros TTC. Il sera opposable au moment où Ecomouv' sera en situation de démontrer le caractère techniquement achevé du dispositif, c'est-à-dire vraisemblablement fin décembre. Nous allons discuter avec l'entreprise : il y a des dispositions contractuelles de pénalités ou d'absence de pénalités, tout cela est à négocier. Les pénalités de retard sont de l'ordre de 8 millions par mois. Certains retards sont dus à Ecomouv, la suspension de la taxe est le fait de l'État : il conviendra de mettre en place des voies de conciliation. Au titre du loyer, l'État doit normalement payer chaque mois 19 millions d'euros HT, soit 23 millions d'euros TTC, mais nous essaierons de réduire ces montants.

Monsieur Duron, l'acceptabilité est très importante – si ce n'était pas l'utilisateur-payeur, c'est le contribuable qui devrait payer. En outre, si l'écotaxe avait été mise en place entre 2009 et 2012, nous aurions pu bénéficier de dispositifs européens d'aide à la modernisation du matériel roulant. Les Allemands ont bénéficié de telles aides au titre du passage à l'Euro VI. En ce qui nous concerne, la date butoir est le 31 décembre 2013. Cela n'exclut pas des mesures d'accompagnement : il nous faudra regarder ce qui est susceptible d'être accepté par la Commission européenne – je pense notamment aux primes à la casse.

Monsieur Savary, peut-être faut-il réviser le tonnage concerné. Néanmoins, une de mes priorités dans les prochains mois sera la lutte contre la concurrence déloyale des véhicules utilitaires légers (VUL) qui traversent notre pays en convois sans contrôle et avec des personnels souvent exploités et payés à vil prix. Il est essentiel de ne pas conforter cette concurrence.

Madame Huillier, la loi prévoit des dispositifs permettant d'étendre les prérogatives des contrôleurs routiers. Auparavant, les contrôleurs n'avaient pas le droit d'entrer dans les cabines des camions ! J'en profite pour saluer cette profession qui souffre d'un manque de reconnaissance – mais j'ai apporté aux intéressés des assurances sur l'évolution de leur statut. Dans un souci de simplification des contrôles, une circulaire portera sur les modalités de contrôle de tous les services de l'État – police, gendarmerie, douanes –, à laquelle s'ajoutera le plan de lutte contre la concurrence déloyale.

Le contrôle automatique des portiques sera très efficace. Il constituera aussi une sécurité pour les transporteurs en leur permettant de prouver la réalité des déplacements.

Monsieur Straumann, l'expérimentation alsacienne a été suspendue car la loi est intervenue par la suite. Je sais que plusieurs régions réclament l'application de l'écotaxe. L'expérimentation est une piste intéressante pour re-crédibiliser le dispositif, car les entreprises de transport devront pouvoir s'inscrire le jour venu et se doter des boîtiers nécessaires. L'harmonisation technique est une réalité, puisque les boîtiers sont compatibles avec les systèmes de télépéage européens.

Monsieur Boudié, le ministre du budget, Bernard Cazeneuve, complétera mon propos. Des dispositions ont été prises pour 2013 et 2014, mais la compensation ne pourra pas être éternelle. De la qualité de vos travaux dépendra la possibilité de mettre en place rapidement le dispositif amélioré.

Monsieur Heinrich, la taxe à l'essieu a été alignée sur les minima communautaires de taxation des poids lourds. Elle ne peut pas être supprimée.

La charge administrative du dispositif écotaxe est de 0,3 %. Les sociétés de télépéage ont mis en place des dispositifs d'accompagnement – rabais de 10 % pour les abonnés.

Monsieur Pancher, le Conseil constitutionnel est évidemment attentif au problème que vous avez soulevé. Une des pistes de travail pour le transport en compte propre est la sécurisation de la répercussion. Il nous faut réfléchir au caractère opposable du dispositif.

Les exonérations en fonction du kilométrage sont interdites par la directive européenne, exceptées pour les flottes affectées. De plus, elles seraient extrêmement difficiles voire impossible à contrôler.

Madame Sas, je vous remercie de vos encouragements. La compensation financière sera de 800 millions en 2014 et de 950 millions d'euros en 2015. L'écotaxe est en effet appelée à évoluer.

La suspension du dispositif à des conséquences sur les emplois de la société Ecomouv'. Nous en avons appelé à la responsabilité de celle-ci, mais la situation économique est à prendre en compte.

Monsieur Breton, un arrêté interviendra pour abroger celui fixant la date d'entrée en vigueur au 1er janvier.

Monsieur Le Ray, l'objectif est de faire aboutir des projets qui ont du sens avec des moyens affectés. C'est tout l'intérêt de l'écotaxe. L'AFITF se déterminera sous le contrôle du Parlement, qui doit être au coeur des stratégies d'aménagement du territoire. Je précise que les autoroutes ferroviaires ont été relancées.

Madame Beaubatie, quand la grande distribution est solidaire des producteurs en prenant comme prétexte l'écotaxe, elle peut démontrer sa volonté d'agir elle-même…

Monsieur Benoit, c'est votre mission d'information qui « a la main ». Mon ministère vous livrera toutes les informations nécessaires.

Les réseaux courts seront privilégiés par rapport aux réseaux longs. Une infime partie du réseau local sera taxée – les chemins communaux, qui constituent le coeur du trafic de proximité, ne seront pas soumis à l'écotaxe.

Monsieur Lurton, il faudra s'assurer d'une mise en place égalitaire du dispositif entre le transport de transit et le transport national.

S'agissant des autoroutes payantes, il ne pourra pas y avoir de centimes additionnels au prix du péage. Une directive précise que l'on ne peut pas aller au-delà du coût réel de l'utilisation de l'infrastructure.

Il conviendra d'observer le report modal vers les autoroutes. Je précise que ce gouvernement a augmenté de 50 % la redevance domaniale sur les sociétés autoroutières.

Madame Dubois, la pédagogie permettra d'obtenir l'adhésion de nos concitoyens.

Madame Alaux, les alternatives à la route s'inscrivent dans le cadre de notre politique de transport. Elles concernent les ports, l'hinterland, les noeuds ferroviaires, les désenclavements, les autoroutes ferroviaires, le fluvial, etc. C'est tout l'intérêt de la proposition des centimes additionnels régionaux.

Mme Le Callennec, 60 % du budget de l'AFITF concerne les modes alternatifs de transport à la route.

Je rappelle qu'un exercice – soit 500 millions d'euros – des programmes de modernisation des itinéraires routiers (PDMI) n'a pas été honoré. Or 20 % du réseau routier est très dégradé. C'est dire l'importance de la modernisation de notre réseau, en particulier au regard des conditions de sécurité.

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