Intervention de Gilles Savary

Réunion du 26 février 2014 à 11h00
Mission d'information sur l'écotaxe poids lourds

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Savary :

Je vous remercie, monsieur le président, pour la précision de votre témoignage.

Je peux comprendre votre souhait d'une mention en pied de facture, mais je décèle par ailleurs une contradiction dans vos propos. Vous dites en effet que la majoration forfaitaire est un sujet majeur d'incompréhension pour votre profession, mais vous soulignez aussi qu'il serait impossible d'individualiser la répercussion de la taxe pour les vingt-cinq clients pouvant être concernés par une même tournée. Si nous avons envisagé la majoration forfaitaire, c'est justement pour que le système soit mieux adapté à votre modèle logistique.

S'agissant des seuils, il est extrêmement tentant de vouloir exonérer les petits trajets. Comme M. Le Fur, sans toutefois en tirer les mêmes conclusions que lui, je ne pense pas que l'écotaxe pourra favoriser un report modal. En effet, dans une large majorité des endroits où elle s'appliquera, il n'existe pas de mode de transport alternatif.

Pour des raisons diverses, le rail ne marche pas dans notre pays, et cette situation n'est pas près de changer. En dépit des sommes considérables qui y ont été investies et du volontarisme dont on a fait preuve, en France et en Europe, rien ne s'est amélioré depuis vingt ans. On observe même une dégradation au profit de la route.

Si on a institué l'écotaxe, c'est pour trouver des ressources nouvelles afin de financer les infrastructures de manière pérenne et avec assez de visibilité, dans un contexte de désengagement budgétaire de l'État. L'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) est un outil fragile. Afin de sécuriser le financement des infrastructures, on a souhaité substituer une taxe utilisateur-payeur à son mode de financement actuel par des recettes affectées, hétérodoxes aux yeux de Bercy. Si l'écotaxe ne devait s'appliquer que sur les longs parcours, les recettes seraient bien moindres. Par ailleurs, le transport routier, très sensible aux effets de seuil, sait comment contourner ces seuils, comme on le voit actuellement dans le domaine du cabotage, aujourd'hui totalement dérégulé en France, les véhicules de moins de 3,5 tonnes n'étant pas concernés par la directive sur le sujet. Si le seuil d'application de l'écotaxe est fixé à 3,5 tonnes, les transporteurs s'équiperont de véhicules utilitaires légers.

Le trajet moyen d'un poids lourd en France, tous types de transport inclus, y compris international, est effectivement de 115 kilomètres. Imaginez quelle serait la perte de recettes si l'écotaxe n'était due que pour les trajets supérieurs à 120 kilomètres par exemple ! Celle-ci n'aurait alors pas grande utilité, car le transport international sur les longues distances ne représente qu'une faible part du transport.

Si l'on exonère de surcroît les trajets inférieurs à 50 kilomètres, on risque de multiplier les effets de seuil. Les transporteurs s'équiperont de véhicules utilitaires d'un tonnage inférieur à 3,5 tonnes et leur feront faire des relais de moins de 50 kilomètres, de façon à échapper à l'écotaxe. Ce double effet de seuil aboutirait paradoxalement à générer du trafic supplémentaire.

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